Biathlon : le phénomène Fabien Claude
Si Anaïs Chevalier a apporté la première lueur de soleil à l’équipe de France avec une deuxième place, Fabien Claude [que vous pouvez retrouver en couverture du dernier Nordic Magazine] a carrément déplacé le soleil au-dessus des Bleus. C’était à Kontiolahti sur la poursuite du samedi.
Parti onzième, il connaît un début de course en demi-teinte avant de terminer comme une bombe sur la piste finlandaise. Entretien avec le champion français, heureux à souhait.
- Fabien Claude, c’est votre deuxième podium en coupe du monde après Pokljuka. Quelle saveur a celui-ci après le premier qui était fort en émotions ?
Il représente le fait que j’arrive à rentrer dans mes objectifs, à me prouver à moi-même que j’en suis capable. J’ai fait un très mauvais début de compétition à Kontiolahti et je ne voulais pas que cela impacte ma confiance. Je me suis appuyé sur mes points forts. Je suis satisfait de ma progression sur la semaine. J’ai commencé 74e, puis 25e, 11e et enfin 2e.
C’est important pour moi de continuer à bien faire les choses mais c’est sûr que c’est dommage d’utiliser deux courses en réglages. Notre préparation a été différente cette année, mais cela n’explique pas tout.
- Pouvez-vous nous raconter cette dernière bosse fantastique en duel avec deux vainqueurs de cette saison, Sturla Holm Lægreid et l’ogre Johannes Thingnes Boe ?
Je voulais rester plutôt derrière. Je savais qu’au sprint, c’était compliqué de me battre, j’ai souvent un avantage. L’objectif, c’était d’aller au bout de cette ligne droite. J’étais avec Florent [Claude, son frère, ndlr.] à l’échauffement je lui ai dit : « Je te promets que peu importe avec qui je serai, je le sauterai et lui ferai la peau ». Quand j’ai senti qu’ils décrochaient dans la bosse, j’ai continué et me suis dit que si j’avais un peu d’avance sur la relance ils ne me reverraient plus.
- Ce podium doit être salvateur pour vous et pour tout l’équipe de France qui avait connu un premier week-end mitigé ?
Demain sera une autre course. J’ai passé beaucoup de temps à discuter, j’avais besoin de sentir une proximité de la part des coachs, que j’étais soutenu. Après il ne faut pas rêver, les choses à changer c’est à moi de les trouver. Je crois en mon travail et je suis content de l’avoir réalisé.
J’étais frustré après le sprint d’être passé à coté d’une belle chance car la dernière, je la balance vraiment. J’avais des regrets mais je me suis dit que ce n’était que la troisième course et que sans me prendre la tête, ça allait le faire.
- Vous doutiez-vous que ce podium était accessible sur cette course ?
J’ai eu beaucoup de désillusions dans ma carrière. Je me dois de continuer de faire le boulot même quand je prends des pénalités, c’est mon métier. Après deux erreurs au couché, je sors loin mais rien n’est jamais écrit. Je m’installe à la cible 11 au dernier tir. Je ne m’intéresse alors pas au podium, je reste « focus » sur ma course. Quand je sors, je ne sais pas où j’en suis et quand je vois que je sors avec Johannes, je regarde le tableau et on m’annonce que je joue pour le podium.
- Est-ce que ce premier podium vous rassure quant à vos objectifs sur la saison ?
J’ai annoncé de gros objectifs, mais je ne sais pas si je les réaliserai. En revanche, je sais que j’en suis capable et si je fais des courses à mon meilleur niveau, je peux aller les chercher. Aujourd’hui ,je fais encore trois fautes, ce n’est pas 20/20 donc il y a encore des choses à aller chercher.
Je ne me suis pas mis plus de pression que cela. Mon podium va faire du bien à toute l’équipe. En tout cas, je l’espère. Après le podium d’Anaïs [Chevalier sur le sprint, nldr.] je suis allé la voir et je lui ai dit : « merci ». On sait comment une spirale peut vite s’installer, médiatiquement surtout. Émilien fait deux fois huitième mais on attend des podiums car on est l’équipe de France. Alors c’est bien que ça claque ce week-end.
- Après une troisième place à Pokljuka, une deuxième à Kontiolahti, on se doute logiquement que votre prochain objectif est une victoire, non ?
La course récompense le meilleur biathlète. Je prends ma saison course par course. Ce sera la meilleure stratégie. Je ne me suis jamais projeté sur une victoire. Il faut que tout soit là au bon moment. Si ça vient, ça vient. Bien sûr, si je prends le départ pour aller jouer quelques chose, c’est autant la gagne qu’un podium.
Quentin [Fillon-Maillet, ndlr.] fait de belles courses, mais ça ne claque pas. Sur mon premier podium à Pokljuka, j’ai eu le meilleur temps dans le dernier tour, mais je suis tombé sur Johannes et Martin à 20/20 ce jour là. Tout devra être aligné au bon moment.
- Qu’est-ce que cela vous fait d’entendre Johannes Thingnes Boe dire que vous êtes le pire athlète avec qui se retrouver dans un dernier tour ?
Je ne savais pas qu’il avait dit ça, j’ai découvert ça en rentrant. Ça fait plaisir. Johannes est un énorme champion, ça fait donc d’autant plus plaisir. Ils connaissent aussi mes qualités. J’ai un peu la pancarte comme à vélo. Soit tu pars à un kilomètre, soit tu pars aux 200 m, sûr de ton sprint. Après si le gars est plus fort c’est compliqué. Aujourd’hui, ça m’a réussi. Mais l’’objectif de base, c’était d’aller sur la dernière ligne droite face aux Norvégiens.
- Demain, dimanche, aura lieu le premier relais de la saison. De quoi signer une première victoire collective ?
Ce serait beau. Ça passera évidemment par quatre superbes courses individuelles. On le sait, les Suédois et Norvégiens sont très forts, je ne pense pas qu’on soit les grands favoris. Mais sur un relais on n’a pas à rougir. C’est le biathlon.
- Pour finir, que pouvez-vous nous dire sur la condition physique du groupe et sur les conditions de course à Kontiolahti ?
On avait de très bons skis aujourd’hui, vraiment. Après on a eu une préparation vraiment différente mais on ne va pas répéter encore ce qu’on a déjà dit dans les médias. On est bien là, ça n’a pas claqué sur le premier week-end mais encore une fois, Quentin avec un 9/10, neuf fois sur dix, il aurait été sur le podium, pas cette fois-ci. Maintenant ça y est, c’est parti grâce à Anaïs !
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Photos : Nordic Focus.