Aurore Jean et Coraline Hugue ont terminé sixième et septième du 30 km de ski de fond des Jeux. C’est une performance unique et exceptionnelle. Un authentique exploit, de la même veine que les sixième et neuvième places de Jean-Marc Gaillard et Maurice Manificat dans le skiathlon.
Seulement, nous sommes aux Jeux et dans la frénésie de la comptabilité des médailles, de la chasse au record et à l’histoire, les places d’honneur même brillantes passent souvent à pertes et profits pour le grand public. Seule la médaille est belle. C’est la règle des Jeux.
Sur place, il y a un côté un peu frustrant dans le grand cortège bleu-blanc-rouge qui se décline aussi dans toutes les langues et de toutes les couleurs, qui consiste à cocher sur le programme du jour « les courses où y a médaille ».
On voit alors débarquer un peloton groupé de dirigeants, de journalistes et de curieux à l’odeur du métal alléché. Médaille ? C’est « trente millions d’amis » en un éclair. Perdu ? « Je t’avais bien dit qu’on aurait dû aller au slalom… »
Alors posons nous un peu sur la neige du Caucase et rendons hommage à Aurore et Coraline. Leur course du jour justifie à elle seule les heures de souffrance, d’efforts et d’abnégation qu’elles mettent à chaque instant de leur vie de sportives. Elles sont déçues, c’est certain, mais doivent conserver la force de ce jour particulier pour écrire la suite de leur histoire.
On y retrouve tous les ingrédients qui avaient fait d’Hervé Balland un épatant cinquième du 50 km des Jeux d’Albertville, du relais français de ski de fond, à Turin et Vancouver, une héroïque armada et de Vittoz, Jonnier et d’autres passés à un bout de spatule ou une pincée de temps du bonheur total.
Bien sûr, aujourd’hui, lorsqu’on consulte les archives, on ne trouve pas de trace de ces exploits anonymes.
Mais le soir, à la veillée, un coude posé sur le bar, ces moments forts arrachent encore aux vieux grognards du nordique des moues admiratives. Ils secouent la tête, cognent leurs verre et lâchent : « C’étaient des sacrés fondeurs… »
Aurore et Coraline, bienvenue dans ce Hall of Fame qu’on ne retrouve pas sur google…
Photo : Agence Zoom