Auteur d’un excellent début de saison avec quatre podiums (dont deux individuels), Jason Lamy Chappuis conclut cette première période de coupe du monde à la 4e place du classement général et peut nourrir de grandes ambitions cet hiver. Le Jurassien est de retour. Interview chez le Bois d’Amonier…
Jason Lamy Chappuis, avec quatre podiums décrochés sur ce début d’hiver, vous signez une remarquable entame de saison. On vous imagine heureux après la saison olympique délicate…
Heureux oui, parce que j’ai retrouvé la forme, l’envie et le plaisir sur les compétitions. C’est mon état d’esprit en ce début d’année : j’ai envie de profiter et de me faire plaisir que ce soit en équipe mais aussi en individuel. J’ai réussi à me reconstruire et à retrouver un bon niveau. Je suis peut-être un peu plus irrégulier que les autres saisons, mais j’arrive encore à être très performant.
A Lillehammer, vous avez retrouvé le podium (3e de l’individuel) après 352 jours de diète de podium. Quel a été votre sentiment alors ?
Je me suis dit qu’il y avait longtemps que je n’avais pas vécu tout le protocole : me changer vite, répondre aux interviewes, participer à la cérémonie des fleurs, à la conférence de presse… Ce petit marathon après les courses me manquait. J’ai eu plaisir à retrouver cette euphorie. Quand tu ne fais pas de podium, tu chausses les skis, tu fais ton tour de ski, tu penses à la course. Il y a une petite note de déception.
Ce week-end à Ramsau, vous avez eu la joie de partager une troisième place avec les copains de l’équipe sur le relais. On sent une motivation particulière du collectif pour cette épreuve : comment expliquez-vous cette force d’équipe ?
Nous nous connaissons très bien, nous nous entraînons ensemble depuis que nous sommes tout petits. Il n’y a pas de petite guerre interne pour savoir qui va être devant qui. Quand François [Braud] a bien réussi sa première course, faisant dixième alors que j’étais derrière, j’étais content pour lui car il le mérite. Nous travaillons tous autant les uns que les autres. C’est ce qui fait notre force. Dans d’autres nations, ils ne sont pas aussi proches.
C’est une vraie victoire d’équipe qui ne repose pas sur une seule personne.
Ce podium collectif vous donne-t-il des idées pour les mondiaux de Falun où vous défendrez le titre par équipes ?
Il y a toujours à travailler. Si l’on était bien dès le début de saison, cela ne serait pas marrant. Là, il y a encore quelques petites touches. On a chacun à progresser dans un domaine différent. Ce qui est bien à Ramsau, c’est que nous avons réussi à faire un podium dans une configuration différente. J’étais le deuxième relayeur. Seb [Lacroix] a bien commencé, Max [Laheurte] et François ont super bien géré à la fin. C’est une vraie victoire d’équipe qui ne repose pas sur une seule personne.
Pour en revenir à Ramsau, vous avez signé une victoire remarquable sur une course tactique à souhait. Vous sembliez être parfaitement dans votre élément pour vous extirper de la meute de favoris…
J’avais les jambes, j’avais les skis, j’avais la tête. Quand on commence à se sentir bien à la mi-course, à percevoir qu’on peut réussir quelque chose, on est plus détendu. Je commence à observer à droite à gauche, à me dire“qui est là ?”, “ comment on va s’en sortir ?”, “est-ce qu’il faut accélérer ? Se mettre dans les skis ?”. J’essaie le plus possible de me reposer dès que l’on a une descente, à me mettre juste derrière pour être à l’aspiration. Mikko Kokslien m’a bien aidé : j’ai pris un relais à un tour, il a pris un autre relais. C’est vraiment des courses que j’apprécie parce que j’ai le temps, je ne suis pas à subir. Je suis vraiment acteur. Je sens que je peux faire quelque chose.
J’ai envie de faire ce que je sais faire.
Dans trois semaines, Chaux-Neuve devrait, si l’enneigement le permet, accueillir la coupe du monde, peut-être la dernière pour vous. Comme aborderez-vous ce rendez-vous ?
Avec beaucoup d’enthousiasme et d’envie. Après, il faudra que je sois un peu meilleur que les autres saisons. Je ne parle pas au niveau sportif, mais dans la tête. Je me mettais trop l’objectif “il faut vraiment que je réussisse” et, dans ce cas, ça va un peu moins bien. Je me crispe un peu plus. Là, j’ai envie de savourer, de profiter et de me faire plaisir. J’ai envie de faire ce que je sais faire d’abord, ensuite les résultats viendront. Je n’ai pas envie de me dire “il faut que je fasse un podium”.
Les trois premières étapes de coupe du monde vous ont-elle conforté ou contredit dans votre idée de mettre un terme à votre carrière à l’issue de cette saison ?
C’est vraiment mon état d’esprit au mois de mars-avril qui déterminera. La saison ne fait que commencer. En tout cas, j’ai repris goût à la compétition. Je me fais plaisir sur les skis. C’est une bonne chose. J’ai vraiment hâte que la saison se poursuive pour continuer comme ça. Après, on verra comment se dérouleront les championnats du monde, quelle sera l’envie au printemps prochain. Je ne sais pas encore.
Photos : Agence Zoom