Biathlon : Sophie Chauveau prend la parole
Mardi, par un communiqué de presse émanant de la Fédération française de ski (FFS), on apprenait que la biathlète des Aravis Sophie Chauveau ne pourrait pas se produire cette semaine lors de la coupe du monde de Soldier Hollow (Etats-Unis). Un forfait forcé causé par des problèmes administratifs ayant empêché son entrée sur le territoire étasunien et, donc, son embarquement dans le vol charter de l’IBU au départ d’Oslo (Norvège) en direction de Salt Lake City (États-Unis).
Alors que les épreuves américaines débutent ce vendredi soir, Sophie Chauveau a accepté de se confier à Nordic Magazine sur cette semaine difficile. Entretien.
- Pouvez-vous nous raconter pourquoi vous n’avez pas été autorisée à vous rendre aux Etats-Unis pour y disputer la coupe du monde de Soldier Hollow ?
En rentrant des Mondiaux de Nove Mesto, dès le premier jour, on a tous fait une demande d’ESTA [l’autorisation indispensable à obtenir pour voyager aux Etats-Unis, NDLR] pour être sûrs de bien être dans les temps. Le temps est passé, la semaine de coupure puis celle de la coupe du monde d’Oslo-Holmenkollen et, enfin, le jour du départ pour les États-Unis, lundi dernier. Le matin, on apprend via l’IBU que je ne peux pas monter dans l’avion et on ne comprend pas trop pourquoi. Tout de suite, je vais voir l’avancée de mon ESTA, ce que j’avais déjà fait, mais ça ne disait que c’était en cours de traitement. Là, je vois que mon ESTA est refusé et que ma demande est annulée. On est un petit peu pris au dépourvu parce qu’on ne s’attendait pas à cela.
- Depuis quelques jours, on parle de votre voyage à Cuba réalisé à l’été 2022 comme probable cause de vos ennuis pour rejoindre les Etats-Unis : le comprenez-vous d’emblée ?
Le matin, quand on apprend la nouvelle, je tilte assez rapidement. Quand on fait la demande d’ESTA, ils demandent si tu es déjà allé à Cuba, en Irak, en Somalie ou encore en Iran. Comme j’y suis allée et que j’ai, de toute façon, les tampons cubains sur mon passeport, je réponds oui pour Cuba. Quand tu fais cela, ils demandent si tu es sûr de bien vouloir répondre oui, mais je n’avais pas le choix puis ils demandent les raisons. J’ai mis que c’était pour des vacances et tourisme et j’ai mis les dates, c’était trois semaines. Quand je vois que mon ESTA est refusé, je me dis que c’est à cause de cela.
- Que se passe-t-il ensuite ?
Nous appelons tout de suite le siège de la Fédération française de ski à Annecy pour leur parler et voir avec eux ce que nous pouvons faire. L’IBU nous dit que c’est à moi de gérer et qu’elle ne peut rien faire pour moi. C’est la grosse panique à bord parce que nous avons appris cela à 6 heures du matin pour un décollage prévu à 10 heures. Je regarde pour refaire une demande d’ESTA, mais cela ne sert à rien parce que je devrais encore répondre oui pour Cuba. La Fédération se penche sur le sujet, mais nous n’avons pas assez de temps et nous n’avons pas de nouvelles avant de pouvoir embarquer. Nous ne trouvons donc pas de solutions et je rentre à la maison avec l’espoir de pouvoir trouver une solution avec une date limite fixée à mercredi. Au-delà, nous laisserions tomber parce qu’avec les heures d’avion et le décalage horaire, cela ne ferait pas sens.
- Quelles étaient les pistes à ce moment-là pour trouver une porte de sortie positive ?
La Fédération a pris contact avec le ministère des Sports, qui a lui-même pris contact avec l’ambassade américaine de Paris. Tout le monde est à fond pour essayer de trouver une solution. Mardi, l’ambassade m’appelle en me disant que le ministère des Sports venait de les appeler et qu’ils pouvaient prendre l’affaire en charge rapidement. Il fallait juste que je fasse une demande de visa, la seule solution pour entrer aux Etats-Unis si tu es parti à Cuba auparavant parce que l’ESTA ne sera jamais accepté. Ils m’envoient tous les documents à remplir et, alors que j’étais sur les skis, je rentre le plus vite possible pour faire la demande. Je l’envoie très vite à l’ambassade qui me rappelle en plein milieu d’après-midi en me disant que c’est tout bon.
- Pourquoi, donc, n’êtes-vous pas partie aux Etats-Unis ?
Après avoir fait cette demande en ligne, il fallait que je monte à Paris pour finaliser la demande de visa qui serait ensuite traitée et peut-être acceptée. Je leur ai dit que j’avais besoin du visa dès maintenant pour partir le lendemain [le mercredi] ! Eux, ils me proposaient un rendez-vous le mercredi matin sans pouvoir me promettre d’avoir le visa d’ici la fin de journée et, surtout, sans l’assurance qu’il serait accepté. On s’est donc dit que ça ne servait à rien de faire les démarches et on a laissé tomber.
- Comment avez-vous vécu cela ?
C’est une décision que l’on a prise en accord avec la Fédération parce qu’il n’y avait aucun sens à essayer de monter à Paris sans garanties. On a donc laissé tomber pour que je puisse me préparer au mieux pour le Canada sans perdre trop de jus. Cela faisait deux jours que je me prenais la tête avec cela ! Devoir rester à la maison alors que c’est l’avant-dernière semaine, c’est dur et pas facile. Mais c’est comme cela, et il faut faire avec.
- On vous imagine légitimement déçue de voir votre fin de saison tronquer par des formalités administratives…
Carrément ! J’étais sur une bonne lancée, je me sentais vraiment bien au tir, j’avais la forme sur les skis et j’avais coché les deux derniers sprints. Du coup, il ne m’en reste plus qu’un ! A Soldier Hollow, il y avait aussi le relais féminin où je voulais briller avec l’équipe championne du monde. C’est une énorme déception. J’ai appelé Cyril [Burdet] en lui demandant si la remise de tous les globes était bien à Canmore parce que je ne voulais pas louper la remise de celui du relais féminin [avant l’ultime épreuve, les Françaises se battent face à la Norvège et la Suède pour le décrocher, NDLR]. C’est ultra frustrant de ne pas y être. Je trouve ça incompréhensible alors que tout a été fait correctement. On ne pouvait pas faire plus ! Je trouve ça injuste et dure alors que je suis juste partie en vacances.
- Quel est votre programme d’entraînement sur cette fin de semaine, avant de décoller lundi pour le Canada en compagnie de Stéphanie Bouthiaux, le directeur des équipes de France, et Lionel Laurent, le responsable des médias ?
Je profite de cette semaine pour préparer la dernière coupe du monde en refaisant des heures de musculation. Il y a pas mal d’intensités au programme, notamment en même temps que les courses : une ce vendredi et une samedi. J’essaye aussi d’aller m’entraîner en altitude pour m’acclimater à Canmore. Je vais donc beaucoup skier à Beauregard. Je me repose également, histoire d’arriver en forme et d’avoir un petit avantage sur les autres filles !
- Avez-vous eu du mal à vous remotiver après ce début de semaine chahuté ?
Cela n’a pas été difficile. J’étais tellement frustrée de ne pas pouvoir continuer sur ma lancée que cela m’a mis en rage. J’ai envie d’utiliser cela pour arriver à Canmore en ayant envie de tout défoncer. Mercredi, cela a été un peu dur mentalement pendant ma séance de ski. C’est dur à digérer. Je ne suis pas déprimée ou démotivée, mais je rumine. Avec mes résultats, la motivation ne part pas comme ça ! Je veux arriver avec le couteau entre les dents au Canada et prendre ma revanche là-bas.
- Malgré tout, allez-vous regarder les courses du week-end ?
Oui, quand même [rires] ! Il y a des copines à encourager et je vais crier devant ma télévision parce que je veux qu’elles obtiennent de bons résultats et qu’on puisse gagner ces globes du relais et des nations. Je vais leur hurler dessus ! Déjà, je regarde toutes les stories qu’elles mettent sur les réseaux sociaux et je vois que ça a l’air plutôt sympa. J’ai déjà dit à Cyril [Burdet] de me ramener un ou deux souvenirs [rires] !
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1 Commentaire(s)
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Bertaio christian
08/03/2024 à 8 h 03 min
Invraisemblable les USA se protègent a outrance sans réfléchir en sachant pertinemment que la française n’est pas une terroriste .
Sophie de tout ❤️ avec toi et RDV au canada..
Si la France pouvait en faire autant on aurait moins de tarés ds notre pays…..
Coulombeaux
08/03/2024 à 10 h 32 min
esta . procédure simplifiée décision 90 pct automatisée et 10pct revue par des administratifs.
si rejet. la procédure classique de demande de visa a ambassade règle le problème.
l article est honnête car il le dit bien
donc pas victime sauf d elle même par son insouciance de suivi de son visa.
OK elle a autre chose à faire elle doit rester concentré sur la compétition. alors à quoi servent le staff et la fédération ?
Incompris
08/03/2024 à 14 h 52 min
Je ne vais pas accabler Mme Chauveau, meme s’il est préférable de se renseigner sur les conditions d’entrée dans un pays, mais par contre l’encadrement de l’équipe de France, c’est faute professionnelle. L’ESTA est valable 2 ans, on ne fait pas une demande 15 jours avant, il se passe quoi en cas de problème? Bah rien, parce qu’on a pas anticipé. Et comme en plus on ne prend que 6 athlètes alors que l’on a 8 quotas, on se retrouve a 5. Bien joué. Mais ce n’est pas comme si cela faisait des mois/années que Soldier Hollow est prévu au programme.
Sérieusement, c’était trop compliqué de demander en début de saison a la grosse 20aine d’athlètes susceptible d’être sélectionnée et a l’encadrement s’ils avaient séjourné dans l’un des pays de la liste des USA?
Fontenelle
09/03/2024 à 18 h 23 min
C’est exactement ce que je pense les services administratifs de la fédération doivent gérer cela.
Par ailleurs, Mme Chauveau est militaire il me semble, elle peut donc disposer d’un passeport de service différent de son passeport de vacances !
Michel MAGALLON
08/03/2024 à 15 h 02 min
Complètement paranos les ricains et à côté de la plaque.
Mais on a sûrement des leçons à prendre.