Au sommer du débrief de Frédéric Jean
Biathlon : la coupe du monde d’Hochfilzen vue par Frédéric Jean
Tout au long de l’hiver, un biathlète tricolore à la retraite débriefera pour Nordic Magazine les différentes compétitions de la saison. C’est Frédéric Jean, ancien biathlète et entraîneur des Bleues, qui se lance pour revenir sur la coupe du monde d’Hochfilzen (Autriche).
La performance de la semaine : la poursuite de Lou Jeanmonnot
« J’ai vraiment été fasciné par sa poursuite, son aisance derrière la carabine et sa gestion sur les skis. Pour moi, quand elle se présente sur le pas de tir, j’ai l’impression qu’elle maîtrise tout de manière naturelle. Ce n’est pas forcé, c’est propre. Son relais va à l’encontre de ça, mais cela montre aussi qu’elle est humaine et ça arrive de passer à côté. Cette poursuite, c’était une course maîtrisée de bout en bout. En plus, elle reste simple, les pieds sur terre. C’est Lou ! »
« Dans sa manière de débriefer, elle ne va pas dire qu’elle vise le général, mais elle fait plein d’allusions. Quand tu lis entre les lignes, tu comprends qu’elle vise le général, mais elle ne l’annonce pas directement. Elle veut, pour le moment, être régulière et c’est cela qui lui permettra de viser un général. C’est une athlète qui va donner du fil à retordre à Franziska Preuss et c’est certain qu’elle visera le gros globe en fin de saison. »
Le bon point de la semaine : les Bleus de Simon Fourcade
« Je suis hyper content, d’abord parce que c’est un pote, pour Simon [Fourcade] ! C’est un acharné de travail qui est proche de ses athlètes. Voir que son travail se met en place et que ça fonctionne chez les garçons, je suis hyper content. On a retrouvé l’équipe de France masculine au plus haut niveau ! Elle met de nouveau dans le mal les Norvégiens et le gratin mondial. Ils sont là d’entrée de jeu et confirment sur quasiment chaque course. Chez les Norvégiens, ça doit commencer à se questionner. »
La revenante de la semaine : Franziska Preuss
« C’est fort ce qu’elle fait ! Sur les trois dernières saisons, il lui arrive des merdes (sic) à chaque fois. Elle rate des étapes de coupe du monde, elle revient au niveau. Elle rate de nouveau des courses et revient de nouveau ! Là, elle est solide et prend la tête du général. Les prestations qu’elle signe, c’est du très haut niveau, de la haute voltige. C’est celle qui se démarque au niveau de la régularité et des performances. »
Le retour sur le podium de la semaine : Fabien Claude
« Le revoir monter sur la boîte ça fait plaisir ! C’est un athlète qui courrait après ça depuis quatre ans. C’est dans son fonctionnement. Il n’a jamais rien lâché, c’est un gros bosseur. Il fait une sacrée course, ça fait vraiment plaisir pour lui et ça montre que la densité des garçons leur permet de briller au plus haut niveau. Cela fait du bien à l’équipe et montre les progrès de l’équipe de France ! »
Le fait marquant de la semaine : le podium de Sophie Chauveau qui lui permet d’aller au Grand-Bornand
« Elle a montré qu’elle pouvait être solide mentalement. Elle s’est présentée à Hochfilzen en sachant qu’elle n’allait pas au Grand-Bornand. Elle savait que pour être de la partie à la maison, il fallait signer une performance majuscule. Aller claquer le 10/10 de cette manière, en construisant sa course avec un petit dossard. Mentalement, dans la situation dans laquelle elle était, c’est vraiment fort de sa part ! Le sprint qu’elle sort, c’est dément de le faire dans cette situation. Il faut maintenant qu’elle capitalise sur cette course et qu’elle prenne conscience qu’elle est capable de le faire. »
« Je pense qu’il lui manque encore un petit truc pour jouer dans la régularité, mais c’est une athlète qui est capable de sortir une course comme ça par étape ! Elle est capable de le faire sans sortir quelque chose d’exceptionnel. Bien évidemment que cette deuxième place lui donne son ticket pour aller courir au Grand-Bornand devant sa famille ! »
Les encouragements de la semaine : Emilien Jacquelin
« Durant la préparation estivale, il a réalisé de nombreux et gros progrès. S’il y a quelque chose que j’ai retenu de lui cette semaine, c’est sa présence derrière la carabine ! Quand il arrive sur le tapis, il est concentré et sait ce qu’il a à faire. Il décortique son tir et n’est pas tête en l’air à bouffer de l’énergie inutilement. Il se reprend quand il est en difficulté. Il construit son tir. C’est un immense changement pour lui ! Il s’est métamorphosé au niveau de l’état d’esprit, et ça paye. »
« Il n’est pas reparti dans ses travers sauf quand il tombe sur la poursuite. Pendant deux, trois secondes, il baisse la tête. Pris dans l’adrénaline, il est au taquet, il n’a pas eu la présence d’esprit de repartir directement. On ne lui enlèvera jamais son côté showman, mais il ne faut pas qu’il franchisse la limite et qu’il reste respectueux, et lui-même. »
Les déceptions de la semaine : Julia Simon et Justine Braisaz-Bouchet
« Pour Julia [Simon], il en manque encore un peu par rapport à ce qu’elle nous a montré ces dernières saisons. Il en manque physiquement, elle est peut-être gênée par des petits pépins, ce qui la perturbe au tir debout. Malgré tout, elle est présente, neuvième au général et à la bagarre. C’est encore brouillon, mais il ne manque pas grand-chose. »
« Justine [Braisaz-Bouchet], en revanche, c’est un peu plus alarmant. Tu sens qu’elle est sur la retenue au tir. Physiquement, elle va vite et est pas loin de son meilleur niveau, mais elle est bloquée sur les tapis. Elle ne lâche pas ses balles, est sur la retenue, n’ose pas y aller. Est-ce qu’elle se fait une montagne du tire ? En tout cas, tu sens que ça manque de relâchement et que le tir est une sanction pour elle alors que ça doit être un amusement, un jeu. Cela va lui faire du bien de rentrer à la maison et de recharger les batteries en famille avant Le Grand-Bornand. »
La première de la semaine : Eric Perrot
« Il fait une grosse semaine commencée avec son premier dossard jaune. Je suis persuadé que ce ne sera pas le dernier ! Il a bien appréhendé cette journée en jaune, il s’est battu comme un beau diable et fait quand même une belle performance. Sur la poursuite, il montre qu’il est là, il n’a pas explosé en plein vol. Sur le relais, enfin, il n’a pas à rougir face à Johannes [Thingnes Boe]. Sa semaine est à l’image de son attitude. »
La défaillance de la semaine : Elvira Oeberg
« Elle a montré qu’elle était capable d’avoir des défaillances. Malgré tout, elle continue d’aller vite sur les skis et elle a remis les pendules à l’heure en faisant une belle poursuite. Je ne mets pas du tout Elvira [Oeberg] sur la touche pour le classement général. Elle a souvent brillé au Grand-Bornand donc je pense qu’il va vraiment falloir compter sur elle. »
Le patron de la semaine : Johannes Thingnes Boe
« Il est hors normes ! A la fin de Kontiolahti, il avait annoncé qu’il arriverait en forme à Hochfilzen. Les Norvégiens se sont entraînés en altitude, ils savent faire et il a montré, lui, que c’était toujours le patron. Ce n’est pas donné à tout le monde d’aller chercher le doublé, tant physiquement que mentalement. Lui a été capable de le faire ! Il a prouvé qu’il allait encore falloir copter sur lui pour aller chercher le gros globe. Là où c’est fort, c’est quand tu vois son état physique et mental d’il y a un mois à Sjusjøen. En l’espace de trois semaines, il passe d’un top 15 norvégien à numéro 1 mondial ! C’est physiquement hors-normes. »
La confirmation de la semaine : le relais masculin français
« Il y a deux semaines, ils sont allés cherché ce relais avec seulement deux pioches au tir. Sur le coup, on aurait pu se dire qu’ils gagnent principalement grâce à ça. A Hochfilzen, en gagnant de nouveau, ils confirment. Ils ont claqué dix pioches, montent dans les tours physiquement et prouvent qu’il n’y a pas beaucoup de pays qui peuvent aligner quatre mecs solides au départ. La France en est et elle a retrouvé sa dream team ! »
La glisse de la semaine : les techniciens tricolores
« En début de saison, le staff technique a fait des choix et des tests pour essayer de progresser dans les neiges froides. Quand on fait le point de cette semaine autrichien et qu’on voit tout le panel de conditions de neiges, on s’aperçoit que les techniciens ont su être bons partout. Le matériel a énormément aidé les biathlètes et je souligne l’énorme travail réalisé par les techniciens. Cela a le mérite d’être souligné ! »
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