Ski de fond : Maurice Manificat vise le haut du panier
Maurice Manificat est un indéboulonnable, un inébranlable et un irréductible représentant tricolore sur la planète ski de fond depuis plus de dix ans. Avant d’entamer les championnats du monde à Oberstdorf, le vice-champion du monde du 15 km libre à Falun veut grimper une place de plus. Il a répondu aux questions de Nordic Magazine en exclusivité.
- Oberstdorf arrive. Le moment que tout le monde attend depuis le Tour de Ski. Quelles seront vos ambitions, vos objectifs Maurice Manificat ?
Forcément le 15 km skate et peut-être trois jours avant, le skiathlon. J’ai déjà performé dessus aussi. Rien n’est finalisé quant aux courses auxquelles je vais participer pour le moment. Evidemment, il y aura aussi le relais. Depuis 2014, on a quelque chose qui fait que notre équipe ramène des médailles. On arrive à construite notre relais et ça fonctionne quasiment à chaque fois.
Je ne ferai pas le sprint ni le team sprint, ce seront les trois courses auxquelles je devrais prendre part. L’objectif, c’est l’or sur le 15 km skate. Après il faut évidemment composer avec la forme du moment et les adversaires. Il faut que tout aille dans le bon sens, le bon jour. Rien n’est écrit.
En 2019 j’avais été malade, j’avais chopé la grippe. La seule course que j’ai courue c’était le relais mais on avait obtenu la médaille. Cette année, ce sera le même principe. Il faudra en ramener plus ou alors d’un autre métal. J’ai 34 ans, un âge où ça se fait pas comme ça. Le début de saison montre que je suis de nouveau là et que je fais partie des meilleurs.
- Votre performance extraordinaire sur le Tour de Ski doit vous donner des ailes et de gros espoirs pour cette échéance mondiale…
Je n’ai pas pu courir à Falun et on n’a pas beaucoup couru depuis. Je ne sais pas si les sensations du Tour de Ski sont encore là. Généralement quand il y a de bonnes performances dans une saison, on sait qu’on peut les refaire. Cela débloque des barrières.
Quoiqu’il arrive en tout cas, je n’ai rien à perdre et ça, ça me libère de la pression. Avec cette période sans compétition à haut-niveau, rien n’est fait donc on a continué le travail avec une période de volume en stage à Prémanon.
- Vous n’avez pas pu vous rendre à Falun à cause d’un test positif. Ce qui vous a bien enragé. Le tout ajouté à l’annulation de Nove Mesto, vous devez être surmotivé pour courir ces prochains jours ?
J’étais bien déçu, anéanti, ça m’a coupé l’envie. Ce n’était pas génial comme période. L’envie revient gentiment. De s’être vus en stage avec les copains, ça fait du bien. Forcément, le retour à Nove Mesto aurait fait du bien de remettre un dossard. J’ai besoin de ça pour me nourrir.
Cela aurait été l’occasion de remettre le couteau entre les dents et se familiariser avec le combat à venir. Mais bon, cette saison, nous sommes en adaptation constante.
- Que pouvez-vous nous dire sur la piste d’Oberstdorf ? Est-ce une piste qui peut vous convenir ?
C’est un site particulier, pas trop en altitude à peu près à 800 m. C’est un stade que je connais bien car en coupe continentale on y allait souvent, il y avait beaucoup d’organisations de courses dont le Tour de Ski notamment. Il y a eu des remaniements de piste mais ça reste quasiment la même.
C’est globalement plat mais il y a de gros talus. Ce sont de bonnes pistes de championnats. Des pistes larges, un cadre magnifique mais très dur. C’est aussi spécial car il n’y a pas de transition, il faut pouvoir être tacticien, aussi savoir doser son effort et garder les watts pour les lâcher là où il le faut.
J’ai déjà passé de bons moments là-bas et j’ai de l’affectif avec ce site. On est en Bavière, c’est une bonne région et on y mange bien. On aura notre cuisto il faudra faire attention à ça ! (rires)
- Le groupe des distanceurs renvoie une image de bonne humeur et de bonne ambiance dans le groupe. Imaginaire ou réalité ?
Oui c’est d’ailleurs ce qui fait la particularité de l’équipe. Equilibre. On prend plaisir à s’entraîner ensemble mais sans se chamailler. On se tire la bourre entre nous et on en rit. On passe trois semaines par mois ensemble, c’est la seconde famille. C’est toujours la bonne ambiance dans le groupe.
J’ai toujours connu ça déjà à l’époque où je suis arrivé, celle de Vincent Vittoz. On sait être sérieux quand il faut. Ça contribue aux bonnes performances de groupe. On est une équipe intergénérationnelle. Il y a Jean-Marc le doyen, moi je suis intermédiaire, Adrien commence à l’être. Hugo [Lapalus] a 11 ans de moins que moi. Ça fait bizarre mais c’est aussi ce qui fait notre force.
- Hugo Lapalus, justement, a été champion du monde U23 il y a quelques jours. Qu’avez-vous à dire sur la performance de votre jeune collègue ?
On a suivi ça. On suivait la course en live. Ça gueulait dans tous les sens. De toute manière on le sentait bien. Il a le maillot vert du meilleur U23 sur la coupe du monde. Sur le papier il était favori et ça fait du bien. En 2009 j’avais été champion du monde sur le même format. En plus il claque des top 20 en coupe du monde il a une belle constance. Ce titre U23 qui a de la valeur maintenant ça fait du bien. On est contents, ça revigore.
- Quels seront, selon vous, les adversaires les plus dangereux à suivre ?
Les nations principales seront la Norvège et la Russie évidemment. Ils ont une densité d’athlètes très forts. Il y a Sjur Roethe chez les Norvégiens je le connais très bien, nous avons le même équipementier et je sais comment il coure aussi. Mais je les connais à peu près tous. Simen Hegstad Krueger et Hans Christer Holund seront des gros poissons. Sur le skiathlon il y aura Emil Iversen qui est hyper polyvalent.
Sur la période des mondiaux, ce vont être ces noms-là. Après il y a Alexander Bolshunov, la bête noire en ce moment, Sergey Ustiugov qui revient bien après une blessure au dos. Il est assez fort, motivé et peut claquer des grosses courses. Je peux citer aussi Denis Spitsov qui a gagné l’Alpe Cermis. Ils ont des points faibles et il faudra aussi compter sur un mauvais jour.
Les jeunes Américains retrouvent une jeune équipe pas mal également. Mais nous on a Clément [Parisse] qui fait de belles choses et qui marche fort. Hugo qui va peut-être tirer sa carte du jeu aussi.
Tout le monde se prépare spécifiquement pour le championnat donc on peut avoir des surprises. Il y a les favoris qui sont des dangers permanents et un athlète qui peut sortir de nulle part.
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Photos : Nordic Focus Photo Agency