BIATHLON | ANTHOLZ 2020 – La 56e édition des championnats du monde de biathlon s’est refermée hier avec les mass starts. Après dix jours de compétitions acharnées, il est maintenant l’heure de tirer les premières conclusions de ces Mondiaux.
Vous avez la gueule de bois au lendemain de la clôture des championnats du monde de biathlon d’Antholz (Italie) ? Pas de panique, votre shoot journalier de biathlon arrive avec les tops et les flops de la compétition dressés par la rédaction de Nordic Magazine.
Les tops
Marte Olsbu Roeiseland (cinq titres, deux médailles de bronze)
Comment ne pas débuter les tops des Mondiaux d’Antholz par elle ? La Norvégienne de 29 ans avait fait, en début d’hiver, de ces Mondiaux sa priorité absolue, allant même jusqu’à déclarer forfait pour les courses du Grand-Bornand (Haute-Savoie) juste avant les fêtes de Noël. Une décision qui, à l’époque, n’avait pas été comprise par tout le monde. Y compris en Norvège.
Ce matin, personne ne lui reproche cette impasse puisque Marte Olsbu Roeiseland a réussi un incroyable grand chelem sur les pistes italiennes. Avec sept médailles en sept courses (un 100% similaire à celui réalisé par Marie Dorin-Habert en 2016 à Oslo-Holmenkollen) dont cinq titres (les trois relais, le sprint et la mass start), la Scandinave est la reine absolue de la dizaine d’Antholz. Sans contestation. D’autant que, sur un pas de tir compliqué à cause du vent changeant, elle n’a sorti que onze balles sur l’ensemble de la compétition.
Martin Fourcade (deux titres, une médaille de bronze)
Le patron du biathlon français a remis l’église au milieu du village pendant les championnats du monde d’Antholz.
Martin Fourcade, bronzé lors du sprint en ouverture, est ensuite redevenu champion du monde de l’individuel en offrant un quasi récital. Seule une balle n’a pas blanchi sa cible, la dernière.
Avec cette médaille d’or, il égale le record de onze titre individuels aux Mondiaux d’une autre légende, Ole Einar Bjoerndalen. Ce dernier pense même que le Français va le battre : pour cela, il faudra que le tricolore poursuive sa carrière jusqu’aux Jeux de Pékin en 2022, ce qui n’est pas acté.
On en saura plus le mois prochain après la fin de saison animée par la quête d’un huitième gros globe de cristal.
Sinon, Martin Fourcade et ses coéquipiers (voir ci-dessous), ont remporté le titre en relais. Et ça valait des larmes et un bonheur éternel.
Emilien Jacquelin (deux titres, deux médailles de bronze)
Un grand biathlète s’est révélé lors des compétitions disputées sur le majestueux site d’Antholz, à côté de la frontière autrichienne.
Le natif de Grenoble (Isère), licencié au club des sports de Villard-de-Lans, a grandi d’un coup. Le temps de la poursuite disputée le premier dimanche des Mondiaux. En face-à-face avec Johannes Thingnes Boe dans le dernier tour, Emilien Jacquelin a réussi à contenir astucieusement le Norvégien dans les derniers hectomètres pour s’offrir un premier titre mondial à 24 ans.
Son passé de cycliste l’a beaucoup aidé pour le placement et il a pensé, beaucoup, à Nans Peters, vainqueur au même endroit lors du dernier Tour d’Italie. Une force presque mystique l’a poussé ce jour-là.
Et puis, il a décroché le bronze avec Anaïs Bescond lors du relais mixte simple, malgré l’oubli d’un bâton après le dernier tir, une nouvelle médaille d’or avec ses frères d’armes sur le relais et un nouveau bronze, chipé à Tarjei Boe au sprint lors de la mass start. Devancer les frères norvégiens dans les derniers hectomètres, une spécialité iséroise.
Quentin Fillon-Maillet (un titre, deux médailles d’argent)
Plus rapide que n’importe quel autre biathlète sur les skis de fond dans le nord de l’Italie, le Jurassien Quentin Fillon-Maillet a réalisé des Mondiaux de très haute facture.
Malheureusement pour le numéro deux mondial, aucun titre individuel n’est venu récompenser ses efforts. La faute, lors du sprint remporté par le controversé Alexander Loginov (voir ci-dessous) et de la mass start, à une balle échappée au mauvais moment.
Sinon, le Français a assuré lors du dernier relais face à l’Allemand Benedikt Doll pour offrir la médaille d’or à tout un pays. « C’était un beau moment. Il y avait du stress évidemment parce qu’il fallait tenir le rang. C’est vraiment quelque chose de significatif ce titre », disait-il au micro du diffuseur après la victoire.
Le relais hommes et le bilan des Bleus (sept médailles en cinq courses)
Le titre des quatre mousquetaires (Emilien Jacquelin, Martin Fourcade, Simon Desthieux, Quentin Fillon-Maillet) du biathlon français restera, forcément, comme le point d’orgue de cette dizaine d’Antholz. Mais, avec les titres individuels de Martin Fourcade et Emilien Jacquelin et les quatre médailles décrochées lors du sprint et de la mass start, l’équipe de France masculine termine les Mondiaux avec sept médailles en cinq courses. Un bilan d’exception. Globalement, depuis le début de l’hiver, seul un podium, le premier de l’hiver lors du sprint d’Östersund (Suède), a échappé aux griffes de l’équipe de France masculine. Irréel.
Johannes Thingnes Boe (trois titres, trois médailles d’argent)
Au matin de la dernière journée, le Norvégien Johannes Thingnes Boe était bien double champion du monde en mixte mais il lui manquait la breloque dorée en individuel.
Deuxième de la poursuite et de l’individuel, le papa de Gustav a réglé la mire lors de la course des rois : avec le seul 20/20 de la journée, il l’emporte après un récital. Le vainqueur sortant du gros globe de cristal gagne son quatrième titre mondial individuel, le premier depuis le sprint d’Östersund l’année dernière. Une petite éternité à son échelle. Il va maintenant essayer de combler, au cours des trois derniers week-ends, son retard sur Martin Fourcade au général. 98 points séparent aujourd’hui les deux hommes.
Susan Dunklee, la seule surprise d’Antholz (une médaille d’argent)
Un rayon de soleil ! Au lendemain de ses 34 ans, la biathlète américaine Susan Dunklee est allée chercher une fabuleuse médaille d’argent lors du sprint des Mondiaux.
Avec l’un des trois seuls 10/10 de la compétition, la 36e mondiale (!!!) est même sortie en tête après son tir debout. Malheureusement, elle a craqué dans le dernier tour face à Marte Olsbu Roeiseland. Cependant, perclue de fatigue, elle a terminé la course héroïquement pour décrocher l’argent devant la Tchèque Lucie Charvatova.
Dorothea Wierer (deux titres, deux médailles d’argent)
À la maison, l’Italienne Dorothea Wierer remporte quatre médailles. Championne du monde de la poursuite puis de l’individuel deux jours plus tard, elle a fait vibrer son public. Elle n’était pas loin de la passe de trois lors de la mass start. Seulement, celle qui a réalisé un tir debout légendaire lors du relais, s’est emballée lors du dernier passage derrière la 22 long rifle, manquant une cible.
La cible de trop pour devancer Marte Olsbu Roeiseland. Au classement général de la coupe du monde, Wierer réalise une superbe opération puisque Tiril Eckhoff s’est complètement manquée (voir ci-dessous) en Italie : avec plus de 100 points d’avance sur Hanna Öberg, la maudite de ces Mondiaux (trois quatrièmes places), elle peut voir venir et penser à un deuxième gros globe de suite.
Les 165 000 spectateurs venus sur le site de compétition
Lors des huit jours de compétitions, l’immense tribune placée à la perpendiculaire du pas de tir mais en parallèle de la ligne droite d’arrivée était pleine à craquer.
Sur les bords de la piste, c’était pareil. Les nombreux supporters allemands venus encourager leurs champions (cinq médailles au total, dont quatre d’argent et une de bronze) ont donné de la voix à chaque passage sur le pas de tir. L’ambiance était vraiment présente et 165 000 spectateurs ont fréquenté le stade d’Antholz. Une véritable réussite populaire.
Les flops
L’équipe de France féminine (une 5e place pour meilleur résultat)
Les biathlètes françaises ont passé l’intégralité des championnats du monde à essayer de retrouver leur tir. Malheureusement, il n’est jamais revenu et elles ont traversé la compétition telles des fantômes.
C’est dommage puisque le potentiel était là sur les skis de fond. Justine Braisaz et Julia Simon ont signé des très bons temps mais, derrière la carabine, c’est comme s’il y avait un blocage mental sur ce pas de tir venté.
Anaïs Bescond, onzième de la poursuite, et Simon, cinquième de la mass start en jouant le titre au dernier tir malgré un coup de froid, ont été les deux seules faibles éclaircies bleues.
Le relais, terminé à la quinzième place avec 4 tours de pénalité et 19 balles de pioche, a été un creux. Un vide intersidéral. Cependant, Stéphane Bouthiaux, le patron du biathlon, a tenu à soutenir ses biathlètes. Elles sont dans une passe très difficile alors qu’il reste trois semaines de compétitions, à Nove Mesto (République Tchèque), Kontiolahti (Finlande) et Oslo-Holmenkollen (Norvège). Il faudra se relever de ce cuisant échec.
Lisa Vittozzi (une 6e place pour meilleur résultat)
À l’image des Bleues, l’Italienne Lisa Vittozzi a manqué ses championnats du monde. Sixième du sprint en ouverture, elle a ensuite complètement craqué terminant 27e de la poursuite, 71e de l’individuel (12/20) puis 30e de la mass start (11/20). Seul son passage lors du relais a été parfait tout comme celui du mixte. Elle décroche d’ailleurs une médaille d’argent sur cette course, la seule des dix jours passés à Antholz. Une édition des Mondiaux à oublier pour la Transalpine.
Tiril Eckhoff (une 7e place pour meilleur résultat)
Si Lisa Vittozzi a sombré à Antholz, que dire de la Norvégienne Tiril Eckhoff ! Arrivée avec le dossard jaune de leader de la coupe du monde en Italie, la Scandinave a vécu un naufrage.
Pas dans le coup au tir, la biathlète qui avait réalisé le triplé au Grand-Bornand (Haute-Savoie) termine 59e du sprint (4/10), 20e de la poursuite (17/20), 15e de l’individuel (16/20) puis 7e de la mass start (16/20).
Maintenant à 112 points de Dorothea Wierer au général de la coupe du monde, elle a perdu gros, très gros dans le Trentin-Haut-Adige.
Le flou régnant autour d’Alexander Loginov
Il avait fait couler beaucoup d’encre au moment de sa victoire lors du sprint, devant Quentin Fillon-Maillet, Martin Fourcade et les frères Boe.
Le Russe Alexander Loginov, suspendu pour usage d’EPO entre 2014 et 2016, n’a même pas terminé les Mondiaux puisqu’il a déclaré forfait pour la mass start. Il faut dire qu’il a été réveillé peu avant 6 heures samedi matin par les carabinieri italiens qui ont défoncé la porte de sa chambre, partagée avec Evgeniy Garanichev.
Une perquisition a été menée, mais les motifs sont assez flous. On parle de recherche de produits dopants mais aussi d’accréditation pour son entraîneur personnel. Bref, le cas Alexander Loginov est obscur et confus. « Quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup », disait Martine Aubry à propos de François Hollande en 2017. On aimerait que la situation du biathlète russe soit éclaircie.
Photos : FFS et Nordic Focus.
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1 Commentaire(s)
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mireille
24/02/2020 à 14 h 01 min
merci. Une remarque : pas terrible de ne pas mentionner les titres en relai s’agissant de T Echoff alors qu’ils sont bien portés au crédit de Roiseland (et de Boe) dans le § . (Voir aussi Wierer / Vitozzi).
certes ça ne compte pas pour le classement, mais il est bien dit que Roiseland non plus n’est pas dans le classement…
patricia
24/02/2020 à 17 h 45 min
Pour Loginov, je serais plus mesuré! Il aurait été « la victime » d’une délégation qui ne peut pas encadrer les russes.
C’est un finlandais proche de Sarah Fussek qui a lancé cette accusation. Sarah Fussek est la responsable anti-dopage intérimaire de l’IBU.
C’est Sarah Fussek qui a prévenu la police sans même mettre au courant ses supérieurs et l’IBU!
Bref, à partir d’une simple histoire d’accréditation, il s’est retrouvé dans une situation incroyable où cela s’est transformé en histoire de dopage dans les médias et qui a vu la police défoncer sa porte à partir de cette fausse accusation.
Les accréditations de complaisance ont toujours existé car l’IBU en délivre très peu pour chaque pays et que donc il a fallu pour que Loginov ait son entraîneur proche de lui, lui trouver une accréditation de complaisance.
En attendant, l’IBU envisage de prendre des sanctions contre Sarah Fussek.
A Nordic Mag, il serait bon que vous suiviez cette affaire et que vous fassiez un article qui rétablisse la vérité et les coulisses de cette affaire.
Dudu-DA
24/02/2020 à 18 h 05 min
En fait, l’IBU a fait l’erreur de permettre à Loginov de revenir apres sa suspension. Il n’aurait jamais du courrir et jamais du gagner.
Rétablir la vérité, c’est simplement dire que c’est un tricheur, qu’il n’a jamais été clair et qu’il ne l’est toujours pas maintenant.
Il a donc ce qu’il mérite: mépris et (auto-)exclusion de ces Mondiaux.
Tant mieux 🙂