Biathlon : la fratrie Claude sur la ligne de départ d’une coupe du monde
Ils en rêvaient. En février 2015, dans un portrait que Nordic Magazine avait consacré à la fratrie Claude pour son quatorzième numéro, Fabien, le cadet de la famille, songeait à partager une coupe du monde de biathlon avec ses frères, Florent et Emilien : « Ce serait la plus belle chose… L’espoir fait vivre, mais nous n’allons pas nous emballer et continuer à travailler. » Du travail, depuis presque six ans, il y en a eu. Beaucoup. Et des péripéties, aussi, pour arriver à ce sprint d’Oberhof (Allemagne), le temple de leur sport, du 8 janvier 2021.
La première d’entre elles, et qui a permis cette suite heureuse, c’est le passage de Florent de l’équipe de France à l’équipe de Belgique à l’été 2017. Écarté du collectif fédéral, le jeune homme de Basse-sur-le-Rupt ne souhaitait pas mettre fin à sa carrière, à seulement 26 ans. C’est alors qu’André Dehottay, le père d’un licencié belge de son club vosgien, lui propose de rejoindre le giron du royaume : « J’ai pris cette proposition comme une seconde chance et, aujourd’hui, je suis ravi de participer au développement du biathlon en Belgique et à celui d’une équipe qui construit un projet sur le long terme », expliquait-il à Nordic Magazine à l’automne 2017.
La disparition de Gilles, le papa
Aligné à quelques reprises en coupe du monde sous les couleurs françaises, l’aîné de la fratrie se retrouve propulsé leader de l’équipe belge aux côtés de la légende Michael Roesch, Allemand et champion olympique du relais dans une première vie. Ce qui lui permet de participer à la coupe du monde, aux Jeux olympiques de Pyeongchang ainsi qu’aux championnats du monde sans « l’épée de Damoclès des sélections au-dessus de la tête ».
C’est d’ailleurs lors des Mondiaux d’été de Chaikovskiy (Russie), en août 2017, qu’il dispute ses premières courses avec la combinaison belge sur le dos. 531 jours après sa dernière compétition internationale… une troisième place lors du relais mixte simple de l’IBU Cup de Martell (Italie) obtenue avec une certaine Julia Simon !
« On est content de cette nouvelle situation car la compétition permanente au sein même de l’équipe de France aurait pu, à terme, nous nuire, témoignait alors Florent sur son hypothétique relation avec Fabien au sein du collectif français. On est frères avant d’être adversaires. » Cette situation tant redoutée à l’été 2017 doit être gérée, depuis quelques jours, par Fabien et Emilien Claude, tous deux appelés en équipe de France pour la coupe du monde d’Oberhof (Allemagne).
Avant d’en arriver à disputer la même coupe du monde, les trois frères Claude ont dû traverser une terrible épreuve inattendue que personne n’est préparé à vivre. Le 22 janvier 2020, les frangins apprenaient que Gilles, leur papa, avait disparu au Canada après un accident de motoneige. Un coup de massue alors que Fabien et Florent se trouvaient à Pokljuka (Slovénie) dans le cadre de la coupe du monde de biathlon. Le lendemain, courageusement, les deux sportifs prenaient le départ, avec leur père dans un coin de leur tête.
Une sélection officialisée la veille de Noël
« Je voulais uniquement prendre le départ pour notre père, expliquait Fabien à Nordic Magazine au printemps dernier. Quarante-cinq minutes avant le départ, j’étais en pleurs aux essais de tir lorsque la chanson You’ll Never Walk Alone [Tu ne marcheras jamais seul, ndlr.] a retenti dans le stade. Je ne savais pas où j’allais et si j’allais être capable de rallier le premier tir… »
Finalement, avec un 20/20 sorti du fond de ses tripes, le Vosgien terminait troisième, derrière les monstres Johannes Thingnes Boe et Martin Fourcade, signant son premier podium en coupe du monde. « J’étais poussé par une force extérieure », expliquera-t-il joliment dans nos colonnes en novembre.
#claude3brothers
Un grand bonheur d’être enfin réunis les 3 sur une même coupe du monde ???@fabien_claude1 @EmilienClaude1 #family #brothers #biathlon pic.twitter.com/UoSRcKoN9D— Florent Claude (@florentclaude1) January 7, 2021
Depuis ce 23 janvier 2020, Fabien Claude est installé en équipe de France. Cet hiver, il est même le onzième meilleur biathlète de la planète après neuf étapes. Le temps d’une course, il a même porté le dossard rouge de leader de la poursuite, laissé à Emilien Jacquelin pour cette étape d’Oberhof (Allemagne).
Pendant ce temps-là, Emilien, le petit dernier de la famille, se faisait les dents, faute d’IBU Cup, sur les chronos de sélection de Bessans (Savoie), mais surtout de Prémanon (Jura) à l’issue desquels il décrochait, après Martin Perrillat-Bottonet sur Kontiolahti (Finlande) et Oscar Lombardot à Hochfilzen (Autriche), son ticket pour la coupe du monde d’Oberhof (Allemagne).
Une officialisation effectuée par la Fédération française de ski le 24 décembre. Comme un cadeau de Noël pour la fratrie Claude réunie dans les Vosges autour de leur maman Christine. Avec une pensée pour le père disparu.
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Photos : Nordic Focus.