BIATHLON – Quelle influence l’altitude a-t-elle sur les performances des athlètes ? Les scientifiques Alex Lunghi, Franck Brocherie et Grégoire Millet apportent une réponse via une récente étude.
Trois scientifiques viennent de publier un article sur l’impact de l’altitude dans la pratique du biathlon de haut-niveau. Alex Lunghi et Grégoire Millet, tous deux membres de l’institut des sciences du sport à la faculté de médecine et biologique de Lausanne aidé de Franck Brocherie, du laboratoire de l’institut français du sport à Paris, se sont penchés sur cette question qui sera au coeur des préparations des sportifs cet été avec des mondiaux prévus en altitude, sur le site d’Antholz…
Les athlètes sont, tout au long de l’hiver en train de changer de stade de biathlon. Et sont à chaque fois à des altitudes différentes. Ils passent d’Ostersund, pratiquement au niveau de la mer, à Antholz-Anterselva à 1600 mètres. Mais est-ce que ces changements de niveau influent sur les performances des biathlètes ?
L’hypoxie et le biathlon
Il a déjà été prouvé que le manque d’oxygène en altitude affectait directement la VO2 max de l’athlète. Elle diminue de -6,3 % tous les 1000 mètres.
La diminution de la pression atmosphérique entraîne une baisse de la densité de l’air et donc peut être favorable surtout en grande vitesse (au-dessus de 40 km/h, dans les descentes) mais négligeable dans les phases lente (15-25 km/h).
L’altitude a des conséquences directes sur les athlètes, eux-mêmes. Elle a un impact sur la ventilation et le rythme cardiaque pour pallier la baisse d’oxygène. Ces phénomènes sont vraiment visibles dans les grandes altitudes mais même à 1800 mètres, les effets le sont. De plus la fréquence cardiaque maximale diminue avec l’altitude.
Les courses de biathlon sont parfois en altitude, comme sur le site italien d’Antholz-Anterstelva. ©Manzoni/NordicFocus
Ces changements physiologiques peuvent influer sur le ski. Mais aussi sur la partie tir en raison des problèmes de récupération et de respiration.
Après les expériences
Après analyse des temps réalisés par des athlètes sur les différents circuits de la coupe du monde, les scientifiques en ont tiré des conclusions.
« Pour obtenir des résultats tangibles, nous avons intégré des données de skis et de tir en travaillant sur la moyenne du top 30 des quatre courses individuelles sur les différents circuits : IBU cup, coupe du monde, championnats du monde et Jeux olympiques », développe Grégoire Millet, bien connu du milieu du nordique pour ses nombreuses publications liées au ski de fond et sports d’endurance.
Sur la partie ski il n’y a pas d’énormes différences. Même si sur certains formats il y a une perte de temps générale, ça ne reste pas flagrant. Étonnement, parfois, il y a un gain de temps avec l’altitude.
Les difficultés sont plus visibles sur le pas de tir. Le pourcentage de réussite au tir diminue 2,5 points entre moins de 700 m et au-dessus de 1400 m.
« Nos résultats montrent un effet incohérent de l’altitude sur la vitesse à ski. Certains résultats sont même inattendus comme l’amélioration du rendement en haute altitude. Mais d’autres facteurs comme la glisse entrent en compte, poursuivent les chercheurs. Toutefois, la diminution de la vitesse due à la présence moindre de l’oxygène est minime. Par ailleurs, les résultats concernant le tir sont plus exploitables dans le sens où il se fait dans des conditions reproductibles. Et dans l’ensemble, les performances sont plus faibles en altitude. »
Donc l’altitude est à prendre en compte. C’est pour cela que les biathlètes de l’équipe de France vont réaliser un stage à Antholz-Anterselva pour habituer les organismes au pas de tir et à l’effort à 1600 m. Ce que nous a confirmé leur entraîneur, Vincent Vittoz, dans un entretien. D’ailleurs, avant l’Italie, les bleus auront skier sur le glacier de Tignes dans la même optique…
Photo : Nordic Focus photo agency