SAUT À SKI – La sauteuse à ski norvégienne Silje Opseth se confie en exclusivité pour Nordic Magazine. Ses larmes de Lillehammer, sa progression express ou la situation du coronavirus en Norvège, elle n’esquive aucun sujet.
Le 10 mars dernier, Silje Opseth est monté sur la plus haute marche du podium du second concours de Lillehammer. Malheureusement pour elle, une erreur dans le calcul des points de Maren Lundby a ensuite été décelée, entraînant la victoire de sa compatriote. Notre entretien exclusif avec la sauteuse de 20 ans vivant à… Lillehammer, débute là-dessus. Avant de dévier sur son hiver en général où elle a énormément progressé puis sur la crise du coronavirus.
- Vous devez vous douter que nous allions commencer par cette question : êtes-vous remise du concours de Lillehammer ?
Oui bien sûr ! Lillehammer est maintenant de l’histoire ancienne. C’était un jour spécial avec beaucoup d’émotions très différentes. Mais, dans l’ensemble, je la considère très belle mais surtout incroyable. Je sais que je ne pouvais rien faire différemment, et, aujourd’hui, ce qui s’est passé me motive beaucoup.

Silje Opseth (NOR) – Modica/NordicFocus
- Expliquez-nous ce qu’il s’est passé entre le saut de Maren Lundby et le moment où on vous a appris que vous n’étiez finalement pas la vainqueure de la compétition…
Eh bien, tout d’abord, j’étais vraiment heureuse et tellement satisfaite de mon concours. Je pensais que c’était ma toute première victoire en coupe du monde ! Après la cérémonie et quelques interviews, nous avons appris que les résultats n’étaient pas bons… C’est difficile de vous expliquer les émotions que j’ai vécues pendant que nous attendions les vrais résultats, mais c’était probablement le moment le plus confus et étrange de ma vie. Heureusement, nous étions là avec toute l’équipe, nous avons parlé de la situation et convenu que, peu importe qui d’entre nous avait gagné, c’était une très bonne performance collective. C’est juste avant de faire la conférence de presse que j’ai appris que je n’avais pas gagné…
« Je ne pouvais plus rien gérer… […] D’où mes larmes »
- C’était terrible pour vous : on vous a vu pleurer…
Je suis une personne très émotive et je ne pouvais plus rien gérer à ce moment-là… Le mélange de tout ce que je ressentais était dans mes larmes. C’est difficile à décrire, mais je me sentais un peu stupide, triste et confuse. Mais j’étais toujours sur le podium et heureuse que Maren [Lundby], et personne d’autre, ait remporté le concours à ma place. Comme j’étais fatiguée et épuisée, toutes les émotions sont plus facilement sorties, d’où mes larmes. C’était une journée vraiment spéciale.
- Votre entraîneur Gjermund Lunder a également versé des larmes…
Oui il a pleuré… Je pense que, concernant les émotions, il me ressemble. Nous avons tous les deux acceptés que les émotions sont des choses que nous ne pouvons pas contrôler. Ses larmes-là montrent que c’est quelque chose [la victoire, ndlr.] pour laquelle nous travaillons dur chaque jour. C’est agréable de voir ce que cela signifie pour lui, car je sais qu’il ressent la même chose que moi. À partir de cette situation, nous pouvons maintenant construire quelque chose pour la suite.
- La FIS s’est-elle excusée ?
Oui ! J’ai eu une explication sur ce qu’il s’est passé [une mauvaise compensation de vent accordée à Maren Lundby, ndlr.] et des excuses dans le train qui nous menaient à Trondheim le lendemain. J’ai vraiment apprécié ce geste et je comprends que des personnes peuvent faire des erreurs.

Silje Opseth (NOR) – Thibaut/NordicFocus
« Ma progression est le fruit de mon travail acharné »
- Plus globalement, vous avez réalisé, à 20 ans, le meilleur hiver de votre carrière en montant sur vos deux premiers podiums : c’était une bonne saison ?
Dans l’ensemble, oui, c’était un super hiver. Je suis contente des progrès que j’ai réalisé depuis la saison dernière et tout au long de l’hiver. Je suis heureuse d’être maintenant assez forte pour monter sur le podium. Savoir que j’étais très proche d’une victoire ne fait que me motiver encore plus. Bien sûr, il y a encore des éléments dont je ne suis pas entièrement satisfaite. Il me reste des choses à améliorer et j’espère que je pourrais les corriger la saison prochaine.
- Qu’est-ce qui explique votre progression ?
Honnêtement, je ne pense pas que quelque chose de spécial ait changé cette année. Je suppose que ma progression est le fruit de mon travail acharné dans une équipe composée d’athlètes s’entraînant durs et d’excellents entraîneurs. Personnellement, j’ai sauté de mieux en mieux au fur et à mesure que l’hiver avançait. En tant que sauteuse à ski, avec un peu plus de confiance, c’est plus facile de performer. C’était mon cas en fin de saison.
- Vous étiez vraiment très forte lors du Raw Air : pourquoi ?
Je pense que j’ai fait des progrès tout au long de la saison, mais les deux dernières semaines d’entraînement avant le Raw Air ont vraiment été bonnes. J’ai réalisé d’excellentes séances sur le tremplin et j’ai senti que j’étais en forme. Toute la saison, j’ai attendu le Raw Air avec impatience : mon objectif était d’y performer. Selon moi, le facteur primordial de ma réussite sur la tournée norvégienne, c’est une bonne connaissance des tremplins, où j’étais en pleine confiance.
« C’est un moment bizarre pour tout le monde mais, ne vous inquiétez pas, je ne m’ennuie pas ! »
- Étiez-vous surprise de vos performances ?
Pour être honnête, oui et non. Vu ma forme, je pensais que j’étais probablement assez forte pour être parmi les trois premiers sur une manche, et peut-être pour monter sur le podium mais seulement si j’avais de la chance. Après mes performances très régulières et ma deuxième place au classement général du Raw Air ont été, pour moi, une surprise.
- Vous devez donc être frustrée que cinq concours aient été annulés à cause de la pandémie de coronavirus ?
C’est vrai… Je voulais que la saison dure encore un peu plus longtemps, comme c’était censé être le cas. Qui ne voudrait pas ça ? Mais, d’un autre côté, je comprends les décisions qui ont été prises et je les soutiens pleinement parce que c’était la bonne chose à faire.

Silje Opseth (NOR) – Reichert/NordicFocus
- D’ailleurs, quelle est la situation actuelle du Covid-19 en Norvège ?
C’est un moment bizarre pour tout le monde… Je suppose que beaucoup de personnes pensent que cette situation est irréelle. Je suis actuellement à la maison avec ma famille et, ensemble, nous essayons de gérer notre nouvelle vie de la meilleure façon possible. Ce qui est bien, c’est que nous sommes obligés de passer plus de temps ensemble, et c’est une bonne nouvelle. D’autant que nous sommes tous en bonne santé. Sinon, j’étudie un peu et j’essaie de trouver des moyens pour m’entraîner. Ne vous inquiétez pas, je ne m’ennuie pas dans ce nouveau quotidien.
Photos : Nordic Focus.
