Ski de fond : les héros de Whistler racontent leur titre mondial à Nordic Magazine
Samedi soir, quatre tricolores ont fait rêver la France du ski de fond depuis les pistes du parc olympique de Whistler (Canada), situé dans la vallée de Callaghan. Eve-Ondine Duchaufour, Julien Arnaud, Julie Pierrel et Gaspard Rousset sont effectivement devenus champions du monde U23 du relais mixte au nez et à la barbe des Allemands, Suédois, Norvégiens, carrément boutés hors du podium, Suisses, Canadiens, Italiens ou Américains.
Une performance majuscule, largement relayée sur les réseaux sociaux par la grande famille du ski de fond hexagonal, notamment permise dans une volonté de fer de marquer l’histoire. « Tout le monde était en mission pour sortir une grosse performance individuelle qui donne un résultat collectif incroyable, explique Mathias Wibault, l’un des entraîneurs du quatuor doré, à Nordic Magazine. J’ai toujours cru en notre relais. C’est magnifique et historique. »
Pourtant pas favoris au départ de la course, les Bleus ont donc abordé ce dernier rendez-vous de la semaine canadienne avec énormément d’envie, mais aussi du doute. Mathias Wibault reprend : « On était hyper indécis sur le choix du matériel pour la partie classique entre farter les skis ou être à la râpe, mais on a fait le bon choix. »
Dans le premier relais, Eve-Ondine Duchaufour était effectivement, sans le savoir, une des deux seules fondeuses fartées ! « L’accroche était bonne, j’avais de bons skis et je me sentais vraiment bien », indique-t-elle. De quoi vite rassurer les coachs placés tout au long du tracé.
« Je me suis satellisé et je voyais noir au bout de 2 kilomètres »
Après le passage de la Jurassienne, la Française était certes lâchée de la tête, alors occupée par l’Allemagne et la Norvège, mais à distance respectable. Un écart, de l’ordre de la quinzaine de secondes, que le Haut-Alpin Julien Arnaud, porté par ce qu’il appelle un « supplément d’âme », allait très vite réduire en rentrant sur le groupe pour la troisième place.
« Je me suis satellisé et je voyais noir au bout de 2 kilomètres », se souvient-il. Décroché de la Suède après la première bosse du dernier tour, Julien Arnaud lâchait ses dernières forces pour passer le relais, à mi-course, à moins de 20 secondes de la tête, en compagnie de l’Allemagne.
« Grâce aux beaux relais d’Eve-Ondine [Duchaufour] et de Julien [Arnaud], j’ai pu partir en compagnie d’Helen Hoffmann, championne du monde en skate la veille », raconte la Bornandine Julie Pierrel, troisième larronne. Restant dans les skis de l’Allemande pendant un tour, elle revenait ensuite sur la tête de la course sous l’impulsion d’une accélération de la Suissesse Anja Weber, impressionnante.
« J’ai ensuite posé le cerveau en donnant 200 % de ce que j’avais. J’ai même doublé la Norvégienne Margrethe Bergane qui a un niveau de fou. Je me suis dit qu’avoir de l’avance sur la Norvège était super pour Gaspard [Rousset] », lance la Haut-Savoyard.
Un finish légendaire de Gaspard Rousset
Ce dernier relais appartient d’ores et déjà à l’histoire du ski de fond français. « On savait que Gaspard [Rousset] était un super relayeur pour conclure, et il a totalement fait le job », estime Mathias Wibault.
Le Féclazien raconte les derniers kilomètres, une bataille rangée menée face à six autres nations. « Je fais le premier tour à l’économie en fin de groupe pour garder le maximum d’énergie au bouclage. Avant l’arrivée au stade, l’Allemand et l’Italien chutent, mais j’étais assez loin derrière pour pouvoir les esquiver. C’est à ce moment-là que le Norvégien [Martin Kirkeberg Moerk] a décidé de durcir la course, mais pas suffisamment pour lui permettre de creuser l’écart », se rappelle le fondeur à la moustache.
« Sur la fin de parcours, il fallait vraiment être bien placé pour ne pas se faire surprendre pour l’emballage final. Du coup, j’ai décidé d’attaquer avant les autres pour être en tête de groupe et pouvoir contrôler par l’avant dans la ligne droite finale. Au sommet de la dernière bosse, je n’ai pas osé me retourner pour voir qui était encore dans mes skis, mais ouf finish à 2. J’avais l’avantage d’être devant pour la ligne droite et en serrant les dents jusqu’au bout cela l’a fait ! »
Des ultimes mètres que ses coéquipiers ont vécu avec intensité : « Il nous a fait rêver », pour Julie Pierrel ; « C’était fou », selon Eve-Ondine Duchafour, qui est également sa petite amie ; « J’ai vois ce fou arriver en tête et j’ai eu les frissons, c’était incroyable », se remémore Julien Arnaud.
Les olympiens de 2010 vengés
Dans l’aire d’arrivée, les nouveau champions du monde U23 du relais mixte de ski de fond pouvaient s’enlacer et fêter cette grande victoire avec les coachs, les techniciens ou encore les copains non retenus pour cette course.
« Le relais, c’est l’âme des Français, estime Gaspard Rousset. Le ski de fond est un sport individuel qui se pratique en famille et cela fait notre force. C’était nous quatre sur la piste, mais on l’a fait pour cette belle équipe qui était sur le bord de piste pour nous encourager et sur le pied de guerre le matin pour aider au test des skis. C’est aussi une belle revanche pour Manu Jonnier, quatrième en relais lors des JO de 2010 au même endroit [et présent dans le staff]. »
Plus de vingt-quatre heures après leur exploit, Eve-Ondine Duchaufour, Julie Pierrel, Julien Arnaud et Gaspard Rousset sont unanimes : « On ne réalise toujours pas », lancent-ils en cœur. Les fans devant leur téléviseur un samedi soir de février, eux, ont vite réalisé qu’ils étaient entrés dans la légende du ski de fond tricolore. Par la (très) grande porte.
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