Biathlon : Jean-Pierre Amat se confie
Depuis sa prise de fonction comme entraîneur de tir de l’équipe de France masculine de biathlon au milieu du printemps, la Savoyard Jean-Pierre Amat, qui s’est occupé de la Chine avant les derniers Jeux olympiques, s’est peu exprimé dans les médias. Homme discret, il préférait participer à la reconstruction d’un collectif marqué par un hiver 2022/2023 difficile.
Pour Nordic Magazine, à deux semaines du lancement de la coupe du monde à Östersund (Suède), il a accepté de se confier depuis Bessans (Savoie), où son groupe peaufine sa forme. Entretien.
- Pouvez-vous revenir sur votre arrivée à la tête du groupe coupe du monde masculin ?
Stéphane Bouthiaux m’a appelé pour savoir si ça m’intéressait de reprendre le groupe des garçons, j’ai dit oui. Il m’a ensuite rappelé en me demandant si j’acceptais de faire équipe avec Simon [Fourcade]. J’ai également dit oui et c’était parti ! Je connais bien Simon parce que je l’ai rencontré avant même qu’il ne soit en équipe de France jeunes lors d’un stage à Font-Romeu. C’était en 2000 ou 2001, il était tout minot et venait regarder les grands qui s’entraînaient avec la langue qui pendait et les yeux exorbités. Je lui avais proposé de faire quelques séances de tir avant que les grands n’arrivent… et il arrivait avec sa carabine et son vélo !
- La prise de décision semble avoir été facile…
Elle a été partagée avec madame et, à partir du moment où elle a donné le feu vert, c’était parti ! C’est un challenge intéressant.
- Comment se déroule l’entente avec Simon Fourcade, votre binôme ?
Très bien ! J’ai une totale confiance en ses capacités d’entraîneur ainsi que d’avoir une vision à court, moyen et long terme sur le fonctionnement de l’équipe. Il me laisse totalement libre pour tout ce qui concerne le tir. Je pense qu’on a tous les deux une passion assez marquée pour cette fonction-là et ça va bien ! Jusqu’à présent, on n’a pas eu de plaintes des athlètes.
- Le fait que les athlètes, justement, aient été mis dans la boucle lors de votre recrutement est-il un gage de confiance ?
C’est plus simple d’arriver de cette manière que de se dire qu’une partie de l’équipe est réticente. Cela ne m’aurait peut-être pas fait plus peur que cela ! On peut obtenir l’adhésion des athlètes à partir du moment où on est totalement sincères en disant ce que l’on fait et en faisant ce que l’on dit. Ce sont les principes de l’éducation parentale adaptés au fonctionnement d’une équipe. Ils veulent qu’ont les écoutent en prenant de temps en temps en compte leurs envies et souhaits. On le fait parce que c’est une équipe qui a de la maturité et qui est très engagée dans son entraînement. Je me sens plus comme un des membres de l’équipe que comme un coach au-dessus du groupe. De mon ressenti, il y a une vraie symbiose avec les athlètes. C’est intéressant et du plaisir tous les jours.
- Fabien Claude a réalisé l’hiver dernier sa meilleure saison, mais il a un tir qui ne lui permet pas encore de jouer face aux tous meilleurs sur un classement général : quelle est votre analyse ?
La première chose que j’ai faite quand on m’a proposé le poste a été de reprendre les statistiques de tir de la saison précédente. J’en ai tiré certaines conclusions et, dès qu’on a commencé à travailler, Fabien [Claude] a fait partie des personnes avec qui il a fallu modifier des trucs (sic) sur sa position au couché. Il y a eu un peu de boulot sur la position, mais aussi sur la manière d’aborder et de construire les choses. Cela a été fait. Il était très volontaire. Pour moi, tous les feux sont au vert le concernant… tout en n’oubliant pas que c’est un projet sur trois ans. D’ici 2026, il y aura la possibilité de tout mettre bout à bout pour que cela fonctionne très bien. Cet hiver, je pense qu’il y aura déjà de très belles choses parce qu’il a gagné en maturité dans la compréhension et la description de ce qu’il fait au couché. Ses analyses sont parfois un petit peu trop fouillées, donc il doit revenir à l’essentiel sans se faire de nœuds au cerveau.
- Un mot par rapport à Emilien Jacquelin, qui sort d’une saison particulière…
C’était effectivement une saison bizarre. J’avais vu cela de l’extérieur donc la première des choses a été de faire une entrevue personnelle avec lui, comme avec chacun des membres du groupe. Avec Emilien [Jacquelin], on a abordé son arrêt prématuré de la saison. J’ai pris acte de tout ce qu’il m’a dit. Il avait pris des notes et c’était très bien construit, argumenté et expliqué. C’était un très gros bon point. Honnêtement, ce n’est pas l’Emilien que j’ai connu chez les juniors. Il a mûri le garçon, ce n’est plus un jeune chien fou ! A partir de là, on a tiré des bilans et pris des décisions. De réputation, je savais que c’était un gamin qui changeait ses réglages à la veille d’une course et je lui ai demandé de ne pas travailler comme cela. Je veux en tout cas lui prouver que ce n’est pas utile. Sur la forme, on va revenir à ce qu’il faisait auparavant, comme lors de sa dernière année juniors où il était très fort. Si on arrive à le mettre simplement en confiance et à lui proposer un projet simple auquel il adhère fondamentalement, il va y avoir de belles choses.
- Quel est votre avis sur l’évolution générale du biathlon tricolore en comparant une coupe de France de maintenant par rapport à il y a dix ans ?
La première tendance évidente, c’est le nombre de départs. Pour les U15/U17, il peut y avoir des week-ends à 300 gamins, ce qui est énorme. Après, on voit que les jeunes s’entraînent plus tôt et tirent mieux. Tout cela évolue bien et va continuer. C’est forcément porteur d’avenir ! On a toujours craint un manque de relève en équipe de France et, de fait, cela fait vingt ans qu’il y en a toujours eu.
Avec Thomas Bray, à Bessans (Savoie).
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