Arnaud Du Pasquier, un nouveau biathlète en Suisse
Depuis de nombreuses semaines, Arnaud Du Pasquier, 31 ans en octobre, avait mis Nordic Magazine dans la confidence : il a décidé de mettre un terme à sa carrière de fondeur longue distance pour devenir biathlète. Au départ des championnats de Suisse carabine dans le dos en fin d’hiver dernier sur un coup de tête et pour reprendre du plaisir après une saison marquée par des handicapantes douleurs dorsales, il y a trouvé son bonheur et a finalement décidé de s’y mettre à 100 %.
Concentré sur la préparation du Dupaski Festival, son événement de rollerski créé en 2022, en parallèle de ses entraînements au sein d’un groupe basé à Lenzerheide (Suisse), Arnaud Du Pasquier s’est finalement décidé, ce dimanche, à révéler médiatiquement la grande nouvelle. Il faut dire que le secret n’allait plus pouvoir rester caché bien longtemps : vendredi prochain, ses grands débuts sont programmés à l’occasion du sprint du Nordic Weekend d’Andermatt (Suisse), championnats de Suisse de biathlon d’été non officiels.
Pour Nordic Magazine, l’Helvète s’est donc largement confié sur les raisons de son changement de sport, peu commun, entre le ski de fond longue distance et le biathlon. L’ancien sociétaire du Team Nordic Expérience évoque également, sans les cacher, ses ambitions (élevées) pour la suite et raconte ses débuts carabine 22 long rifle sur le dos.
Le point de départ : ses douleurs au dos
« L’hiver dernier, j’ai eu des grosses douleurs au dos. A cause de mon hernie discale, j’ai de temps en temps des rechutes. Quand c’est l’été, ça va, je ne broie pas trop de noir et j’adapte l’entraînement. Mais quand cela tombe aux moments proches d’échéances importantes, je me demande ce que je fais là… Il y a des saisons où j’ai pu rattraper le coup sans que personne n’y voit quelque chose, mais malheureusement pas deux de ces trois dernières années. L’hiver qui vient de se terminer, cela me l’a fait au pire des moments, entre Noël et le Nouvel An, et je suis resté cloué au lit pendant trois semaines. Je ne me suis jamais senti en forme de toute la saison dernière. »
Le skating : un effort qu’il adore
« Dans la longue distance, ce qui m’a d’abord poussé à aller sur ce circuit, c’est justement l’aspect longue distance. Je suis convaincu que mon talent n’a jamais été la poussée. J’ai de la peine à mettre du muscle et dans la technique. J’ai donc dû travailler et je suis parvenu à arriver à un niveau assez haut. J’arrive à digérer ce long effort mieux que d’autres, je sais bien réagir sur des longues courses, je sais me comporter intelligemment et j’ai une physiologie qui fait que je tolère tout type de nutrition. J’ai un profil qui se porte vraiment bien vers la longue distance… mais il n’y a plus de circuit en skating, la technique qui me plaît. »
« J’ai donc logiquement basculé complètement vers la poussée avec le TNE, tout en gardant cette idée de faire quelque chose avec le skate. Dans le type d’effort, je pense que c’est la même chose avec du haut seuil et rester dans une zone où on peut encore raisonner et ne pas tout voir trouble. »
Un contexte favorable : « C’est le rêve parce que j’ai une vraie chance d’aller en IBU Cup ou en coupe du monde si je montre que je sais tirer »
« En dehors de la coupe du monde de ski de fond, où il faut un talent au niveau de la VO2 et de l’effort physique presque génétique, l’autre possibilité et moyen pour moi de continuer le skating, c’était de passer au biathlon. Au début, comme ma saison n’avait pas été bonne, j’ai décidé de participer aux championnats de Suisse en fin d’hiver pour le plaisir et voir ce à quoi cela ressemblait. Cela s’est plutôt bien passé au tir couché, surtout sur la mass-start où j’étais dans le bon groupe jusqu’à la mi-course. »
« J’ai compris que, au-delà de mon propre ressenti, on est en ce moment, dans le biathlon en Suisse, dans une période où beaucoup ont arrêté et où il y a peu de monde chez les seniors, mais des quotas plus larges en coupe du monde et IBU Cup. C’est une opportunité rêvée pour moi pour débuter dans le biathlon. Je pense que de tous ceux qui ont fait le switch du ski de fond au biathlon ces cinq dernières années, c’est moi qui tire les meilleures cartes. C’est le rêve parce que j’ai une vraie chance d’aller en IBU Cup ou en coupe du monde si je montre que je sais tirer. »
Une préparation idéale… mais un tir debout difficile à appréhender : « C’est pour cela que le biathlon est un sport si fascinant et beau »
« Depuis que j’ai commencé, cela n’a été que du bonheur parce que cela confirme mes hypothèses. J’ai commencé à tirer sérieusement et, apparemment, je tiens bien le couché, mais il faut que je me fasse au debout ! Ce qui est horrible, c’est que j’ai l’impression de m’y faire et que tout va bien… mais je n’y arrive que sur les baskets, il faut maintenant le faire en ski-roues et à l’effort ! C’est mon plus gros focus avant le Nordic Weekend. C’est beaucoup plus difficile que ce que je pensais, mais c’est pour cela que le biathlon est un sport si fascinant et beau. »
« Je suis excité de voir ce que cela va donner. J’ai très envie ! Au Nordic Weekend, cela fera trois mois que je m’y suis mis à fond et sérieusement… mais il faut retirer les quatre semaines nécessaires à la préparation du Dupaski Festival. Cela fera donc deux mois ! Pendant ce temps-là, j’ai fait beaucoup d’entraînements seul ou avec des plus jeunes, sans pouvoir réellement me mesurer à ce qui sera ma concurrence directe cet hiver. Du coup, je me réjouis de pouvoir enfin avoir l’opportunité de faire des compétitions… en étant un peu plus préparé qu’en fin d’hiver dernier aux championnats de Suisse ! »
Intégré à une structure d’entraînement tenue par la famille de Niklas Hartweg : « Une sorte de comité sous stéroïde »
« Comme je me lance dans quelque chose que je ne connais pas du tout, j’avais besoin et envie d’une structure. Au TNE, en étant Suisse, j’étais un peu le gars à part qui n’était pas souvent là en stage. J’avais donc de nouveau envie de prendre du plaisir au sport et je me suis donnée une année pour cela, en dehors de tout objectif sportif. Pour cela, je voulais me sentir encadré et je suis dans la structure BSO fondée par la famille Hartweg. C’est magnifique ce qu’ils ont fait pour dynamiser le biathlon suisse, tant par leur énergie que financièrement. C’est une sorte de comité sous stéroïde ! On a accès à des infrastructures incroyables à la Roland Arena de Lenzerheide, les mêmes que pour les biathlètes des cadres de Swiss-Ski. Il y a des entraînements cinq jours par semaine, ce qui est génial pour moi, dans un environnement au top. »
« J’ai des jeunes biathlètes comme coéquipiers qui ont entre 16 et 19 ans. Physiquement, je ne suis pas challengé par eux, mais, par contre, c’est parfait au niveau du tir. Cela fait deux, trois saisons qu’ils tirent et sont à un niveau que je peux rattraper. Si je me retrouvais directement en équipe nationale, je pense que la marge aurais été trop grande. En plus, avec ce coach-là [Ilmar Heinicke], c’est top parce que c’est quelqu’un de très patient. »
Ses objectifs : entrer dans les cadres de Swiss-Ski… « à long terme, cela me permettrait de viser des Mondiaux à Lenzerheide à la maison en 2025 puis les Jeux olympiques en 2026 »
« Dans mes objectifs quantitatifs, j’aimerais entrer dans les cadres nationaux [en équipe nationale de Suisse, NDLR] l’année prochaine. A long terme, cela me permettrait de viser des Mondiaux à Lenzerheide à la maison en 2025 puis les Jeux olympiques en 2026. Ce sont des rêves d’enfant qui pourraient se réaliser. Mais cela ne sera possible qu’avec des qualifications dès l’hiver prochain en OPA Cup, mais surtout en IBU Cup. Avant cela, je vais voir sur le sprint du Nordic Weekend où je me situe. Je veux montrer que je suis dans le coup, notamment en étant plus rapide sur les skis. Je sais que je mets plus de temps sur le pas de tir, avec une mise en place moins rapide et un temps plus lent entre deux tirs. Je veux voir comment j’ai progressé avant d’évaluer comment la suite peut se passer avant l’hiver. On ira d’ailleurs sur le Summer Tour d’Arçon en octobre et avant, début septembre, aux championnats d’Allemagne de Ruhpolding. »
« Je me rends compte que j’ai encore envie d’être athlète, c’est ce que j’aime et ce qui me fait vibrer. Je profite, aussi, parce que je sais qu’il y a un risque que ce soit ma dernière année. Je fais tout ce que je peux et même une séance sous la pluie me fait plaisir. »
Une expérience, sans réussite, en tant que biathlète dans ses jeunes années, une carabine prêtée par Gaspard Cuenot
« Dans mon ski club, ils ont voulu engager un entraîneur pour le biathlon quand Aita Gasparin, à 16 ans, a décidé de s’y mettre sérieusement. On s’entendait assez bien avec sa famille et ils m’ont demandé si je voulais essayer. J’ai dit oui et, au final, j’ai fait une saison à deux courses et 20 % au tir… Comme je voulais partir étudier aux Etats-Unis et que je n’étais pas bon, il faut le dire, j’ai laisser le biathlon de côté. Ce qui est marrant, c’est qu’à l’époque, je tirais vraiment mal [rires] ! J’ai donc été d’autant plus surpris de voir cette année que cela s’est bien passée aux championnats suisses. »
« Ma carabine, c’est la même que j’avais aux championnats de Suisse ! Elle est empruntée à Gaspard Cuenot, ancien athlète de l’équipe suisse qui a arrêté il y a plusieurs années [douze départs en coupe du monde, deux top 10 aux Mondiaux jeunes 2010 en individuel, NDLR]. C’est un très bon ami qui est parti étudier aux Etats-Unis. Il est depuis revenu en Suisse et travaille dans le marketing pour Le Gruyère AOP. Il a été super gentil en me prêtant son arme qui est encore en super état. C’est sympa d’avoir un objet avec une forte valeur sentimentale entre les mains ! »
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