Ski de fond : les premiers mots de Baptiste Gros après l’annonce de sa retraite
Plus tôt dans la semaine, le fondeur haut-savoyard Baptiste Gros a annoncé mettre fin à sa carrière de sportif de haut niveau en fin de saison. Pour Nordic Magazine, et avant de participer aux championnats de France des clubs ce week-end à La Bresse (Vosges), il revient sur les raisons de son retrait, son futur et son apport au ski de fond tricolore. Entretien.
- En décembre dernier, vous nous aviez annoncé qu’il s’agirait de votre dernier hiver : comment s’est-il passé et pourquoi avoir décidé d’arrêter ?
A cette époque, j’espérais remonter sur la coupe du monde et avoir un meilleur niveau cette saison avec des possibilités de sélection jusqu’à début janvier. Mais cela ne s’est pas très bien passé et j’ai eu l’opportunité du ski-joëring qui s’est présentée et je suis directement parti sur autre chose avec l’occasion d’aller sur les Mondiaux en Norvège. Comme je n’avais plus d’objectifs en ski de fond, cela m’a permis de rester un minimum focus sur la compétition. J’en reviens seulement et il me reste tout de même une belle fin de saison en ski de fond avec les trois championnats de France à disputer. Je vais en profiter au maximum.
- Vous allez terminer votre carrière dans une belle ambiance…
Généralement, les France, c’est détendu et c’est l’occasion pour tout le monde de courir avec les autres Français. C’est une ambiance assez festive même si c’est de la compétition. C’est chouette.
- Concernant le ski-joëring, on a l’impression que c’est du sérieux : allez-vous continuer cette activité ?
C’est du sérieux sans l’être. Je me rends compte que c’est vraiment un sport de chien. C’est un sport tracté et il faut un chien qui soit de compétition, avec une race et un âge particuliers. C’est un investissement énorme et, moi, je ne me sens pas forcément de faire cela. Par contre, c’est un milieu avec beaucoup de partage où il y a moyen d’aller jouer en France. Le ski-joëring a beaucoup à gagner à se professionnaliser un petit peu pour les athlètes. Aux Mondiaux, je me suis aperçu qu’il y avait moyen d’apporter des choses et cela pourrait m’intéresser pour la suite, même si ce n’est pas encore posé.
- A-t-il été difficile de vous décider à officialiser la fin de votre carrière ?
C’est en voyant tous les autres le faire et en entendant ceux à qui je l’avais déjà dit me demander si je ne repartirais pas sur une nouvelle saison que je me suis dis qu’il fallait le faire. Je commençais aussi à sortir du truc et être moins attiré par la compétition en ski de fond. Au final, j’étais presque content d’avoir eu cette opportunité de break dans l’hiver avec le ski-joëring.
- Pourquoi avez-vous décidé d’arrêter ?
Je suis quelqu’un de très orgueilleux qui a fait de la compétition pour être devant, sentir que je progresse et, là, j’ai tenté de faire toutes les compétitions depuis l’automne et rien n’est allé dans le bon sens. Je n’étais plus là pour jouer devant et c’était trop dur pour moi de continuer.
- Ces derniers jours, le biathlète Simon Desthieux expliquait qu’il avait envie de s’arrêter au bon moment : avez-vous le sentiment d’avoir fait l’année de trop ?
Non, parce qu’il y avait le coronavirus [rires] ! J’aurais peut-être dû arrêter plus tôt, mais je n’étais pas prêt ni mentalement, ni dans ma vie. Il faut anticiper et le coronavirus a fait que je n’avais pas du tout envie d’arrêter là-dessus, sans public. Ce n’était pas une vraie saison de ski de fond et je suis hyper content de pouvoir terminer aux championnats de France ! Arrêter là-dessus me semble beaucoup plus important.
- Que retenez-vous de votre carrière ?
Aujourd’hui, on parle beaucoup des valeurs du sport et du plaisir, mais c’est avant tout la performance qui est retenue. C’est ce qui fait qu’on apprécie les sacrifices effectués et qui donne un sens au haut niveau. Par contre, il y a eu énormément de moments de vie incroyables. J’ai eu la chance de vivre la Team Poneys, peut-être l’équipe la plus unique qui existait au monde dans le ski de fond. On a fait envie à tout le monde. C’était dingue. Finir avec le Haute-Savoie Nordic Team cette année, c’était hyper important parce que j’avais commencé chez les seniors avec eux, dans une ambiance de dingue. Ce sont des moments de vie extraordinaires. C’est assez dur de se rendre compte que je change de place dans cette famille.
- Avoir apporté votre pierre à l’édifice du ski de fond français doit être une immense fierté…
Bien sûr ! J’ai attaqué chez les seniors à une époque où le top 30 en coupe du monde était une performance monstrueuse, alors que c’est normal d’y être, aujourd’hui, pour un Français en sprint. J’ai été dans énormément de passages de cap : premier podium d’un Français en sprint de coupe du monde hors Tour de Ski, enchaînement de podiums, podium commun avec Richard, podiums avec les deux équipes au team sprint, la victoire au Canada. On passait des paliers et cassait des barrières ! Cela avait déjà attaqué avec Roddy [Darragon] et [Cyril] Miranda avant, mais la progression n’était pas aussi régulière. C’était un challenge de dingue parce que le sprint n’avait pas autant sa place que maintenant en équipe de France.
- Jusqu’au globe de cristal de Richard Jouve…
Voir un Français remporter le petit globe du sprint après avoir remporté deux sprints en classique et avoir un Chanavat monstrueux également… C’est extraordinaire ! On a deux tricolores qui pèsent dans le game avec de la densité derrière ! On a tout pour préparer l’avenir sereinement et faire basculer le ski de fond en mode biathlon. C’est ce qu’il pourrait nous arriver de mieux.
- Justement, comment avez-vous vécu la désillusion des sprinteurs lors des Jeux olympiques de Pékin 2022 ?
Si vous voulez que vous dise que j’ai pleuré, la réponse est oui… C’était super dur. Pour m’être entraîné avec eux et avoir observé leur progression, ce sont des mecs qui sacrifient tout pour y arriver. Là où c’est dur, c’est qu’ils sont à des énormes niveaux d’investissement dans leur carrière en prenant sur leurs vies personnelles. Ils ont laissé tellement de choses de côté… Et ce jour-là, ils n’arrivent pas à sortir la performance réalisée le reste de la saison… c’est hyper dur ! Le jour où cela claquera une médaille internationale sur le sprint, cela va être marteau [rires] !
- Voulez-vous devenir coach pour transmettre toute cette expérience et ce vécu dans le futur ?
Complètement. Quand je dis que j’aimerais transmettre, il y a de cela. Je pense que cela va demander un certain temps et dépendra des opportunités. Je suis actuellement en train de me former dans le but de ne pas uniquement me baser sur mon expérience d’ancien athlète.
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