Biathlon : Lou Jeanmonnot vs Franziska Preuss, un duel légendaire pour le gros globe
En fin de semaine dernière, l’Allemande Franziska Preuss et la Doubiste Lou Jeanmonnot se sont livrées une intense bataille lors des finales de la coupe du monde de biathlon d’Oslo-Holmenkollen (Norvège). Un duel épique avec une récompense prestigieuse à la clé : le gros globe de cristal de vainqueure du classement général.
Lors de la dernière course de l’hiver, la mass-start, les deux prétendantes se livraient alors un ultime combat d’une rare intensité. Combat avorté à 500 mètres de la ligne par une chute de Lou Jeanmonnot. Pour Nordic Magazine, Sandrine Bailly, lauréate du gros globe en 2005, décrypte ce duel déjà entré dans l’histoire du biathlon.
Une bagarre fantastique entre Lou Jeanmonnot et Franziska Preuss jusqu’aux derniers hectomètres de l’hiver
« Elles ont proposé du biathlon de tellement haut niveau que chaque scénario envisageable était cruel pour l’une ou pour l’autre. Le scénario qui s’est finalement déroulé est donc cruel et a un goût d’inachevé, mais on se dit que si Lou [Jeanmonnot] avait gagné, c’était aussi cruel pour [Franziska] Preuss. »

« Si on regarde bien tout ce qu’elle a proposé cette année, c’est quand même une sacrée performance de régularité. Elle a beaucoup porté le jaune, a fait dix-sept top 6 et a su confirmer aux Mondiaux, se relevant de situations hyper difficiles avec des tirs ratés en début de course. Surtout, elle arrive à plus de 30 ans avec une carrière derrière elle en dents de scie et pas mal d’échecs… Cela aurait donc été aussi cruel pour elle si ça avait basculé dans l’autre sens. »

« C’était hyper excitant, mais il y avait, aussi, la peur de savoir ce qui allait se produire ! L’une comme l’autre était tout autant méritante. C’était presque dur à vivre. Si on enlève le fait que Lou [Jeanmonnot] soit Française et que notre cœur penchait pour elle, je le répète, mais cela aurait été cruel quoi qu’il arrive… En plus de cela, ça se termine de la pire des manières. Après, c’était du biathlon exceptionnel ! Rarement, il y a eu du biathlon comme ça pour un aussi gros enjeu, c’était magique, du haut niveau. Je pense que l’IBU peut être content d’avoir ce genre de spectacle pour le dénouement de sa saison ! »
Les deux rivales ressortent ensemble du dernier tir pour se jouer le globe sur les skis
« Tu hallucines parce qu’aucune des deux ne flanche ! C’est hyper dur d’envisager la suite parce qu’elles ont chacune leurs qualités. On se dit que Lou [Jeanmonnot], normalement, ça va mieux sur les skis, mais c’était un peu moins bon sur cette course… [Franziska] Preuss avait l’air mieux et, tactiquement, elle est surprenante. C’est une fille qui s’est révélée à Ruhpolding, dans sa stratégie de course, en posant des attaques ! Elle avait aussi l’avantage d’avoir plus d’expérience. Lou [Jeanmonnot], c’est déjà un diamant très bien taillé. »

Le moment fatidique de la chute de Lou Jeanmonnot
« Quand [Franziska] Preuss a commencé à déboîter, j’ai eu un moment où je me suis dit « Oh non, pas la chute ! » parce que j’ai tout de suite pensé à une chute, et elle est arrivée… Je me suis revue sur le plateau de Chalet Club [sur Eurosport, où elle officie comme consultante, NDLR] revenant sur l’accrochage entre Hanna Oeberg et Ingrid Landmark Tandrevold après le relais d’Antholz. On disait que c’était un fait de course, mais j’avais dit que ce genre d’épisode pouvait aussi se passer aux Jeux olympiques ou lors d’une course à fort enjeu… »

« Je me suis dit qu’à chaque fois que quelqu’un déboîte, il fait tomber l’autre… On comprend qu’il faut bien déboîter et doubler, mais comment faire pour qu’il n’y ait pas de chute ? Là, en l’occurrence, les images et les paroles de Lou [Jeanmonnot] ont mis tout le monde d’accord. Elle a été d’un recul admirable. Elle s’est refait la scène et a expliqué avoir cru pouvoir passer à la corde. Après ça, naturellement, je pense qu’elle va bosser sur son côté lionne qui défend sa position. Il ne fallait pas serrer ses pas et prendre encore plus de place. Mais avec des si… Elle a cru que ça allait passer et [Franziska] Preuss a pris l’opportunité de passer ! »

« On peut refaire 10 000 fois la scène, à un moment donné, ce sont ses paroles qui valent le plus. Peut-être que [Franziska] Preuss serait passée après le virage, mais il y avait encore de la descente avant le passage derrière le pas de tir. Les deux sont fortes au sprint, donc on ne saura jamais ! Cela laisse place à l’imaginaire et elles nous ont offert un moment de sport unique. Pour Lou [Jeanmonnot], il faut aller de l’avant et je crois que ce genre de situation ne lui arrivera plus jamais ! »
Un gros globe perdu sur la dernière, comme elle en 2008 face à Magdalena Neuner
« Moi, ce n’était pas du tout la même configuration. C’est incomparable ! Ce globe, je l’avais déjà un peu perdu sur le sprint. Je n’avais pas la bonne approche de la course à cause des conditions, ça brassait énormément dans des neiges de printemps. Je n’étais pas rassurée parce que je n’étais pas forte là-dedans. Je me disais que Magdalena Neuner, elle, allait tellement vite là-dedans ! Je n’étais pas dans le bon état d’esprit. Il s’est donc passé ce qu’il devait se passer et j’ai perdu. »

« C’était douloureux et je me suis rapidement dit qu’elle était meilleure. Là, Lou [Jeanmonnot] ne peut pas se dire que [Franziska] Preuss était meilleure. A mon sens, elles étaient du même niveau. Ce qu’il va falloir qu’elle retienne, c’est qu’elle a réussi à être régulière sur les skis en terminant super en forme la saison et en négociant des tirs en confrontation avec des enjeux immenses. Cela lui servira l’année prochaine aux Jeux ! On retrouvera Lou [Jeanmonnot] dans le futur quoi qu’il arrive. »
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1 Commentaire(s)
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Francis Drake
25/03/2025 à 11 h 48 min
Elle aura une faim de LOU l’année prochaine !
Si elle parvient à faire mal en décembre, ce sera déjà presque fin du game car il y aura des impasses en janvier pour certaines comme avant chaque JO..
Vincent
25/03/2025 à 20 h 17 min
Je suis plutôt de l’avis d’Alexis Boeuf sur ces dépassements où je trouve que celle qui dépasse ne prends pas assez ces distances avec celle qui est dépassée.
Je pense que l’IBU devrait statuer et créer une règle pour ce genre de situation.
Pour ma part, et je pense pour beaucoup de monde, on ne peut pas se satisfaire d’un tel finish, ça ne satisfait personne sur le coup, ni la gagnante ni la perdante.
Ca ne laisse que des frustrations, comme la situation entre Ingrid et Hanna je pense qu’aucune des deux n’était vraiment satisfaite en passant la ligne d’arrivée.
Sinon je suis d’accord que ça aurait été dur Preuss qui a eu beaucoup de soucis dans sa carrière et qui n’aura peut être pas d’autres occasions de gagner le gros globe.
Mais ce ne sera pas si simple pour Lou car Julia sera peut être plus en forme l’année prochaine et il y a des jeunes qui poussent comme Océane qui risque d’être encore plus performante.