BIATHLON – Depuis la fin d’un hiver plus que mitigé sur le plan sportif, la fédération russe de biathlon connaît une grave crise. L’ancien champion Anton Shipulin a rappelé tout le monde à la raison et estimé que la priorité du moment était la lutte contre le coronavirus.
Biathlon : polémique et coups bas
En fin de semaine, la Russie du biathlon plongeait dans la crise. Une lettre publique était adressée au président de l’Union russe de biathlon (RBU) Vladimir Drachev le pressant de démissionner, paraphée par d’anciens champions olympiques et entraîneurs. Depuis, il y a débat sur le nombre réel de signataires. Le député de Douma a fait son compte. Ils seraient six « experts » et non pas 24. Sergei « Golikov [qui est directeur exécutif de l’organisation fédérale] était aux manettes. Il a persuadé Anatoly Alyabyev, Alexander Tikhonov, Dmitry Vasiliev et Alexander Kasperovich de le suivre. Ce sont les principaux initiateurs de cette lettre », a déclaré Drachev à l’agence Tass.
Il n’empêche, la boîte de Pandore a été ouverte. Il n’y a plus une journée sans critique à l’égard de la politique menée par la fédération. A l’exemple de l’ancien entraîneur de l’URSS et de l’équipe nationale russe Alexander Privalov qui estime que le recrutement des jeunes biathlètes est bien trop précoce.
Sans parler des accusations qui fleurissent. Jeudi, Golikov accusait Drachev d’avoir rémunéré le chauffeur de sa femme avec l’argent de la RBU. « Ma femme n’a jamais eu de chauffeur. Elle a sa propre voiture et n’a besoin de personne pour conduire », a répliqué le président qui ne cache plus son attention de virer celui qu’il voit désormais comme l’instigateur en chef du putsch.
Ambiance, ambiance.
Anton Shipulin, champion olympique en 2014 avec le relais russe, aujourd’hui engagé dans la politique, a rappelé chacun à la raison. Il a jugé que « tout changement dans la direction de la fédération devait se produire uniquement conformément aux statuts, et non sur la base d’une lettre publiée dans les médias. » Et d’ajouter : « Ensemble, nous devons déjà surmonter la situation du coronavirus, puis nous réfléchirons à l’avenir du biathlon et discuterons de tous les problèmes dans un dialogue ouvert et honnête. »
La prochaine réunion du conseil d’administration de l’Union russe de biathlon aura lieu le 6 avril. Il est très probable qu’elle se tiendra sous forme de vidéoconférence.
La Russie absente des podiums
Dès lors, l’aspect sportif semble passer au second plan. La Russie a-t-elle un si mauvais bilan que cela ?
Au classement des nations, elle ne figure certes pas sur le podium chez les hommes. Mais, déjà l’an dernier, elle occupait la quatrième place. Ce qui lui permet d’ailleurs de maintenir un quota maximum de six personnes pour la saison 2020/21.
A cinq reprises, elle a terminé à la 4e place : à Ostersund, Oberhof, Ruhpolding et Nove Mesto. Même rang lors des derniers championnats du monde à Antholz. À Hochfilzen, le quatuor russe a même fait moins bien, finissant 6e du classement.
Plus d’un pays se féliciteraient de cette régularité. Mais voilà, la Russie a passé l’hiver sans intégrer le top 3 d’un relais masculin. Du jamais vu !
La dernière fois que les biathlètes russes s’y sont invités, c’était lors des Mondiaux d’Östersund en Suède en 2019. Matvey Eliseev, Nikita Porshnev, Dmitry Malyshko et Alexander Loginov avaient remporté la médaille de bronze.
Chez les hommes toujours, des problèmes semblent également poindre dans la relève puisque, là encore pour la première fois, la Russie n’a remporté aucun globe de cristal sur le circuit IBU Cup. Même si elle dispose de jeunes talents avec notamment Saïd K. Khalili ou Vasilii Tomshin, son meilleur représentant en coupe du monde B, Kirill Streltsov aura déjà 25 ans l’hiver prochain. Et derrière ces trois-là le réservoir semble plus mince que jamais.
Dans les disciplines mixtes, elle n’a pas fait mieux. Quant à l’équipe féminine, elle n’a pas contribué à redorer le blason. Elle est montée une seule fois sur le podium le 14 décembre dernier à l’occasion de l’étape d’Hochfilzen.
Seul Alexander Loginov, 7e du classement général, semble sauver les meubles. Le 15 février 2020, il a aussi remporté le titre mondial du sprint à Antholz-Anterselva. Aux dépens du Français Quentin Fillon-Maillet.
Mais le biathlète de Saratov n’est pas en capacité de jouer les ambassadeurs. L’homme dérange. C’est qu’en 2014, il a déjà été contrôlé positif à un produit dopant par l’IBU, l’EPO, puis suspendu deux ans, jusqu’à l’automne 2016.
En Italie, en plein Mondiaux, sa chambre était perquisitionné dès potron minet par la police. Sans résultat. Ce qui avait provoqué un incident diplomatique. Depuis, la Russie a officiellement protesté. Jugeant la perquisition «inadmissible et disproportionnée», Moscou avait regretté « l’impact négatif de cet incident sur le développement de la coopération sportive entre [les] deux pays ».
Mi-février, c’était au tour du biathlète Evgeny Ustyugov de se voir infliger une sanction pour dopage par la Fédération internationale (IBU). Une sanction qui le privait de sa médaille d’or au relais gagnée aux Jeux olympiques de 2014 à Sochi. Il a depuis fait appel.
Photo : Nordic Focus – Instagram Anton Shipulin