BIATHLON – Depuis Bessans (Savoie) où il est en stage, Emilien Jacquelin évoque la vie du groupe France sans Martin Fourcade.
Après la préparation, les objectifs et la forme, Emilien Jacquelin évoque, dans cette deuxième partie d’entretien, le fonctionnement de l’équipe de France sans Martin Fourcade. Une page qu’il a dû personnellement refermer alors qu’il s’entraînait quotidiennement avec le Catalan. Il revient aussi sur les déclarations de Siegfried Mazet à son égard ainsi que sur les ajustements que Johannes Thingnes Boe a effectué sur sa carabine.
- Comment se passe la vie de l’équipe de France sans Martin Fourcade ? Votre sentiment sur cette question a-t-il évolué depuis l’annonce de sa retraite ?
J’y réponds effectivement avec moins d’émotion et de nostalgie qu’à la reprise en mai ou qu’en juillet où je ressentais un vrai manque. On peut presque parler de deuil. Le fait d’avoir pu côtoyer Martin tous les jours à l’entraînement pour m’aider à me développer et, d’un coup, me retrouver tout seul a été quelque chose de nouveau. La vie sans Martin a été plus compliquée quand j’étais sur Villard-de-Lans mais, en groupe, ça ne change pas beaucoup de choses, l’envie de progresser collectivement est toujours là. C’était plus un manque personnel mais il m’a permis de me développer moi-même et d’être encore plus moteur de mon projet. Cela me sera assurément bénéfique dans le futur. Je peux dire que j’ai tourné la page Martin, il faut savoir continuer et avancer.
- Le leadership de Martin Fourcade a-t-il été repris à l’intérieur du groupe ?
On sait que Quentin avait à cœur de reprendre ce flambeau de leader du groupe. Cela faisait plusieurs années qu’il côtoyait le niveau de Martin et je pense que ça lui fait bien d’assumer ce rôle, il s’y sent bien. Sincèrement, c’est le plus fort du groupe. Globalement, personne n’a changé et, encore une fois, l’ambiance est très bonne.
- L’hiver dernier, de la première à la dernière course, la densité d’équipe de France était impressionnante, notamment lors de l’historique individuel d’Östersund : l’avez-vous déjà ressenti pendant la préparation ?
Tout le monde a les armes pour faire une saison aussi bonne, voire meilleure que l’an dernier. On se tire tous vers le haut. Je ne vois pas de limites à notre progression d’autant qu’on reste un groupe jeune.
« Quentin est très fort et à les capacités pour venir titiller Johannes Boe »
- Il y a quelques semaines, Siegfried Mazet disait dans les médias norvégiens que vous seriez très dangereux pour Johannes Thingnes Boe l’hiver prochain : comment avez-vous réagi à cette sortie ?
Ça ne m’inspire pas grand chose parce que le biathlon est un sport où il faut rester très modeste. Bien sûr, cet éloge faisait plaisir venant de Siegfried, mais je reste concentré sur ce que j’ai à faire. Après, ce n’est parce qu’il dit ça que je vais performer toute la saison. Est-ce que c’est un coup de Siegfried pour semer un peu la zizanie au sein du groupe alors que Quentin à annoncé qu’il visait le globe ? Je ne sais pas mais je n’y ai pas prêté plus d’attention que cela.
- Y’a-t-il des éléments faisant penser que Johannes Thingnes Boe ne sera plus le numéro un mondial à la fin de la saison ?
Comme on le disait, Quentin est très fort et à les capacités pour venir titiller Johannes. De ce que j’ai vu sur l’ensemble de la préparation, il gagne en maturité et en régularité. Après, on sait que Johannes, en bon Norvégien, adore bluffer. J’ai vu dernièrement qu’il a tiré à 1/5 sur un couché [lors d’une course-test disputée à Beitostølen, ndlr.] mais ce n’est pas ça qui doit nous faire penser qu’il ne sera pas en forme dès le début de saison. Tant qu’on est pas sur la coupe du monde, personne n’est encore à 100%. Peut importe la préparation, ce sont les seules courses qui comptent et qui montrent le niveau de chacun. Par contre, je le trouve à peine moins affûté que les saisons précédentes : sa vie de père de famille a-t-elle modifié sa préparation ?
- Justement, Johannes Thingnes Boe a raccourci sa carabine ce trois centimètres : c’est important comme changement ?
Personnellement, je trouve que c’est très risqué. On a tous une longueur différente de carabine et changer de trois centimètres, c’est vraiment énorme : souvent, on ne touche pas à cette longueur tout au long d’un carrière ! J’ai lu que Siegfried disait que ça pouvais l’aider dans des conditions venteuses, mais je ne suis pas sûr… Johannes est quelqu’un de très instinctif et je pense qu’il fait cela plus pour se challenger que pour lui donner un réel plus au tir. Quand il s’entraîne, sûrement que les balles rentrent bien mais, lors des courses, à 180 pulsations, notre corps et notre cerveau font les choses instinctivement, d’où peut-être son 1/5 de l’autre jour.
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Photos : Nordic Focus.