Biathlon : Antonin Guy a tout cassé
Cet hiver, Antonin Guy, qui a fêté son dix-huitième anniversaire en février, a brillé de mille feux. Grand espoir du biathlon masculin français, l’Isérois du GUC Grenoble Ski a effectivement réalisé des prouesses lors des Jeux olympiques de la jeunesse de Gangwon (Corée du Sud) puis des championnats du monde jeunes d’Otepää (Estonie). Triple médaillé d’or en Asie puis titré à deux reprises sur les bords de la mer Baltique, le Dauphinois s’est montré à son aise face à la concurrence international.
Egalement ultra-dominateur sur sa scène de la coupe de France, il a glané quatre titres nationaux en fin de saison. Après cet exercice 2023/2024 exceptionnel, Antonin Guy a accepté de se confier longuement à Nordic Magazine. Entretien.
- Quel bilan global faites-vous de votre hiver ?
Il est assez, voire très positif ! Je suis super satisfait d’avoir réussi à être en forme physique, dès les sélections de début novembre jusqu’aux championnats de France de fin mars. Je suis parvenu, aussi, à être régulier au tir, sans avoir de fatigue mentale. Ce sont des points que me satisfont !
- En deux compétitions internationales disputées, vous avez participé à neuf courses pour cinq titres et sept médailles au total : vous rendez-vous compte de ce que vous avez accompli ?
Quand on regarde les chiffres, c’est sûr que c’est assez impressionnant ! Mais, pour être honnête, je ne me rends pas trop compte de ce que j’ai pu réaliser… Je croise beaucoup de personnes depuis que j’ai fini les courses, au lycée ou dans mon entourage, donc c’est sûr que ça fait remonter des souvenirs et des émotions. Ces victoires, ce sont des courses dans la catégorie des jeunes, c’est important sur le moment, mais je sais que ça ne fera pas du tout mon avenir. Personne ne prendra cela en compte quand il s’agira de faire des sélections dans le futur.
- Quel qualificatif accolez-vous en priorité à ce que vous ressentez en repensant à votre saison ?
Le premier mot qui me vient en tête, c’est : émotion. J’ai vraiment ressenti des choses exceptionnelles cet hiver, des émotions qui me donnent encore des frissons quand j’y repense. Je sais que ce sont des choses qui vont rester très longtemps et dont je vais me souvenir.
- Est-ce difficile de ne pas s’enflammer après de telles performances ?
Non ! Il faut remettre les choses à leur place. Il y a eu des victoires internationales, mais, comme je l’ai dit avant, c’est seulement dans la catégorie jeunes. On n’était pas en seniors ou même en juniors. J’essaye d’aborder cela de la manière la plus simple possible, en restant moi-même, c’est-à-dire humble et modeste dans la performance. C’est sûr que j’ai réalisé de très bonnes courses, que j’ai validé des axes de travail et que j’ai montré un bon état esprit, mais rien n’est fait. Ce n’est pas parce que j’ai fait de bonnes courses cette année que je serais à ce niveau-là l’hiver prochain. Surtout en biathlon où on voit que, d’une année à l’autre, certains progressent énormément et d’autres perdent de leur niveau. Rien n’est fait, je vais repartir sur une préparation en mai, en pensant aux objectifs, et en prenant les jours les uns après les autres.
- Comment expliquez-vous cet enchaînement de bons résultats ?
Pendant les Jeux olympiques de la jeunesse, on a eu quatre courses en cinq jours, sans avoir le temps de se rendre compte de quoi que ce soit. En rentrant, on a de suite enchaîné sur les sélections pour les Mondiaux jeunes. Ensuite, on a fait le stage de préparation, les championnats du monde puis, de nouveau, des courses nationales importantes avec des titres de champion de France à aller chercher. J’ai réussi à surfer sur la vague des JOJ pendant très longtemps, sans jamais me poser chez moi pendant quelques jours pour me rendre compte et, inconsciemment, me démobiliser. Je pense que c’est cela qui m’a permis de rester concentré et d’enchaîner.
- Lors des Mondiaux jeunes, unis à ceux des juniors, avez-vous appris des choses au contact de biathlètes plus âgés ?
L’atmosphère, d’abord, était vraiment différente par rapport aux JOJ. Tout le monde était là uniquement pour la performance, et pas seulement pour l’expérience. On était donc avec les juniors, pour qui cet événement est le sommet de leur saison, le moment où ils doivent être à leur meilleur niveau. On sentait qu’ils jouaient en grande partie leur avenir dans le biathlon. A l’hôtel, on était avec les Norvégiens et c’était instructif. On voyait les juniors faire le boulot, ne pas faire de bruit, se coucher tôt, aller faire du rouleau. Il y avait notamment Isak Frey avec qui on s’est super bien entendu, il est très sympa [rires] !
- Sur le circuit national, vous avez aussi brillé avec trois titres de champion de France U19 en sprint, poursuit et mass-start ainsi que le gain du classement général de la coupe de France U19 : on imagine que, pour vous, c’était aussi important d’y performer…
C’est quelque chose d’assez important. En début de saison, c’est là où se déroulent les sélections, donc on se bat tous pour la même chose. En fin d’hiver, après les Mondiaux, je n’avais plus le dossard rouge [de leader de la coupe de France U19], qui est vraiment quelque chose qui me tient à cœur. Il me motive, parce qu’être le meilleur sur toute la saison, c’est très important pour moi. La seule chose qui était importante, c’était de gagner pour reprendre la tête. J’ai mis la poignée au fond et j’ai tout gagné.
- Aux Saisies (Savoie), en décembre, vous avez même gagné un sprint au scratch devant les U22/Seniors : c’est aussi un super bon point pour la suite…
A ce moment-là, il y avait pas mal de juniors en Junior Cup. Durant la préparation, c’était un objectif pour moi, quelque chose qui me donnait envie et m’intéressait vraiment. Le fait de ne pas y être m’a mis un coup à l’égo, et je savais que j’allais vraiment envoyer du gros aux Saisies. Le premier jour, je tire à 10/10 et j’étais à mon meilleur niveau sur les skis, donc cela a fait une super course, et je gagne au scratch devant les U22 et seniors, même si c’était une coupe de France sans les groupes IBU Cup et Junior Cup.
- Etait-ce inspirant de finir la saison en remportant le relais par comités avec Emilien Jacquelin ?
Sur le papier, on avait une équipe au top du top avec les trois vainqueurs de la mass-start de la veille ! On savait qu’on était favoris, mais c’est compliqué de s’imposer et de tenir la pression avec ce statut-là. Avec Nans [Madelenat], on était un peu stressés de faire la journée avec Emilien [Jacquelin], parce que c’était assez impressionnant. Mais c’était surtout ultra inspirant, parce qu’en fin de saison, il était exceptionnel avec des vitesses affolantes sur les skis. Le relais par comités, c’est hyper important et on le gagne pour la deuxième fois de suite !
- Avez-vous le sentiment d’avoir réalisé des choses extraordinaires cette saison ?
Sur l’ensemble de la saison, je n’ai pas l’impression d’avoir fait des choses exceptionnelles, mais pas non plus l’impression d’avoir fait des choses normales. Le plus compliqué, je trouve, c’est d’accrocher la sélection, parce qu’on est dix, quinze Français à avoir le niveau et on est que quatre à partir. Quand tu prends cette place, tu sais que tu as le niveau et que tu as ta carte à jouer. Cette année, dès que je suis parti sur les courses internationales, j’avais encore plus la hargne et l’envie de bien faire. C’est ce qui a fait que j’ai fait des compétitions encore bien meilleures qu’en France. L’ambiance et la pression de l’événement, c’est quelque chose qui me parle et qui me motive, en me donnant encore plus l’envie de bien faire. Surtout, j’étais à la recherche de l’émotion de sortir en tête du pas de tir. C’est quelque chose de difficile à exprimer, mais c’est incroyable !
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