Ski de fond : « Gégé » est de retour
Une fois l’aller-retour effectué jusqu’à Genève pour aller chercher ses nouveaux skis, Gérard Agnellet, de retour dans son fief des Aravis de La Clusaz, prend quelques minutes pour revenir sur son voyage en Suède et ses retrouvailles avec la coupe du monde à Falun.
Imaginez-vous autour d’une table, avec un bon copain mais jamais bien loin du reblochon pour « Gégé », qui travaille également dans la ferme familiale. Entretien avec l’un des piliers de la Team Bélier qui a, pour la deuxième fois, enfilé un dossard en coupe du monde.
- Ce retour en coupe du monde Gérard Agnellet, vous l’avez attendu et il est arrivé. Que ressentez-vous après ce deuxième départ dans l’élite du ski de fond mondial ?
Je suis super content et surpris d’être remonté en coupe du monde cette année par rapport à la situation à laquelle j’étais confrontée. Pendant le premier confinement, je n’ai pas pu m’entraîner car je n’ai pas le statut d’athlète de haut niveau et j’ai plus de 25 ans. C’était donc génial de retrouver la coupe du monde qui été ma plus belle émotion lorsque je l’avais faite à La Clusaz en 2016.
- Comment avez-vous appris la superbe nouvelle de votre sélection ?
Après la course de La Clusaz, Olivier Michaud [directeur du ski de fond, ndlr.] et Alexandre Rousselet [entraîneur de l’équipe de France des distanceurs, ndlr.] sont venus me voir. Ils m’ont dit de faire un test PCR pour le lundi pour être réserviste. Puis Jules Lapierre a été testé positif. On a attendu le mardi pour avoir le résultat de mon test que j’ai directement envoyé une fois reçu. Ils m’ont donc appelé pour me dire que j’allais à Falun.
J’étais très content. Au téléphone, j’étais normal mais dès que j’ai eu raccroché, j’étais évidemment content. Quatre jours avant, je ne savais pas si j’allais pouvoir mettre un dossard de l’hiver, et là j’allais me retrouver en coupe du monde.
- Une place acquise à La Clusaz grâce à votre belle deuxième place sur l’individuel skate…
Je ne savais même pas qu’il y avait des sélections sur la course en skate à La Clusaz. Sur le sprint, je savais en revanche qu’il y en avait. J’avais la chance de pouvoir courir les deux. Je suis vraiment « une chèvre » (sic.) en sprint classique, mais j’ai pu faire les deux. J’étais très loin, mais trop content de courir. Le lendemain, sur l’individuel skate, je n’ai jamais pensé aux résultats et à une sélection. Il y avait même une chance que je me retrouve à cinq minutes d’Hugo [Lapalus] et de Clément [Parisse], je n’avais aucune indication sur ma forme.
J’étais renseigné pendant la course, je sentais que j’avais des bonnes jambes. Et puis j’ai rattrapé Théo Schely, Arnaud Chautemps et Renaud Jay. On me disait que j’étais dans les meilleurs temps, donc j’ai continué… et voilà.
- À Falun, vous terminez 48e de l’individuel skate. Vous avez annoncé sur les réseaux sociaux être déçu de votre course. Est-ce toujours le cas ?
Je suis déçu de ma course et du résultat. Je me suis mis une énorme pression et je pense que j’ai un peu perdu mes moyens. J’ai dû dormir une heure et demi, j’ai à peine mangé le matin, juste un œuf. Et puis il faisait froid en Suède et j’avais déjà hyper froid dès l’échauffement. Je suis déçu de cela car, à La Clusaz, je mets 25 secondes à Hugo [Lapalus], qui n’était peut-être pas au top mais tout de même, et là, je prends 1 minute 10. Il y avait mieux à faire. J’ai envie de retourner m’entraîner. Je suis plutôt en confiance pour la suite.
- Et puis vous avez voyagé en Suède avec vos potes de La Clusaz Hugo Lapalus et Théo Schely. L’ambiance devait être sympathique dans le groupe France.
C’était génial de partir à trois du même club, on s’entraîne souvent ensemble. On ne se serait pas cru en coupe du monde mais plutôt sur un Samse ou une coupe d’Europe. Heureusement qu’il y avait Jean-Marc [Gaillard] pour nous rappeler qu’on était en coupe du monde. Dommage qu’il n’y ait pas eu Clément [Parisse] et Maurice [Manificat], ça aurait été génial et j’ai été très déçu pour eux.
- Qu’est-ce que ça fait de retrouver un tel circuit mais surtout dans de telles conditions sanitaires ? Expliquez-nous comment ça se passe.
Sur la coupe du monde, il y a pas mal de choses qui changent. On est dans des hôtels et on ne fait pas nos skis par exemple. Sinon, cette année, on sait à quoi s’attendre un peu. On a fait quatre tests PCR et antigéniques dans la semaine. On avait le masque partout, des gants pour manger et quatre maximum par table. J’ai même bouclé un dossier pour la FIS et je devais mettre, pour les quinze jours avant Falun, où j’avais dormi, etc. Mais je m’attendais un peu à ça.
J’aurais bien aimé quand même qu’il y ait du monde, ça aurait été incroyable. J’ai regardé, en y allant, les vidéos des courses lors des championnats du monde en 2015, c’était fou. C’est ce public qui manque et « qui fait que », mais c’est comme ça.
- Concernant votre futur, votre retour en coupe du monde vous change-t-elle les idées quant à vos ambitions de performer sur les longues distances ?
Les longues distances sont toutes annulées cet hiver. Il n’y aura pas, je pense, de courses en France. Mon meilleur souvenir c’était la coupe du monde de La Clusaz et j’avais envie de revivre ce genre d’émotions. Falun c’était génial quand même et je me dis que l’an prochain, ça repartira quand même normalement. Il y aura les Jeux olympiques et la coupe du monde de Prémanon alors si je repars, c’est pour ça. Si je n’ai plus l’envie alors j’arrêterais.
- La saison des longues distance françaises a largement été bousculée pour ne pas dire annulée. Vous qui visiez déjà la Transjurassienne l’année dernière, il faudra encore attendre pour soulever la cloche. Quels sont donc vos objectifs à court et moyen terme ?
Ce printemps, j’étais reparti dans l’objectif de gagner la Transju’. L’an passé, c’était déjà annulé et là, deux années de suite. J’étais forcément déçu. Mais au moment où ça a été annoncé, tous les marathons étaient annulés donc je ne voyais pas comment maintenir l’événement normal. Je m’y attendais, mais je suis vraiment déçu car deux années de suite, c’est dur.
J’ai peur pour l’avenir car j’espère que l’organisation va tenir, que la course aura toujours lieu. J’adore m’entraîner mais je préfère courir, avoir ce petit stress de la compétition, les adversaires, les stratégies de course, faire ses skis… Les courses virtuelles ne m’intéressent pas pour ça…
- Crise sanitaire oblige, les courses sont moins nombreuses et la situation spéciale. Est-ce que faire partie d’une équipe vous aurait pu vous aider notamment pour la motivation ?
Je m’en sors très bien tout seul dans le sens où j’ai vu que j’avais toujours le niveau. Je m’entraîne depuis sept ans pour être en coupe du monde. Alors oui, ça m’aurait aidé dans le sens où, si je n’avais pas été en coupe du monde, j’aurais peut-être fait la Visma. Après, si j’étais dans un team qui ne joue pas la Visma ça n’aurait fait qu’une ou deux longues avec la Toblach-Cortina par exemple.
En entraînement, mes deux dernières années sont celles où j’ai fait le plus d’heures. Tout mon programme, je l’ai respecté à la lettre. Quand on est dans un groupe, il y a toujours quelqu’un pour nous dire d’aller nous entraîner. Mais là, il n’y a personne pour me le dire et je n’en ai jamais loupé un.
Cet été je n’ai fait aucun stage, je voulais aller à Tignes, mais le confinement est tombé. Je suis très solitaire dans la vie donc ça ne m’a pas dérangé. On verra pour l’année prochaine si je retourne dans une équipe. Après, mon coach du ski-club de La Clusaz Fabien Fournier m’aide au niveau de la musculation et des « intenses ». Il me permet d’aller chercher plus loin et de me guider parfois.
- Que peut-on vous souhaiter Gérard pour cet hiver ? Remettre un dossard en coupe du monde ?
Oui, ce serait génial d’y aller une nouvelle fois. Il reste Nove Mesto, mais ça va être compliqué. Je pense aussi au 50 km d’Oslo qui me fait vraiment rêver depuis des années, c’est celle que je voudrais faire un jour. Après, je ne vais pas me mettre d’objectifs car ce n’est pas comme ça que ça marche pour moi. J’espère déjà remettre au moins un dossard.
Photos : Nordic Focus Photo Agency, Jolypics et Nordic Magazine.