En deux ans, Stina Nilsson est passée de fondeuse à biathlète sélectionnée pour les Jeux olympiques
L’annonce choc
C’est le dimanche 22 mars 2020 que la nouvelle est tombée, via un communiqué de presse et un post Instagram : la fondeuse Stina Nilsson, 26 ans et championne olympique en titre du sprint, change de sport et passe au biathlon. Une annonce choc suivie, deux semaines plus tard, privilège de championne, d’une intégration directe dans les groupes nationaux suédois.
« Je sais que cela peut sembler irréfléchi, expliquait-elle alors à Nordic Magazine. Tout paraît avoir été précipité, mais la vérité est que j’ai toujours été intéressée par le biathlon. J’ai toujours su, au fond de moi, que je changerais de sport pour terminer ma carrière comme biathlète. »
« Elle a atteint un niveau incroyable en ski de fond et a maintenant besoin d’une nouvelle motivation, analysait à l’époque Johannes Thingnes Boe, enthousiaste à l’idée de voir Stina Nilsson devenir une biathlète. C’est un bon point de départ et ce sera incroyablement excitant à suivre. Tout le monde sait de quoi elle est capable sur la piste avec ses bons finish. Puisqu’elle était une spécialiste du sprint, elle va retrouver un effort similaire en biathlon. » Mais le chemin pour y parvenir a été semé d’embûches.
Les premiers entraînements
Avant même d’être prise en charge par la fédération et d’officialiser la nouvelle, Stina Nilsson s’est entraînée avec son chasseur de papa, tirant pas moins de 3 000 cartouches. « Le tout sans connaissance et avec une carabine pas du tout réglée », révèle à Nordic Magazine Jean-Marc Chabloz, l’homme qui a appris à la Suédoise le tir de biathlon.
Si bien que le harnais de l’arme de la Scandinave était monté à l’envers, ce qui la faisait terriblement souffrir : « Normalement, c’est quasiment impossible de porter le fusil de cette manière, mais elle l’a fait quand même, continue le Suisse. Elle me disait que cela lui faisait mal, mais que c’était normal parce qu’elle s’était mis dans la tête que devenir biathlète la ferait souffrir. »
Preuve du caractère que la jeune femme, travailleuse jusqu’à l’excès. « Le premier été, j’ai été obligé de la ralentir tellement elle voulait travailler », se rappelle l’Helvète. Après des semaines d’effort, Stina Nilsson signait ses grands débuts à Idre Fjäll (Suède) le 14 novembre 2020. Onzième avec un 8/10, elle enflammait déjà les gazettes avant de connaître un individuel compliqué à 10/20 le lendemain. « Pour le moment, j’apprends et, peu importe comment cela se passe, je ne regretterai jamais mon choix », estimait-elle alors.
Des débuts compliqués… avant la découverte de la coupe du monde
C’est en IBU Cup, début 2021, soit un an avant les Jeux olympiques de Pékin 2022, que Stina Nilsson découvrait le niveau international. Quatre-vingt-dix-neuvième du premier sprint, soixante-neuvième du deuxième sprint, quarante-huitième de l’individuel court puis vingt-deuxième du troisième sprint allemand, la Suédoise a vite appris après des débuts compliqués.
Sélectionnée pour les championnats d’Europe de Duszniki Zdroj (Pologne), où elle ne brillait pas, Stina Nilsson réalisait ensuite de belles performances à Brezno-Osrblie (Slovaquie) quelques semaines plus tard : huitième de la poursuite pour son premier top 10 puis deuxième du relais pour sa première dans l’exercice. C’est après cela que la Scandinave décrochait son ticket pour la coupe du monde d’Östersund (Suède).
Sur le pas de tir où elle a appris son nouveau sport, Stina Nilsson réalisait des débuts fracassants en signant deux top 30 sur le sprint et la poursuite, malgré un vent très difficile à gérer.
Un été idéal
Des performances qui ont poussé le staff suédois à intégrer Stina Nilsson au groupe élite pour la préparation de la saison olympique. « Elle s’est vraiment bien passée, résumait Jean-Marc Chabloz à l’automne dans les colonnes de Nordic Magazine. On sent qu’ils sont vraiment dans le coup et même, pour certains, encore mieux que l’année passée comme Stina Nilsson. Elle a encore pris un niveau supplémentaire en tir. »
Et cela s’est vu fin août quand elle devenue championne de Suède d’été du sprint, à 8/10, devant les sœurs Oeberg, stars de la coupe du monde. « Je suis tellement contente ! Faire un sans faute au tir debout était tellement amusant », soufflait la Suédoise, sur un nuage, à la SVT Sport. Après le stage de Font-Romeu (Pyrénées-Orientales), Stina Nilsson était sélectionnée pour la coupe du monde d’Östersund, où la saison s’ouvrait à la fin du mois de novembre dernier.
Un premier podium en coupe du monde
Pourtant, malgré la confiance du staff, les choses ont pris une mauvaise tournure après deux premières courses très difficiles. Elle est donc redescendue en IBU Cup reprendre de la confiance à Sjusjøen (Norvège). « Sur ces courses, elle n’a pas fait des résultats tops, mais elle était de retour en ski. On l’a donc reprise parce qu’on a confiance en elle », explique Jean-Marc Chabloz. C’est à partir de ce moment-là que Stina Nilsson a commencé engrangé de la confiance.
Seizième du sprint d’Hochfilzen (Autriche) puis dixième de la poursuite tyrolienne, seizième de la mass-start du Grand-Bornand (Haute-Savoie) ou encore quatorzième du sprint d’Oberhof (Allemagne), elle décrochait son ticket pour les Jeux olympiques moins de deux ans après avoir changé de sport.
Sur Ruhpolding (Allemagne), elle profitait d’une impasse des sœurs Oeberg pour participer à son premier relais en coupe du monde où elle signait sa meilleur course de biathlète avec une seule pioche. Au bout ? Une deuxième place et un premier podium dans le grand monde. « J’ai été ému pour son premier podium, estime Chabloz, heureux du chemin parcouru et à encore parcourir. Je me réjouis de continuer à bosser avec elle pour l’amener là où elle veut être. Elle a vraiment quelque chose de spécial alors qu’elle a une énorme pression médiatique. Je pense qu’il faut encore deux bonnes saisons d’entraînement de tir pour cela ! »
La verra-t-on à l’œuvre en compétition lors des Jeux olympiques de Pékin 2022 ? Rien n’est moins sûr, mais le chemin parcouru par la biathlète de Mora (Suède) en moins de vingt-quatre mois est gigantesque.
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