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Biathlon : la coupe du monde féminine 2023/2024 vue par Delphyne Burlet
Tout au long de l’hiver, un biathlète tricolore à la retraite débriefera pour Nordic Magazine les différentes compétitions de la saison. C’est Delphyne Burlet, quadruple médaillée mondiale et olympique, qui se lance pour tirer le bilan de la coupe du monde féminine 2023/2024.
La consécration pour Lisa Vittozzi, sacrée au général : « Quand on pense au chemin par lequel elle est passée… »
« A un moment, il y a un déclic qui se produit. Une fois qu’il est fait, on rentre dans une autre dimension. Avant d’avoir ce déclic, par contre, il faut continuer de garder la foi et de croire en ses rêves. Lisa [Vittozzi], c’est ce qu’elle a fait, elle est parvenue de cette manière à aller chercher le gros globe ! Quand on pense au chemin par lequel elle est passée, elle a vraiment su se remettre en question et, surtout, à reprendre sa carrière en main. Ce que j’aime beaucoup chez elle, c’est son caractère calme et posé, sa retenue. C’est une dimension de son caractère qui doit peser sur ses adversaires. »
L’incroyable saison de Lou Jeanmonnot : « Elle est lancée »
« Elle termine deuxième du classement général en ratant deux courses à cause d’une maladie, sinon… [elle ne termine pas sa phrase] Maintenant, on sait qu’elle a les épaules ! L’an dernier, elle avait montré des choses bien et, là, elle a montré qu’elle avait les épaules pour devenir une grande. Elle est allée chercher des médailles, un globe et des victoires. Elle est lancée ! Elle est fraîche, a du talent et a un bon caractère en emmenant les autres avec elle. A la maison, quand je regarde les courses avec ma famille, on aime bien la regarder skier. Elle skie vraiment bien, avec un beau style, elle est légère. »
Ingrid Landmark Tandrevold a craqué : « La meilleure chose pour elle, actuellement, c’est de prendre des vacances, de couper puis de tout remettre à plat »
« Là où elle en est de son évolution, ce sont les montagnes russes ! Elle a pris des gros coups pendant les championnats du monde avec, presque à chaque fois, trois balles perdues au debout. C’est le signe qu’il y a quelque chose qui se dérègle en profondeur. On peut retrouver certaines choses derrière, comme elle l’a fait à Oslo-Holmenkollen après s’être reposée et avoir retrouvé sa famille, mais ça ne dure pas. Quoi qu’elle fasse, elle reste dans le déséquilibre. La meilleure chose pour elle, actuellement, c’est de prendre des vacances, de couper puis de tout remettre à plat pour se remettre en question. Un peu comme ce que Lisa [Vittozzi] a fait il y a quelques années, pour repartir sur des bonnes bases. »
« Malgré tout, elle a fait preuve d’une grosse force de caractère en ne sombrant pas mentalement. Elle gardait le sourire tout le temps et, finalement, elle fait une très belle saison. Pour avoir le maillot jusqu’à l’avant-dernier jour, c’est qu’elle a été très régulière dans le top 10. »
L’équipe de France est la meilleure du monde : « Ce succès couvait depuis plusieurs années »
« La France s’est vraiment imposée en tant que nation majeure du biathlon. Les filles nous ont vraiment régalés en imposant leur talent sur les podiums, plutôt à plusieurs qu’une seule ! Ce succès couvait depuis plusieurs années. On avait des filles qui marchaient bien, peut-être pas toutes en même temps, mais c’était en attente. Toutes les filles qui montaient de l’IBU Cup pour venir sur la coupe du monde montraient des choses. On sait qu’il faut un petit peu de travail et de temps pour faire éclore les talents, mais, là, ça éclot très vite. C’est en cela que les deux entraîneurs Cyril Burdet et Jean-Paul Giachino sont très forts : ils ont appris à connaître leurs athlètes et les ont laissées dans leurs préférences sans chercher à leur imposer des choses contre-nature. A mon avis, c’est pour cela qu’ils ont tant de succès et que ça marche aussi bien. »
Pas de globes, mais des médailles mondiales pour Julia Simon : « Je me retrouve un peu en elle »
« On se dit que c’est dommage qu’elle a raté les deux petits globes en fin de saison, mais elle a eu des médailles aux Mondiaux en février. C’était elle la reine de la compétition ! Ce que j’apprécie beaucoup chez elle, c’est sa capacité de remise en question, un peu comme Lisa [Vittozzi] il y a deux, trois ans avec son tir. Ce n’est pas le tout de savoir pourquoi on rate les balles, mais plutôt pourquoi on les met. C’est cela le plus important, parce qu’on peut reproduire ensuite. Si on sait comment on les met, on sait pourquoi on les perd. Julia [Simon] a fait ce travail et sait ce qu’il faut faire pour y arriver. Elle est très forte mentalement. »
« Je me retrouve un peu en elle, parce que j’ai eu un parcours original en disant deux, trois fois merde (sic) à l’équipe de France [rires] ! Derrière, il a fallu assumer, je l’ai fait, mais je n’étais pas facile. Je ne dis pas que Julia [Simon] est comme cela, mais elle a dû et su relever la tête et y aller. Son caractère bien trempé est clairement un point fort. »
Enfin un titre mondial du relais pour les Bleues : « Aligner les étoiles n’est pas si facile »
« En 1993, à Borovets, on avait gagné le titre mondial par équipes lors d’une course épique, qu’on gagne avec 2 ou 3 secondes d’avance alors qu’on en avait 52 après le dernier tir [avec Nathalie Beausire, Anne Briand et Corinne Niogret sur le format de la patrouille devant la Biélorussie et la Pologne, NDLR], puis on avait eu des médailles en relais… Mais c’est vrai que la France n’avait jamais gagné le titre en relais féminin ! C’est fou parce que ça ne date pas d’aujourd’hui qu’on a une super équipe. Il y a déjà eu des moments où la France était forte, et on n’a jamais réussi. Comme quoi, aligner les étoiles n’est pas si facile. »
Un hiver post maternité plus que réussi pour Justine Braisaz-Bouchet : « Il faut arrêter de se dire que c’est exceptionnel »
« Elle nous a laissés avec un titre olympique et un petit globe de la mass-start, et elle revient en gagnant la médaille d’or mondiale de la mass-start. C’est son truc ! C’est fou comme elle peut avoir l’œil du tigre quand elle est dedans et que ça rentre tout. Elle a besoin d’être dans sa bulle pour faire son tir, et sa course, sans s’occuper des autres. »
« Le fait qu’elle revienne à son meilleur niveau après une maternité ne doit plus nous étonner. Je l’ai fait en 1995 pour la naissance de ma fille et j’étais revenue en 1996. Après, Marie Dorin-Habert et Anaïs Chevalier-Bouchet l’ont fait, comme des étrangères. Il faut arrêter de se dire que c’est exceptionnel. Ce sont des choses possibles. Les bénéfices qu’on en retire, c’est le fait qu’on s’accomplisse dans sa vie de femme en découvrant la maternité. Cela participe donc à l’épanouissement dans sa vie sportive. On ne perd pas de qualités physiques et on y gagne à tous les niveaux, même si, derrière, il faut de l’organisation pour garder bébé à la maison ! »
Le progression de Lena Haecki-Gross : « Elle a gagné beaucoup de temps sur la piste »
« Elle a dû changer des choses dans sa programmation d’entraînement, parce que son niveau de ski est monté. Cela a d’ailleurs dû surprendre ses adversaires en début de saison. L’année dernière, elle tirait bien, mais il lui manquait toujours un petit truc pour monter sur le podium. D’un coup, là, elle a gagné beaucoup de temps sur la piste. Conjugué aux bons tirs, cela fait des podiums et ses premières victoires, ce qui fait qu’elle termine l’hiver sixième mondiale ! »
La relève tricolore au rendez-vous : « Il y a une super énergie positive qui emmène tout le monde vers le haut »
« Gilonne Guigonnat, c’est incroyable ! Elle tire super bien. Pour les plus jeunes, il faut que le tir soit là s’ils veulent exister face aux grandes stars. Bien tirer et être posé sur les tapis, avec des bases sûres, c’est le minimum requis. Ensuite, on construit des choses autour. Chez les filles, les leaders montrent que tout est possible et il y a une super énergie positive qui emmène tout le monde vers le haut. C’est une spirale positive qui est chouette ! Je sais ce que c’est qu’une équipe féminine, ce n’est pas toujours facile. Mais si chacun y met du sien, ça va et ça se passe bien. »
Anamarija Lampic continue d’apprendre : « Elle a gagné cet hiver en régularité »
« J’aimerais bien qu’elle puisse un jour monter sur le podium ! La conversion du ski de fond vers le biathlon est de plus en plus difficile. Aujourd’hui, on a affaire à des filles qui tirent depuis l’âge de 13 ans, alors que, à mon époque, à part les Russes et les Allemandes, on débutait le tir à 18 ans. Face à des filles qui ont 5 ou 7 ans de tir de plus qu’elle, c’est difficile, mais elle a des qualités. Il faut qu’elle travaille bien au debout et, une fois qu’elle aura trouvé le truc, le podium arrivera. En attendant, elle a gagné cet hiver en régularité avec une dix-septième place du général final ! »
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