Après avoir mis au monde son premier enfant en octobre 2019, Anaïs Chevalier, 28 ans depuis ce vendredi, était revenue à la compétition à la fin de l’année dernière avec un seul objectif : jouer le haut du classement. En remportant la médaille d’argent du sprint des 57es championnats du monde de Pokljuka (Slovénie), la Dauphinoise a déjà rempli son objectif. « Je n’ai pas encore atterri. Ça n’arrête pas depuis que j’ai coupé la ligne, j’ai juste pu rapidement appeler à la maison. Je ne me rends pas trop compte de ce que j’ai fait », nous dit-elle d’entrée. Entretien.
- Au début de la saison, vous disiez que vous ne vouliez pas revenir pour faire des résultats quelconques. Vous devez être très heureuse de cette médaille d’argent décrochée sur le sprint des Mondiaux de Pokljuka (Slovénie)…
Je suis super contente parce que je suis quelqu’un qui n’aime pas trop afficher ses objectifs. Je suis un peu pudique là-dessus. J’ai enjolivé la réalité en disant que je venais pour ne pas faire grand-chose. Au fond de moi, je savais ce que je voulais faire. Ce sprint était sur ma liste pour une breloque. Je suis super contente parce que je remporte cette médaille d’argent sur un championnat, une course d’un jour.
- Cette médaille a-t-elle un goût différent de celle décrochée, déjà en sprint, à Hochfilzen (Autriche) en 2017 ?
C’est différent parce que j’arrivais ici avec une petite étiquette alors que j’étais une surprise en 2017. Je suis un peu plus détachée de cette médaille-là que de celle d’Hochfilzen parce que j’ai grandi, j’ai pris de l’expérience. Il y a moins l’innocence et la fougue.
« Un meilleur temps de ski, je n’avais jamais fait ça dans ma carrière ! »
- Vous réalisez le meilleur temps sur la piste : vous attendiez-vous à cela ?
Pas à ce niveau-là et autant dans la durée. Au mois de décembre, j’étais surprise d’avoir ce niveau-là puis encore surprise que ça tiennes en janvier. Un meilleur temps de ski, je n’avais jamais fait ça de toute ma carrière, même chez les jeunes ou les catégories inférieures [rires]. Finalement, je travaille aussi pour ça. Je pense que je me connais de plus en plus et, cette année, on a trouvé ce qu’il me fallait. C’est chouette.
- Pendant la course, vous rendiez-vous compte de cette vitesse à skis ?
Je sentais que j’étais bien parce que j’avais les jambes, pas de difficulté à en remettre, pas de mal aux jambes dans les bosses. Les sensations étaient bonnes. J’avais la chance d’être renseignée presque tout le long de la piste et, quand je sors à dix secondes de Tiril du debout alors qu’elle avait fait le plein, je me suis vraiment dit que ça allait bien.
- En milieu de semaine, vous avez disputé le relais mixte, qui s’est mal passé pour vous : comment avez-vous géré ces trois jours de coupure ?
Ça a été un moment pas facile parce que c’est la première fois que je foire un relais sur un grand championnat. C’est dur parce que c’est une course collective qui met en jeu beaucoup de choses. Après ce relais, j’étais triste et en colère contre moi. Je me suis rapidement excusée auprès des coéquipiers et du staff parce que je voulais passer à autre chose. Le lendemain, j’ai vraiment essayé de switcher parce que je ne pouvais plus rien y faire. Le meilleur moyen de me rattraper était d’aller chercher de bonnes performances.
« J’espère que ça va libérer des choses, même pour notre staff, nos entraîneurs »
- Cette médaille n’est peut-être qu’un début…
Je ne sais pas [sourire]… Ça ouvre tout de même le champ des perspectives. Il y a déjà une course demain, les écarts sont faibles et j’ai fait le boulot pour que la poursuite soit un petit peu plus facile. Rien n’est jamais facile mais, au moins, je suis placée. C’est déjà un beau point.
- Ce podium vous enlève-t-il un poids pour maintenant profiter des Mondiaux ?
Quoi qu’il arrive, au moins j’en ai une. Mais c’est mal me connaître que de dire que je vais m’arrêter en si bon chemin. C’est sûr que ça m’enlève peut-être quelque chose mais je n’ai tellement pas atterri que je ne sais pas trop…
- En début de saison, après votre podium décroché lors du sprint de Kontiolahti (Finlande), vous expliquiez n’avoir plus l’habitude des courses en confrontation directe : où en êtes-vous ?
Je pense que je suis guérie ! J’avais besoin de retrouver cette situation en compétition parce qu’on ne peut pas les reproduire à l’entraînement. On avait déjà fait deux mois de coupe du monde lors desquels j’ai montré que j’arrivais à mieux gérer cette confrontation. Je n’ai plus peur, c’est une question que je ne me pose même plus, je suis redevenue une biathlète sachant gérer ce genre de situation. Je n’aurai pas le frein à main demain, ce n’est plus quelque chose qui m’inquiète.
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- C’est la première fois qu’une Française remporte une médaille mondiale en individuel depuis Östersund 2019 et le bronze de Justine Braisaz lors de l’individuel : cela peut-il débloquer des choses ?
C’est vraiment une très bonne chose. Il ne faut pas se le cacher, on a toujours eu ce complexe face aux garçons. J’espère que ça va libérer des choses, même pour notre staff, nos entraîneurs. Tout à l’heure Fred [Jean] était vraiment content parce que c’est une médaille individuelle dans un groupe fille et ça faisait un moment qu’il y en avait pas eu. C’est très bien comme ça.
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Photos : Nordic Focus.