Biathlon : les confidences de Justine Braisaz-Bouchet à Nordic Magazine
L’hiver dernier, pour sa première saison de maman biathlète, la Beaufortaine Justine Braisaz-Bouchet, 28 ans, a réalisé des performances remarquables. Faisant preuve d’une toute nouvelle régularité, elle a notamment réalisé le triplé sprint/poursuite/mass-start à Lenzerheide (Suisse), a porté le dossard jaune de leader du général de la coupe du monde et a gagné cinq médailles, dont trois en or (relais, relais, mass-start), lors des Mondiaux de Nove Mesto (République tchèque).
Pour Nordic Magazine, Justine Braisaz-Bouchet se confie au sujet de cet exercice, mais aussi de son état de forme actuel, de ses objectifs de la saison à venir et des défis inhérents à la vie de maman et de sportive de haut niveau. Entretien.
- Avec du recul, sept mois après sa fin, comment jugez-vous votre saison 2023/2024, celle de votre retour à la compétition après un an de coupure pour devenir maman ?
Je pense que c’est une très belle saison. Elle a été efficace et riche. Efficace, parce que les résultats étaient extrêmement bons. J’avais des objectifs et je suis parvenue à les remplir… même au-delà de mes espérances. J’ai notamment pu jouer un général, chose que je n’imaginais pas faire après mon retour à la compétition post-partum. Riche, ensuite, dans le sens où j’ai pu jouer ce général en essayant de gratter des points en étant présente sur chaque course. Cependant, il y a des choses qui ont manqué, que j’ai mal fait. Je pense avoir maintenant un autre recul sur les erreurs que j’ai pu répéter l’hiver dernier.
- Quelles sont ces erreurs ?
Ce qui m’embête le plus, l’hiver, c’est mon sommeil pendant les compétitions. Le sommeil, c’est un des piliers de la récupération du sportif, mais aussi de tout le monde dans la vie normale ! C’est extrêmement important et, avec l’enchaînement des courses, j’avais du mal à cause de cela, notamment. Je suis une personne assez anxieuse dans le sport et c’est vraiment la saison dernière qui m’a fait tilt parce qu’il y avait un gros contraste avec mon année de grossesse où tout roulait et était archi simple avec une approche très relaxe. La reprise de la compétition m’a un peu bousculé. Je travaille notamment avec une préparatrice mentale pour trouver des clés et faire évoluer les choses pour aller chercher mes objectifs.
- Dans la gestion de vos deux vies, celle de maman et de sportive de haut niveau, avez-vous pu tout faire comme vous le vouliez et l’espériez lors de l’hiver ou y’a-t-il eu des moments de frustration ?
[Elle rigole] On avait essayé avec mon mari Julien [Bouchet] d’anticiper et d’imaginer l’hiver sur l’aspect organisationnel et logistique pour voir comment je pouvais passer du temps en famille et voir Côme que ce soit en compétition ou à la maison sur les périodes de récupération. Cela a bien roulé sur la première partie de saison puis la fatigue a eu raison de moi et de la famille. Il y a eu le décalage horaire, Côme qui grandit et dont les besoins changent. Il y a des moments où je me sens clairement débordée. Ce n’est pas que pendant l’hiver, mais aussi en période de préparation. Même si on a une organisation entièrement dévouée à ce double projet, notamment le congé parental que Julien [Bouchet] a pris, il y a plein de moments où nous sommes débordés.
- Allier votre côté maman et championne de biathlon n’est donc pas chose aisée…
C’est clair que ce n’est pas toujours facile de lier mes deux vies. A ce stade-là de ma carrière, j’ai cependant conscience que la récupération et le repos mental et physique ont une incidence monstrueuse. J’essaye de réfléchir comme ça et d’adapter. Je suis d’ailleurs en plein dedans parce que la préparation a été assez lourde ! J’ai réussi à faire tout ce que je voulais et ce n’est pas sans conséquences sur le niveau d’énergie. On est à quelques semaines de la saison et il va falloir que je me repose avant Bessans.
- Justement, comment allez-vous à un mois du début de la coupe du monde ?
J’ai bien travaillé, avec pas mal de volume. La programmation de Cyril [Burdet] est dense, mais j’aime beaucoup ça parce que cela me sort de mon confort. Il y a un moment donné, cependant, où j’essaye de plus écouter la femme et la maman que l’athlète. Toujours dans la discussion avec les coachs, mais je reste à l’écoute. Je me sens actuellement fatiguée, mais rien d’anormal ou d’alarmant parce que cette charge de travail portera ses fruits si je suis intelligente jusqu’au bout de la préparation.
- Quelles sont vos ambitions pour l’hiver qui arrive ?
Très sincèrement, les Mondiaux représentent l’étape importante de la saison, mais on verra ça au moment venu. Je pense surtout au début d’hiver et à l’ensemble de la saison, à pouvoir gérer au niveau physique et à la logistique avec la famille. Pour être très concrète, un de mes rêves est d’atteindre le gros globe en fin de saison, c’est le Graal du biathlon. Il me reste plusieurs saisons pour le faire, mais c’est déjà un objectif cet hiver. Pour cela, il faudra que je performe à mon niveau à toutes les étapes. On commencera à vraiment penser à cela en fin de saison quand on comptera les points. Après les Mondiaux, donc.
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