Ski de fond : une non sélection aux Mondiaux qui a acté la décision de Renaud Jay
Le 17 mars dernier, à Lahti (Finlande) et à l’aube des ultimes compétitions de la saison sur la coupe du monde de ski de fond, Renaud Jay annonçait sur les réseaux sociaux qu’il mettait un terme à sa carrière à l’issue de cet exercice 2024/2025. Une décision prise au cours de l’hiver et qui s’est définitivement actée lorsque le Savoyard n’a pas été retenu pour participer aux championnats du monde de Trondheim (Norvège).

Pour Nordic Magazine, le fondeur de 33 ans, qui dispute actuellement le Tournoi des Douanes en Italie, a accepté de se confier sur toutes les raisons qui l’ont poussé à dire stop. Entretien.
Une vision saison après saison
« Quand je suis reparti sur la préparation l’été dernier, j’étais vraiment motivé avec l’objectif de Trondheim. Je savais que ça allait être des beaux Mondiaux. D’ailleurs, ça s’est confirmé. En plus, c’était sur une piste qu’on avait pu découvrir l’an dernier en coupe du monde et ça s’était bien passé pour moi. J’aimais bien le profil. On y est aussi allé cet été en stage. On a travaillé dessus et j’aimais vraiment ce genre de piste. »
« Tout ça en sachant qu’avec les Jeux olympiques de l’année prochaine et le sprint classique, mes saisons allaient se compter. Je ne me projetais pas forcément sur la saison d’après mais je ne mettais pas non plus de limites. Mais en tout cas, je suis vraiment reparti à fond en jouant cet objectif-là. »
« À chaque stage, à chaque endroit où on avait l’habitude d’aller, je me disais qu’il fallait que j’en profite car c’était peut-être la dernière fois que j’y venais »Renaud Jay à Nordic Magazine
« À chaque stage, à chaque endroit où on avait l’habitude d’aller, je me disais qu’il fallait que j’en profite car c’était peut-être la dernière fois que j’y venais. J’ai vraiment essayé de prendre le truc comme ça. J’ai essayé de vraiment être encore plus professionnel que ce que j’avais pu être dans le passé en essayant d’aligner tout ce que j’avais pu essayer et que j’avais trouvé qui marchait. J’ai peut-être aussi rajouté des choses qui ont fait que je ne suis pas bien rentré dans la saison en novembre. J’ai voulu essayer quelque chose de nouveau. Et je pense que ça ne m’a pas aidé pour commencer l’hiver. Et on sait qu’une fois qu’on ne rentre pas bien dans la saison, surtout en étant sprinteur, nous ne sommes pas sur le Tour de Ski et ça fait déjà un gros trou dans la saison. »

« Sur le Tour de Ski, c’est souvent le moment où, si on a bien attaqué la saison, ce sont des sprints où on peut aller chercher des gros résultats et plus ou moins sécuriser le reste de la saison et les gros événements. Malheureusement, je n’y étais pas et ça a fait quasiment cinq semaines sans compétition sans compter l’étape de Davos. »
« Et malgré mon début de saison moyen, je suis revenu bien en forme à Davos. Mais je n’ai juste pas eu trop de réussite parce qu’on a attaqué par un team sprint où je me sentais vraiment bien et je suis ensuite tombé malade dans la nuit. Finalement, c’est un peu à l’image de mon hiver. Il me manquait quelques dixièmes pour me qualifier et m’ouvrir le tournoi. »
Un retour en forme à domicile pour espérer
« Là, ça a été un peu dur à encaisser car il y avait cinq semaines à attendre avant les courses des Rousses. Les Rousses, c’est spécial parce que maintenant, j’habite dans le Jura. Ma femme travaille pour l’organisation et j’étais vraiment motivé. J’ai pu vraiment bien travailler et préparer mon truc en réalisant beaucoup d’intensité sur la piste des Tuffes. J’ai réussi à faire une quatorzième place en sprint classique et ça fait partie de mes meilleurs résultats dans ce style. J’ai réussi à montrer que je pouvais encore être dans le coup et cela m’a relancé sur la suite de la saison. »

« Dès le week-end suivant, sur ce qui était un peu la dernière chance pour me sélectionner aux Mondiaux, j’arrive sur le sprint en Engadine où je me sentais bien. Malheureusement, il y avait des rafales de vent. Il se trouve qu’avec Jules Chappaz, on a eu des conditions qui n’étaient vraiment pas très bonnes et surtout sur la fin. Dans le final, on se prend une énorme rafale et ça nous fait rater la qualification encore pour une histoire de dixièmes. »
« Pour moi, c’était un peu la fin de cet espoir de pouvoir me sélectionner. Après, je suis allé à Cogne car j’avais prévu d’enchaîner. C’était vraiment une semaine difficile de rester à Cogne avec les autres sachant que je n’allais plus être sur la suite de la saison pour les Mondiaux. Une fois que je suis rentré de Cogne, ça a été très dur. Je me suis beaucoup remis en question. Ça a confirmé aussi que je n’avais plus vraiment de retour par rapport à l’investissement que j’y mettais. Je n’étais pas au niveau où j’espérais être et je n’étais surtout pas au niveau pour lequel je m’entraîne. »
« J’ai bientôt 34 ans et je ne m’entraîne plus pour juste passer des qualifications »Renaud Jay à Nordic Magazine
« J’ai bientôt 34 ans et je ne m’entraîne plus pour juste passer des qualifications et faire un coup 15e et un coup 25e. Ce n’est plus ce qui me faisait me lever tous les matins et surtout ce qui me faisait partir de la maison aussi souvent. Même quand on est à la maison, nous y sommes sans y être vraiment avec toutes les séances d’entraînement. J’adore la compétition et surtout le sprint mais je ne suis plus assez performant pour l’investissement que je mets et les sacrifices que ça demande pour moi, mais aussi pour ma famille. »
Une fin de saison réussie en Finlande
« Donc j’ai pris cette décision d’arrêter en sachant que ce n’est pas facile et ça a été dur. De Cogne jusqu’à la fin de saison, ça a été vraiment très dur. J’ai essayé de me faire plaisir sur des longues distances. J’ai réussi à voir que j’étais dans le coup aussi. Mais autant à La Transju’ et à l’Engadine, j’ai eu des bris de canne dans les derniers kilomètres alors que je pouvais jouer la gagne. Cela a été encore des choses un peu dures à accepter. »

« Mais je n’ai pas de regrets parce que j’ai tout fait, même sur ces longues distances. J’ai tout fait pour les préparer au mieux parce que j’ai eu le temps de les préparer. Ça a marché parce que j’étais en forme, mais ça ne s’est pas concrétisé sur le résultat. C’est plein de choses qui, au final, résument un peu aussi ma carrière. C’est souvent de ma faute, mais il y a aussi parfois de la malchance. J’ai eu pas mal de petits pépins, que ce soit des bris de matériel ou des chutes. »
« J’ai bouclé la boucle. J’ai montré de belles choses sur la fin de saison où l’on m’a fait confiance pour les derniers sprints skates à Tallinn et Lahti. J’ai prouvé que j’étais encore dans le coup e ça, c’était important pour moi aussi de me prouver à moi que je n’avais pas fait encore tout ça pour rien. Je me prouvais aussi que j’étais encore capable de jouer et de montrer aux petits jeunes que j’étais encore là, même si c’était pour les dernières [Rires]. J’ai eu une super surprise par l’équipe à Lahti avec ma famille, tous les techniciens et tout le staff qui étaient là. Cela ne pouvait pas mieux se finir. »

« Cela n’a en rien changé ma décision. Avant cette saison, la seule chose qui pouvait me tenir pour continuer, c’était de faire ce que j’avais fait il y a deux ans, où j’avais joué beaucoup de finales, des demi-finales, et ça m’avait classé dans les top 10 au classement général de la coupe du monde. C’est la seule chose qui aurait pu me tenir et faire que je reparte sur un an. C’est vrai que c’est quand même très long entre le mois d’avril et la saison. C’est très long et je ne fais pas partie des gens qui ont le plus de talent. Et si je ne fais pas tout ce qu’il faut, je ne serai pas performant. »
« Pour moi, il n’y avait pas beaucoup de choses qui pouvaient me faire changer d’avis et surtout après l’échec des Mondiaux »Renaud Jay à Nordic Magazine
« Pour moi, il n’y avait pas beaucoup de choses qui pouvaient me faire changer d’avis et surtout après l’échec des Mondiaux. Ce serait encore mieux si je terminais sur un très bon résultat, mais je suis déjà content de ce que j’ai fait et des moments que j’ai pu passer sur cette fin de saison. »
« J’ai eu le temps de réfléchir à mon arrêt de carrière et ça a été très dur au mois de février. Et là, en fait, je suis plus un peu comme chaque hiver. De toute façon, c’est une période aussi où on déconnecte un peu de tout ça, du milieu, des copains du ski et on profite d’être à la maison sans contrainte d’entraînement et sans contrainte de stage. Donc pour l’instant, je ne vois pas la différence entre les saisons d’avant. Je pense que ce sera bizarre dans un mois quand je verrai les autres qui retournent à l’entraînement ou en stage et que moi, je serai chez moi. »

« Je me suis lancé dans le BE2 pour le ski de fond. Je pense que ce n’est pas plus mal que ça enchaîne. Comme ça, je n’ai pas trop le temps non plus trop de ruminer. Et après, je vais voir dans les prochaines semaines, les prochains mois, ce que je vais pouvoir faire pour cette deuxième vie. Je ne m’inquiète pas encore trop pour ça. Je pense qu’il y aura quand même un contre-coup qui va arriver, mais je vais aussi profiter pour faire autre chose, partir en vacances, retourner faire des choses que je m’interdisais de faire, comme aller jouer au foot avec les copains. Ça va dépendre un peu de ce qui va se décider pour moi dans les prochaines semaines professionnellement parlant. »
Le Tournoi des Douanes comme dernière compétition officielle
« J’ai aussi la chance d’être encore en contrat avec les Douanes jusqu’à la fin du mois de juin donc je ne suis pas dans l’urgence. J’échange avec des personnes. Pour l’instant, il n’y a encore rien de concret qui se dessine, mais j’ai des pistes. Donc, je vais prendre le temps d’y réfléchir et aussi de digérer cet arrêt parce que je pense qu’en ce moment, ça va, mais peut-être que dans une ou deux semaines, ça sera différent. C’est important quand même de faire un pause avant de se relancer dans un projet. Je m’orienterai plutôt sur la fin du printemps. »
« Le Tournoi des Douanes, c’est sympa car nous n’avons pas non plus beaucoup de moments dans l’année où on peut rendre la pareille à l’administration des Douanes. Il y a toute une partie officielle où il y a des cérémonies d’ouverture et de clôture en costume. C’est assez sympa et marrant. Cela permet aussi de voir des athlètes d’autres disciplines car on ne se croise jamais. »

« Côté sportif, ça fait deux semaines que je suis un peu malade. Je n’ai pas pu faire de sport depuis plusieurs jours donc la première course était un peu dur. Mais c’est le cas pour tout le monde car en France, on a peu de sites qui sont restés ouverts pour skier. Mais cela nous a fait du bien pour nous décrasser. En plus de tout ça, nous sommes quand même à 1 800 mètres d’altitude donc une forme moins bonne ne pardonne pas. Mais nous sommes surtout là pour passer du moment avec les gens des Douanes. »
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