Déjà vainqueur du petit tremplin, Kamil Stoch s’est envolé, de second, sur le plus grand pour décroché sa seconde couronne olympique. Le Polonais réalise le doublé comme Simon Ammann en 2002 et 2010, et entre dans la légende.
Le baiser est furtif mais emprunt d’une certaine tendresse et surtout d’une gratitude absolue. Kamil Stoch le sait, ses skis qu’il vient d’embrasser l’ont porté par-delà les vents traitres de Sochi et lui ont permis de chevaucher de second ses compatriotes Maciej Kot et Jan Ziobro pour un cérémonial devenu rituel lors des victoires du Polonais. Déjà la semaine dernière, Stoch avait été porté en triomphe par ses partenaires après un concours proche de la perfection sur le petit tremplin. Cette fois, le natif de Zakopane n’a pas survolé la concurrence comme il y était parvenu précédemment mais il a su se jouer des conditions, de la pression exercée par un Noriaki Kasai plus fringant que jamais à 41 ans et d’un vent qui avait décidé de n’en faire qu’à sa tête.
Surprises venteuses
En cette soirée de samedi, Eole était las de voir Helios lui voler la vedette en irradiant les différents sites olympiques de Sochi et de les plonger dans un printemps précoce. Sur le Russki Gorki, le dieu grec du vent a ainsi repris ses droits et imposer sa loi. Tout commençait avec le saut d’essai. Réglage apprécié juste avant le début de la compétition réelle, ce dernier n’allait pas se dérouler comme prévu. Si les premiers sauteurs parvenaient à s’élancer, comme le Français Ronan Lamy-Chappuis, les derniers appelés sur le sautoir allaient se voir signifier de redescendre. En effet, le vent tourbillonnant ne permettait plus de sauter dans de bonnes conditions et contraignaient les organisateurs à avorter le saut d’essai.
C’est donc sans réglages que les meilleurs mondiaux allaient devoir aborder la 1ère manche donnant accès à la finale. Surtout, si cette dernière allait bien avoir lieu, le vent lui n’allait pas faiblir et allait emporter certains des favoris, à commencer par Robert Kranjec maudit sur ses Jeux olympiques. Victime d’une chute lors des qualifications du petit tremplin alors même qu’il était qualifié, le Slovène se blessait à la cheville et devait renoncer. Ce samedi, il était pris dans une bourrasque et retombait trop tôt. La finale venait de lui échapper. Autre victime de l’intraitable Eole, l’Autrichien Thomas Diethart. Quatrième sur le petit tremplin, il était balayé comme une feuille par la brise automnale et disait adieu à la finale (32e), comme Thomas Morgenstern (40e). L’accalmie intervient au passage de Severin Freund. L’Allemand pose un saut monstrueux à 138 m. Un mètre moins loin, toutefois que le vétéran Noriaki Kasai et le contrôleur du ciel polonais Kamil Stoch.
Stoch déploie ses ailes
La finale voyait le vent jouer encore les trouble-fête. Après avoir trop porté les premiers concurrents à l’image du Russe Vassiliev qui battait le record du tremplin à plus de 144 m, l’aire de lancement était descendue. Pas de quoi bouleverser la donne. Si Marinus Kraus, 24e après la 1ère manche, allait occuper la 1ère place durant de longues minutes au point de finir 6e, l’Allemand devait se résoudre à laisser sa place. La victoire ne pouvait échapper au quatuor Prevc-Freund-Kasai-Stoch. La jeune slovène était le premier à se signaler et éjectait Freund moins précis sur sa deuxième tentative. Comme sur le petit tremplin, il s’invitait sur le podium. Le métal serait cette fois en bronze, la faute à Noriaki Kasai. A 41 ans, le vénérable sauteur japonais sortait un gros saut à 133,5 m pour prendre la tête. Ses compatriotes ne s’y trompaient pas et lui sautaient dans les bras à son arrivée.
Mais voilà, plus haut au loin, il restait un homme : le champion olympique du petit tremplin, le leader de la coupe du monde, le Polonais Kamil Stoch. Ce dernier ne tremblait pas, s’élançait, poussait fort, déployait ses skis comme un oiseau déploie ses ailes et retombait avec beaucoup de maîtrise à 132,5 m. Suffisant pour lui assurer la victoire. Comme Simon Ammann en 2002 et 2010, Kamil Stoch réalisait le doublé petit-grand tremplin. L’enfant de Zakopane n’est un simple sauteur, il est devenu à 26 ans un ange. Un ange aux ailes d’or que les vents divins ne peuvent ébranler.
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