Biathlon : l’heure du bilan pour Jean-Paul Giachino
Cet hiver, le Savoyard Jean-Paul Giachino, 60 ans, a vécu une magnifique saison en tant que coach du tir de l’équipe de France féminine de biathlon. Avec le gros globe de cristal et le titre mondial de la poursuite de Julia Simon, quatre filles différentes sur le podium en coupe du monde ou les gains des globes du relais et des nations, il a mené, en binôme avec Cyril Burdet, ses athlètes au sommet de leur sport.
Pour Nordic Magazine, il revient sur cet exercice plus que réussi.
Son bilan global de l’hiver : « Collectivement, j’ai rarement vu cela »
« Le bilan est bon. Collectivement, j’ai rarement vu cela ! J’ai été avec les filles de l’équipe de France de 2007 à 2018 puis je suis revenu en 2020 et c’est vrai que, collectivement, j’ai rarement vu une équipe aussi forte. Cet hiver, on a pu se permettre de gagner en relais sans mettre la leader [Julia Simon, NDLR]. Cela montre bien que le niveau était très homogène. »
« Au final, il y a le globe du relais qui se gagne sur le dernier de la saison et celui des nations, qui ne s’était pas fait depuis 1996. Quand tu prends ces deux globes-là, cela veut dire que tout a fonctionné collectivement tout au long de l’hiver. Quand tu as six filles dans les vingt-et-une premières mondiales, cela veut tout dire ! Elles ont toutes contribué à cette performance collective et fait des choses qu’elles n’avaient jamais faites auparavant. »
« Avant mon retour, les filles ont été baladées d’entraîneur en entraîneur avec peut-être des discours pas compris ou appropriés. On les a perdues dans des considérations, par moments, trop techniques. Le tir du biathlète est technique, mais pas que, il y a autre chose. Quand tu changes de coach et de discours deux fois en deux ans, c’est difficile de créer et de stabiliser quelque chose. »
Julia Simon : « Gagner un général, c’est un peu le Graal »
« Elle était remplaçante aux Jeux olympiques en 2018 en Corée du Sud et j’avais vu que sa faiblesse, c’était sur le tir couché. Si elle est passée du dixième au premier rang mondial cet hiver, c’est surtout grâce à ce tir couché qui a évolué positivement. En l’espace de trois ans, elle a gagné plus de 15 points sur ce tir. Elle a ce tir debout instinctif où il n’y a pas grand-chose à faire, juste à surveiller à la tempérer. Sur le couché, il y a vraiment un apprentissage qui n’était pas bon. Il a fallu repartir et repasser par les fondamentaux. Cela a pris un petit peu de temps, mais je l’avais prévenu que c’était au moins deux ans de travail. »
« Je me suis dit qu’elle pouvait un petit peu retomber dans ses travers à certains moments. Je m’y attendais, mais cela ne s’est pas produit. Tant mieux ! Là où elle a été balèze (sic) psychologiquement, c’est de prendre le dossard jaune début décembre et de le garder jusqu’au bout. Gagner un général, c’est un peu le Graal, surtout qu’il y a eu le titre mondial avec. En 2026, elle aura un titre olympique à aller chercher ! L’année prochaine, pour elle, les objectifs seront différents. Elle ne peut pas repartir bille en tête sur un autre général. Il lui faudra d’autres objectifs un petit peu plus ciblés, peut-être des championnats du monde ou un globe du sprint. Mais ce n’est pas encore défini, on a le temps d’en discuter ! »
Anaïs Chevalier-Bouchet : « On perd une de nos leaders »
« Globalement, sa saison est bonne. Elle est huitième mondiale. Elle voulait un titre aux Mondiaux, elle n’y est pas arrivée, mais sa saison est bonne avec cinq podiums. Là, elle était au maximum de ses possibilités, que ce soit physiquement et mentalement. Elle ne peut pas faire mieux, mais ce qu’elle a fait tout au long de sa carrière est admirable. On perd une de nos leaders, mais toutes les bonnes choses ont une fin. »
« A son retour de grossesse, elle était un peu tranquille et épanouie. C’est certainement la maturité. »
Chloé Chevalier : « Elle a tendance à être dans le trop bien faire »
« Elle arrive sur le tard à faire son premier podium à 27 ans à Antholz. A Oslo, elle n’est pas loin d’en faire un autre et elle termine l’hiver seizième, en évolution. Son blocage n’est pas technique ou physique, il est psychologique. Elle a tendance à être dans le trop bien faire, à en rajouter et ne pas suffisamment oser. C’est frustrant pour le coach que je suis. Malgré tout, elle a énormément évolué là-dessus, c’est beaucoup mieux. Il en manque encore un petit peu, mais elle a fait cet hiver des choses jamais réalisées jusque-là. »
Lou Jeanmonnot : « Elle met à chaque fois le relais sur orbite »
« C’est une belle surprise ! Elle a bien évolué physiquement et techniquement grâce au travail de Cyril [Burdet]. Au tir, il n’y a pas grand-chose à faire, il faut juste la faire évoluer sur le temps passé sur le tapis, surtout sur le couché. C’est là où il y a a gratter pour elle. On a en première relayeuse quelqu’un qui ne passe quasiment jamais à côté. Elle met à chaque fois le relais sur orbite. C’est super parce que, sur un relais, il faut être devant d’entrée ! »
Sophie Chauveau : « Il y a vraiment à gratter et à faire évoluer au tir debout »
« Comme Lou [Jeanmonnot], c’est une belle surprise de la saison dans le groupe filles ! Pour l’instant, elle a un niveau de tir debout faible. Il y a vraiment à gratter et à faire évoluer là-dessus, mais il n’y a pas de raison. Cela prendra le temps qu’il faut, mais je pense qu’au bout d’une année, elle commencera à trouver la régularité, et cela pourra être stabilisé en deux ans. Cela va demander du travail et de la répétition. »
« Pendant la semaine du Grand-Bornand, où elle a explosé, elle était sur un nuage. Elle ne savait pas trop ce qui lui arrivait. C’était étonnant. Je ne m’attendais pas du tout à cela ! En faisant entre vingt et trentième de manière régulière, cela aurait fait une belle entrée en coupe du monde et, là, elle est venue jouer devant. C’était la première fois qu’elle faisait une saison complète en coupe du monde. Il faut l’encaisser et l’assimiler parce que c’est beaucoup de courses, de la pression et du stress. »
Caroline Colombo : « Comme toute athlète, elle est impatiente »
« Même si elle fait une cérémonie des fleurs à Kontiolahti sur l’ouverture, cela a été un petit peu plus difficile. Comme toute athlète, elle est impatiente et le fait d’avoir fait top 6 la première semaine, elle a eu envie de revivre cela. C’est bien d’être ambitieux, mais ce n’est pas en ayant envie d’aller claquer des podiums qu’on y arrive. Plus on a envie et moins on y arrive parce qu’on force les choses et on court après un résultat. Cela ne marche pas. Après, elle termine vingtième mondiale ! Il lui en manque au niveau du tir où elle est, comme Sophie [Chauveau], à 80 %. Il leur manque au minimum 5 points pour avoir des stats acceptables en coupe du monde. C’est super parce qu’elles ne sont pas au bout de leur progression. »
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