BIATHLON – En exclusivité pour Nordic Magazine, la légende finlandaise Kaisa Mäkäräinen a accepté de revenir sur les moments forts de sa carrière. Entre ski de fond, anecdotes, biathlon et rires, la nouvelle retraitée s’est prêtée volontiers à ce petit jeu.
Dans ce second épisode, la Finlandaise Kaisa Mäkäräinen revient sur les années 2010 à 2020. De ses premiers succès en coupe du monde à son ultime baroud d’honneur, en passant par ses trois gros globes de cristal.
< La première partie de notre entretien exceptionnel >
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Décembre 2010
Doublé sprint/poursuite à Östersund, en Suède, avec un 10/10 et un 20/20 :
« J’étais tellement gelée toute la semaine »
Ce qui me revient en tête quand je pense à ce week-end, c’est qu’il faisait un froid fou ! -20 degrés toute la semaine, j’étais tellement gelée… Les conditions météorologiques difficiles aident parfois à se concentrer uniquement sur le moment que vous vivez. Ces courses m’ont donnée énormément de confiance et j’étais tellement heureuse, et choquée, de porter le dossard jaune.
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6 mars 2011
Vous êtes championne du monde de la poursuite à Khanty-Mansiysk :
« L’un de mes endroits favoris »
C’était cool ! Je ne me souviens pas beaucoup de cette journée, mais il faisait également extrêmement froid, comme plusieurs fois cette année-là. Khanty, c’était l’un de mes endroits favoris pour courir. J’adore le parcours et l’approche du pas de tir est à peu près la même qu’à Kontiolahti, avec beaucoup de plat après la montée. Ce genre de profil me convient bien, bien mieux que juste après une descente.
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20 mars 2011
À la fin de la mass start d’Oslo, vous gagnez le gros globe de cristal :
« Les paroles de Raphaël Poirée m’ont donnée confiance en moi »
Lors de l’entraînement du matin juste avant la course, j’ai parlé, alors que ce n’était pas prévu, avec Raphaël Poirée. Il m’a rassurée avec des mots sages dont je ne me souviens malheureusement pas [sourire]. Alors que j’étais incertaine et stressée avant cette discussion, j’étais persuadée que je pouvais le faire après. Les paroles de Raphaël m’ont donnée confiance en moi et m’ont mise dans une paix intérieure. Je sais que nous n’avons pas parlé longtemps, mais je me souviens que ça a été un moment très important pour moi.
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12 février 2012
Vous remportez la poursuite de Kontiolahti, à domicile :
« Il y a toujours une pression supplémentaire… »
Les victoires à domicile sont l’une de mes favorites. Il y a toujours une pression supplémentaire là-bas, mais je connais la piste et le pas de tir par cœur. Donc, c’est 50-50 de courir à la maison : soit ça vous pousse, soit vous craquez sous la pression.
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26 février 2013
Vous prenez part aux Mondiaux de ski de fond dans la Val di Fiemme, en Italie :
« J’avais de très mauvais skis… »
C’était très amusant d’y concourir au sein d’une solide équipe finlandaise. J’avais malheureusement de très mauvais skis sur le 10 kilomètres et j’ai donc perdu beaucoup de temps dans les descentes… C’était tout de même une belle expérience. C’est seulement dommage que je termine troisième finlandaise de l’individuel et que je ne me sois pas qualifiée pour le relais.
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2014
Vous gagnez un deuxième gros globe de cristal après avoir signé un triplé à Kontiolahti mais vous n’avez pas remporté de médaille aux Jeux olympiques de Sochi :
« J’avais la grippe à Sotchi »
Avant Sochi, j’étais dans la meilleure forme physique de ma vie. Malheureusement, la veille du départ pour la Russie, j’ai attrapé une grosse grippe. Avant même qu’elles ne commencent, les courses olympiques étaient fichues. Ça a été la même chose en Corée du Sud en 2018. Les médecins ne voulaient pas que je participe aux compétitions mais je l’ai fait en connaissance de cause à mes risques et périls. Je la voulais tellement cette médaille [elle termine 30e du sprint, 16e de la poursuite, 9e de l’individuel et 6e de la mass start, ndlr.]. La maladie a continué pendant les deux semaines des Jeux olympiques. J’ai vraiment bien skié là-bas et je n’ai pas raté une balle en tir couché. Mais j’étais énormément stressée toute la durée des Jeux. Et j’ai vécu beaucoup de nuits blanches à cause de la toux. Après avoir pris quelques antibiotiques et du repos, j’ai pu retrouver la forme qui m’a permis de remporter le gros globe malgré la déception de Sochi.
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11 mars 2015
Médaillée de bronze mondiale de l’individuel à Kontiolahti :
« Un bronze qui ressemblait à de l’or »
C’est peut-être la meilleure dernière boucle que j’ai jamais faite [sortie à 1 minute 10 secondes de la tête après le dernier tir, elle réalise un dernier tour incroyable qui lui donne le bronze à 24 secondes 4 de la victoire huit petite dixièmes devant Dorothea Wierer, ndlr.]. Un bronze qui ressemblait à de l’or.
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31 mars 2017
Vous êtes championne de Finlande de ski de fond sur le 5 kilomètres à Kontiolahti :
« Beaucoup de personnes m’ont encouragé sur le parcours »
J’ai remporté mon premier titre de championne de Finlande en ski de fond en 2013 avant les Mondiaux disputés dans la Val di Fiemme. Pour mon deuxième, c’était une belle course et beaucoup de personnes m’encourageaient tout au long du parcours.
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2018
Vous décrochez un troisième gros globe à 35 ans pour… trois points sur Anastasiya Kuzmina ! Mais vous revenez encore bredouille des Jeux de Pyeongchang :
« Une bataille incroyable »
L’histoire de Sochi s’est répétée… Cette fois, j’ai attrapé la grippe à la maison quelques jours avant de partir en Corée du Sud… L’air froid et sec qu’il y avait là-bas n’a pas aidé à se débarrasser de la maladie avant le début des Jeux. J’ai réalisé de bonnes courses à la fin des Jeux en relais [6e du relais mixte, 15e du relais dames avec seulement deux pioches, ndlr.], mais les compétitions individuelles sont arrivées trop tôt pour moi [25e du sprint, 22e de la poursuite, 13e de l’individuel, 10e de la mass start, ndlr.]. Ensuite, j’ai passé une bonne semaine de compétition à la maison mais c’était vraiment mauvais à Holmenkollen. L’écart était tellement grand avec Anastasiya que j’étais prête à abandonner le combat [41 points séparaient les deux biathlètes à trois courses de la fin de l’hiver, ndlr.]. Et comme par magie, après le sprint et la poursuite de Tyumen [elle termine deuxième première, Kuzmina 12e et 6e, ndlr.], j’ai repris les devants pour cinq points. J’étais prête à me battre pour le globe. La dernière était une bataille incroyable. Mais j’adore les poursuites et les mass starts où vous pouvez vous battre en confrontation directe. C’était une semaine assez incroyable, et encore de bonnes courses en Russie [rires].
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2 août 2018
Dans le cadre du Blink Festival, vous montez sur le Lysebotn Opp :
« Je me suis toujours dit après la course « plus jamais ça » »
Je pense que j’ai gravi le Lysebotn Opp [7,5 kilomètres à 8,5% de moyenne, ndlr.] une dizaine de fois. La première fois, c’était en 2008 ou 2009. Je me suis toujours extrêmement mal à l’arrivée que je me suis toujours dit après la course que « plus jamais ça » [elle éclate de rire].
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12 janvier 2020
Vous remportez votre ultime coupe du monde, la mass start d’Oberhof, en Allemagne :
« Mes parents étaient là pour m’applaudir »
Je suis trop contente que cela se soit produit le jour où mes parents étaient là pour m’applaudir. Il faisait un si temps terrible… Je leur avait dit de ne pas venir à Oberhof mais ils voulaient tellement voir ce village traditionnel et ce stade de biathlon. Heureusement, ils ne m’ont pas écouté et sont quand même venus [sourire].
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14 mars 2020
Vous annoncez votre retraite quelques minutes avant le départ de la poursuite de Kontiolahti lors de laquelle vous remontez de la 18e à la 4e place :
« Je pensais terminer ma carrière à Holmenkollen »
Je n’étais pas préparée à ce que cela se produise ici, à la maison. Cette semaine-là a été un énorme chaos à bien des égards. D’abord, quand nous avons appris que les courses d’Holmenkollen étaient annulées et, ensuite, le vendredi après le sprint, ils nous ont dit que le dimanche était aussi supprimé. Je me suis alors rendu compte que la poursuite du samedi serait mon dernier départ en coupe du monde.
Après les championnats du monde d’Antholz, j’avais décidé que ça allait se terminer, mais je pensais que ça arriverait à Holmenkollen. Je savais que ce serait vraiment très émouvant pour moi, donc je ne voulais pas rencontrer d’autres personnes avant mon ultime course. Il y aurait eu des larmes, des câlins… C’est pourquoi je l’ai annoncé le plus tardivement possibl,e mais je voulais tout de même que les médias et les spectateurs sachent que ce serait ma dernière compétition. Auparavant, très peu de personnes le savaient. J’ai appuyé sur le bouton envoyé de mon téléphone juste avant de partir pour les tests de ski et de tir, puis je l’ai mis dans mon sac. J’étais focus sur la course et cela m’a donné un bon résultat. Avec un tir parfait pour mon dernier passage sur un pas de tir. en dernière position. Happy end [rires].
Photos : Nordic Focus.