BIATHLON – Sacrée championne du monde de l’individuel en 2019 en Slovaquie, la Groenlandaise Ukaleq Slettemark (18 ans) est un ovni dans le monde du biathlon. En exclusivité pour Nordic Magazine, celle qui vit à Geilo, en Norvège, revient sur ce titre mais aussi sur un hiver marqué par une maladie.
Chez Nordic Magazine, nous suivions l’évolution d’Ukaleq Slettemark avec attention. Depuis son titre mondial décroché lors de l’individuel d’Osrblie à la fin du mois de janvier 2019, la Groenlandaise est une attraction dans le petit monde du biathlon. Après un bon début de saison sur les circuits satellites de la coupe du monde, la jeune femme de 18 ans n’a plus participé à une course depuis la mi-décembre… De quoi attiser notre curiosité et la contacter pour une interview.
- Tout d’abord, quel est votre quotidien pendant cette période rendue compliquée par la crise du coronavirus ?
Lorsque le confinement a débuté, tous les entraînements prévus ont été annulés et toutes les salles fermées. Je pouvais encore m’entraîner avec mes partenaires d’entraînement mais pas à plus de cinq personnes à la fois. Je ne suis pas autant touchée par la pandémie que les autres parce que, même si les effets de la crise se font ressentir à Geilo [en Norvège, où elle habite, ndlr.], cela n’impacte pas énormément mon entraînement quotidien.
- Vous avez commencé cet hiver superbement avec des très bons résultats en IBU Cup à Sjusjoen puis une sixième place lors du sprint de Pokljuka en Junior Cup : vous étiez dans une grande forme ? Expliquez-nous…
J’étais en très grande forme au début de la saison parce que je m’étais très bien entraînée pendant l’été et l’automne. Même si le reste de la saison s’est très mal passé, j’ai obtenu mes meilleurs résultats en IBU Cup et en Junior Cup cet hiver-là.
- Effectivement, vous avez contracté une maladie à la fin du mois de décembre, c’était le début du calvaire…
Ces deux mois ont été les plus difficiles de ma carrière. Je ne savais pas ce qui n’allait pas et je pensais que j’allais bientôt aller mieux. Je suis allé chez le médecin plusieurs fois et, parfois, les tests disaient que j’avais un rhume, d’autres fois ils disaient que j’étais remise même si je ne me sentais pas bien. C’était très déroutant… Je suis finalement allée voir un spécialiste qui m’a dit que ma méforme était due aux végétations adénoïdes, des tissus présents dans la gorge qui peuvent vous rendre malade et fatigué. Tout a complètement disparu à partir du moment où j’ai utilisé un spray.
« Hyper cool de courir avec mon petit frère »
- Et quand vous pouvez remettre les skis et la carabine, la saison est stoppée à cause du coronavirus… Qu’avez-vous pensé à ce moment-là ?
En fait, ce n’était pas une mauvaise nouvelle pour moi. Je devais juste participer à une course après mon retour en bonne santé. Mais elle a été annulée. Du coup, j’ai plus de temps pour me reconstruire.
- Avant votre maladie, vous avez couru le relais mixte simple de Pokljuka (Slovénie) avec votre petit frère Sondre : ce devait être une fierté de représenter le Groenland avec votre frère ?
C’était hyper cool de courir avec mon petit frère. C’était la première fois que le Groenland engageait un relais en compétition internationale. Je suis si fière de Sondre parce que c’était sa première saison de compétitions internationales. J’espère que nous pourrons courir d’autres relais ensemble à l’avenir.
« Je suis tombée amoureuse du biathlon »
- Plus globalement, comment en êtes-vous arrivée à pratiquer le biathlon ?
J’ai découvert ce sport il y a huit ans quand je vivais en Norvège. Une fois par semaine, je m’entraînais à tirer à la carabine. Mes parents ont également fait du biathlon, mais ils ne m’ont jamais vraiment appris le tir, à la différence du ski de fond. Quand j’ai déménagé au Groenland en 2013, je n’ai pas fait de tir pendant quelques années. En 2016, il y a eu les Arctic Winter Games dans ma ville natale [dans le quartier Qinngorput de Nuuk, la capitale du Groenland, ndlr.] où il y avait des épreuves de biathlon. Comme j’étais quasiment la seule à l’avoir essayé par le passé et qu’ils voulaient un représentant du Groenland, j’ai participé aux épreuves.
- Avec quelle réussite ?
J’ai remporté toutes les compétitions [l’individuel, le sprint et la mass start, ndlr.] ! Ce n’était pas une compétition de très haut niveau, mais quand même [rires]. C’est à ce moment que je suis tombée amoureuse du biathlon. En 2017, j’ai eu l’occasion de courir mes premières courses en Junior Cup et, depuis, j’adore le biathlon de plus en plus…
- Jusqu’à devenir championne du monde jeune de l’individuel à Osrblie (Slovaquie) l’année dernière…
C’était un moment incroyable ! Aujourd’hui, j’essaye de ne plus y penser mais c’était fou pour le Groenland. Grâce à ce titre, le Groenland croit vraiment en moi. Je suppose que je suis un peu une star au pays [rires]. Je ne suis pas trop fan d’être sous les projecteurs mais j’espère que mes résultats pourront motiver les Groenlandais à skier ou à pratiquer le sport de leur choix, tout en restant actifs et en bonne santé.
« J’espère pouvoir participer à la coupe du monde ou aux Mondiaux l’hiver prochain »
- D’ailleurs, comment le biathlon se développe-t-il au Groenland ?
Il n’est pas vraiment développé au Groenland car il n’y a aucun pas de tir. Par le passé, il y a eu quelques biathlètes qui se sont entraînés en ski de fond au Groenland… mais ils ne pouvaient tirer qu’en compétition !
- Vous avez déjà couru au stade des Tuffes de Prémanon (Jura) : avez-vous hâte d’y retourner ?
Oui, j’y suis allée une fois ! Malheureusement, il y avait beaucoup de vent et il faisait très [elle insiste, ndlr.] humide. J’ai très envie d’y revenir… avec un peu de soleil.
- Quels seront vos objectifs l’hiver prochain ? Allez-vous faire des compétitions cet été (si c’est possible…) ?
Je ne sais pas si je peux avoir des objectifs après une si longue période sans entraînement… Actuellement, je dois juste voir si je peux revenir au niveau qui était le mien avant de tomber malade. J’espère peut-être pouvoir participer à la coupe du monde ou aux championnats du monde la saison prochaine ! Si ce n’est pas annulé à cause de la pandémie de coronavirus, j’aimerais aller aux championnats du monde d’été [de Ruhpolding, ndlr.] et au Blink Festival [il se déroulera à huis clos et les épreuves grand public et jeunes sont annulées, ndlr.].
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Photos : Nordic Focus, IBU et Instagram.