C’est un événement qui ne doit pas passer inaperçu. Pour la première fois dans l’histoire du biathlon, un Romand aura la saison prochaine le statut de professionnel au sein de Swiss-Ski (Marc Chabloz, qui a été 4e en coupe du monde en 2001 à Salt-Lake City, était alors affilié à la Fédération suisse de biathlon). Il s’appelle Gaspard Cuenot. A 20 ans, le Jurassien quitte donc le Centre national de Brigue. Entretien.
Gaspard Cuenot, peut-on désormais affirmer que vous êtes un biathlète ?
Oui, je vais l’être, car début juillet je pourrai enfin me consacrer à 100% à mon sport. Mais pour moi, le mot biathlète a une plus forte valeur. C’est l’athlète qui excelle dans la fameuse combinaison du tir et du ski et pour cela, il me reste encore beaucoup de chemin à parcourir.
Comment s’est opéré ce choix ?
Fin juin, je vais normalement obtenir ma maturité gymnasiale. C’est pour moi la fin d’un long chapitre. En effet, depuis 5 ans, j’étudie au lycée sport-étude de Brigue. Ce collège m’a permis de concilier au mieux le biathlon avec les études. Au fur des années, j’ai vu la plupart de mes concurrents passer professionnels. Pour moi, la routine restait la même, rythmée entre banc scolaire et séances de ski.
Puis, il est devenu toujours plus difficile de rivaliser avec les meilleurs. Si je voulais continuer le biathlon à haut niveau et rester dans la course, il me fallait plus travailler, donc devenir pro.
Après votre classement final de la Swiss Cup juniors et compte tenu de vos podiums en courses OPA, vous intégrez en effet les cadres B. Vous voilà chez les pro !
Passer en cadre B, signifie en Suisse s’entraîner avec le groupe élite c’est-à-dire celui de coupe du monde. C’était l’argument qui m’a renforcé l’idée de devenir pro. En effet, j’intègre une structure très professionnelle avec pas loin de 300 jours de camp d’entraînement. De quoi faire peur, mais je suis motivé et prêt à faire mes preuves.
Vous êtes le premier Romand à intégrer un cadre élite. Eprouvez-vous un sentiment de fierté ?
Pas vraiment de la fierté. Je suis honoré d’être le premier, mais je ressens plus la sensation de devenir un exemple. Il faut en être conscient. Mon but personnel est de faire découvrir à un maximum de personnes ce fabuleux sport qui cache une immense beauté et potentiel énorme. C’est un sport en pleine expansion en Suisse mais malheureusement encore peu connu en Romandie. Je vais tenter d’inverser la tendance.
Concrètement, quels changements cela va-t-il entraîner dans votre vie ?
Je suis sceptique, mais vraiment excité à l’idée de commencer ce nouveau chapitre. Je serai certainement moins stressé, je pourrai travailler le biathlon sur chacune de ses faces. Je bâclais parfois certaines séances spécifiques dû au manque de temps. Comme le tir où ma marge de progression reste énorme. Ou la régénération qui était très courte.
Benjamin Weger et moi, on est très potes”
Plus de devoirs à faire à la maison après l’entraînement donc ?
Ah oui les devoirs, la malédiction des Cuenot. C’est un peu comme le voyage du dimanche après-midi de 3 heures de temps qui sépare notre maison de l’école. J’en ai fait pendant cinq ans et ce n’était pas toujours une partie de plaisir mais c’est comme ça qu’on forge le mental.
N’éprouvez-vous pas un peu d’appréhension tout de même à travailler avec Weger ou encore Hallenbarter ?
Non, je ne pense pas. Dans le passé, Benjamin Weger était avec moi à Brigue. C’est un peu lui qui m’a poussé au biathlon. On est très potes. Il n’est pas rare qu’on se retrouve une semaine ensemble pour faire de l’entraînement en montagne. Simon Hallenbarter est un peu plus âgé, mais il possède un peu la mentalité du Romand donc je sens qu’on va bien s’entendre.
Je dois dire que j’appréhende plus de quitter mes amis de Brigue et l’ambiance qui y règne. C’était une expérience extraordinaire que je conseille à tous sportifs motivés.
Vous êtes-vous déjà fixé un objectif ?
Je vais tout faire pour prendre part au moins à un départ en coupe du monde durant la saison 2012-2013.