BIATHLON – Un socle familial solide, un joli parcours sportif pour intégrer le top mondial du biathlon et quelques escapades dans le Grandvaux de son enfance… Le bonheur de Quentin Fillon-Maillet est fait de choses simples. Portrait d’un homme et d’un sportif méritant.
Et dire que tout gamin, Quentin Fillon-Maillet confectionnait des arcs et des arbalètes avec ses frères et sœurs dans le jardin de la maison familiale de Saint-Laurent-en-Grandvaux (Jura). Déjà prêt à décocher des flèches vers les sommets sans doute… On peut voir dans ce souvenir d’enfance un heureux présage pour celui qui est devenu, à 25 ans, l’un des tous meilleurs biathlètes de la planète. Rencontre avec un champion aussi simple que discret.
Quentin Fillon-Maillet est tombé dans le nordique comme Obélix dans la marmite de potion magique. Sauf qu’en lieu et place du druide Panoramix, ce sont ses parents Hélène et Laurent qui lui ont donné le plaisir de l’effort, le bonheur de faire du sport en extérieur et en famille. « Quentin a toujours aimé ça, se souvient le papa. D’abord le ski alpin qu’on pratiquait régulièrement en famille puis le ski de fond. »
« J’aime être dehors », résume le sociétaire de l’équipe de France de biathlon. Le cadre majestueux et sauvage du Grandvaux, terre de rouliers, ces commerçants voyageurs arpentant les terres de toute l’Europe avec leurs longues charrettes, depuis plus de 500 ans (lire Nordic Magazine #15), invite justement à la contemplation et la découverte.
Sur les skis à l’âge de 4 ans
Sur cette terre perchée à près de 1000 m d’altitude, dans un Jura préservé, sont nées des générations de bûcherons, scieurs, fermiers et amoureux du grand air. Dont de nombreux sportifs ravis de profiter d’un tel décor d’entraînement.
« Sur la piste, c’est un accrocheur de folie quel que ce soit l’athlète qui est devant lui. » (Stéphane Bouthiaux)
Avec une maman fondeuse ancienne vainqueur du Marathon des Cimes, notamment, le jeune homme a de qui tenir. « Mes parents m’ont donné énormément. Ma mère m’a mis sur les patinettes à l’âge de 4 ans pour aller à l’école. C’est vrai que je dois aussi les remercier pour m’avoir légué de telles capacités physiologiques », s’excuse presque l’intéressé.
Comme si son parcours et sa progression, marche après marche, ne devaient pas grand chose à toute son implication et son investissement dans l’entraînement, chaque jour de l’année.
Pas motivée par les médailles et la performance pure, la famille Fillon-Maillet fait d’abord du ski pour le plaisir d’être ensemble et de se profiter du grand air. L’aîné d’une tribu de quatre enfants (trois garçons et une fille) découvre un peu par hasard le biathlon à la télé, pendant les Jeux de Salt Lake 2002. Il a alors 10 ans tout pile… « Ce sport m’avait surpris avec ces skieurs et leur carabine dans le dos. Après coup, une fois devenu athlète, je me suis dit que cette cara’ était en fait l’arc de mon enfance ! »
« Quentin est un athlète qui a énormément de talent et de mérite. Il fait les choses bien. » (Martin Fourcade)
Sa voie est toute tracée. Encadré par son paternel, entraîneur de biathlon au sein du Massif jurassien et du ski-club du Grandvaux, le jeune sportif se construit, pierre après pierre. De ces cailloux dont on fait les solides édifices comme l’église de Grande-Rivière au bord du lac de l’Abbaye. Mais Quentin Fillon-Maillet emprunte, sur les conseils de ses parents, une voie différente de tous ses opposants inscrits en sport-études.
« Quentin a suivi le cursus scolaire normal et ça l’a toujours inquiété, note son paternel. Il craignait de prendre du retard sur la concurrence y compris quand il était au Pôle France et qu’il redescendait suivre les cours de son BTS à Morez alors que les autres partaient s’entraîner. Au final, il a tiré une très grande force de caractère de cette différence. Il a d’ailleurs, comme son oncle, un caractère de cochon parfois », rigole Laurent Fillon-Maillet.
Excellent fondeur et lâche rien !
Excellent fondeur, Quentin affiche aussi une ténacité qui fait l’envie de tout le peloton du circuit mondial. De nombreux surnoms comme le charmant « Morbac » saluent ce côté « lâche rien. » « Sur la piste, c’est un accrocheur de folie quel que ce soit l’athlète qui est devant lui, salue son entraîneur Stéphane Bouthiaux. Il ne sera jamais décroché même sur les jours où il est moins bien. J’ai rarement vu un accrocheur pareil, c’est une énorme qualité chez lui. »
« Quentin est un athlète qui a énormément de talent et de mérite. Il fait les choses bien », appréciait, en connaisseur, le numéro un mondial Martin Fourcade, au lendemain de l’incroyable week-end de Fillon-Maillet à Östersund (Suède), monté deux fois sur le podium.
« Ce qui m’impressionne chez lui, c’est le plaisir de pratiquer et de s’entraîner. Son abnégation et sa volonté font partie intégrante du personnage, note Marie-Pierre Guilbaud, légende du ski jurassien et monitrice de ski dans le Grandvaux. Même tout petit, il ne lâchait rien, il ne baissait jamais les bras. C’est vraiment un exemple pour les enfants aujourd’hui et je veille à ce que les plus jeunes du club puissent côtoyer Quentin de temps en temps sur des entraînements. Lui, Aurore Jean et Léna Arnaud sont la preuve qu’en croyant à ses rêves, on peut réussir. »
Une remarque d’autant plus juste que Quentin a réalisé un projet qui lui paraissait terriblement lointain voilà quelques années. « J’avais ce rêve de devenir sportif de haut-niveau mais quand je regardais les gars de l’équipe de France, ça me paraissait mission impossible, confie-t-il. Désormais, je fais du sport tous les jours, je vis de ma passion et cela n’a pas de prix. Je suis heureux du chemin parcouru. »
Quentin Fillon-Maillet en quelques dates
- 16 août 1992 : naissance à Champagnole
- 18 janvier 2015 : premier podium individuel sur la mass-start de Ruhpolding
- 3 mars 2016 : champion du monde de relais mixte à Oslo
- Novembre 2017 : décroche deux podiums sur l’individuel et la poursuite d’Östersund
- 8 mars 2018 : après des Jeux manqués, il retrouve le podium sur le sprint de Kontiolahti
La suite de ce portrait est à retrouver dans Nordic Magazine #25
Photos : Nordic Magazine et Nordic Focus.