Ski nordique : quatre médailles pour Emmanuel Gastaud aux Jeux mondiaux d’hiver des transplantés
Du 3 au 10 mars dernier, à quarante-trois ans, Emmanuel Gastaud, double transplanté rénal et futur porteur de la flamme olympique de Paris 2024, a remporté quatre médailles lors des Jeux mondiaux d’hiver des transplantés de Bormio (Italie) : l’or sur les épreuves de biathlon, de ski de fond skate et de course de raquettes à neige, ainsi que le bronze en ski de fond classique.
Celui qui est également champion de triathlon et de course à pied raconte cette folle semaine à Nordic Magazine.
Emmanuel Gastaud revient sur ses Jeux mondiaux d’hiver des transplantés
« J’ai récemment participé, à Bormio, en Italie, aux Jeux mondiaux d’hiver des transplantés, une compétition internationale rassemblant des personnes de différents pays ayant reçu une greffe d’organes (rein, cœur, foie, poumon, etc.). Evidemment, le niveau y est très très loin des élites et nous sommes quasiment tous des sportifs amateurs… mais nous nous entraînons dur malgré nos capacités limitées. Au même titre qu’un athlète para, nous avons un handicap physiologique causé par nos greffes et nos traitements anti-rejet. Les classements des catégories se font par catégorie d’âge. Personnellement, à quarante-trois ans, je suis master. Cette compétition est également une opportunité pour communiquer sur le don d’organes à travers le sport. »
« A Bormio, j’ai participé aux épreuves de ski nordique et de course de raquettes à neige. Depuis petit, je pratique la montagne et le ski et il était donc naturel pour moi de me préparer pour ces Jeux mondiaux d’hiver. C’est dans les Alpes-Maritimes que je me suis entraîné malgré le manque de neige : ski-roues avant la saison (sur le bord de mer !!) puis à Valberg/Beuil sur les pistes de fond. J’ai également la chance de pouvoir m’entraîner à tirer à la carabine laser, ce qui m’a permis d’arriver serein sur le stade de biathlon à Bormio. »
« Le 5 kilomètres classique de ski de fond était la première compétition. Je n’avais pas une grande forme et cette discipline n’était pas ma spécialité. Après un départ rapide, je cède rapidement face aux deux Finlandais. Mes skis avaient une bonne glisse mais je manquais d’accroche dans les montées. Je m’accroche et arrive à maintenir cette troisième place. »
« Sur le ski de fond skating, ensuite, la compétition était particulière car il s’agissait de réaliser le maximum de tours de circuit en une heure. Mes skis avaient une bonne glisse. Je pars prudemment, je reste quelques tours dans les skis d’un Finlandais puis je le dépasse et prends quelques mètres d’avance à chaque bosse. Il s’accroche, mais je maintiens l’effort pour ne pas lui donner trop d’espoir. A quinze minutes de la fin du chrono, je vois qu’il n’y arrive plus et je peux profiter de cette arrivée. Au final, je réalise 18,5 kilomètres et je gagne la médaille d’or ! »
« Le lendemain, c’était l’heure de la course de raquettes à neige ! Une première pour moi comme pour beaucoup de participants. Cette discipline demande beaucoup d’énergie pour parcourir un circuit de 2,5 kilomètres comportant quatre bosses rapides. C’était donc très court ! Un jeune Italien, qui n’était pas membre de ma catégorie, part vite et prend la tête. Je ne cherche pas à le suivre, mais je pars également vite avec un cardio à fond. 2,5 kilomètres, c’est rapide et, en 10, 15 minutes, l’histoire sera bouclée ! La neige est molle et les appuis sont complexes à trouver. Je maintiens l’effort sans relâche et, rapidement, mes adversaires ne suivent pas. »
« La dernière épreuve était le biathlon avec un sprint comportant deux tirs couché en carabine à air comprimé à 15 mètres. Mes trois principaux rivaux sont encore les deux Finlandais et un Allemand. Je pars rapidement, et j’arrive sur le stade de biathlon. Je soulève mes lunettes, décroche mes dragonnes et me pose sur le tapis. Je prends le temps de tirer parce que chaque erreur provoque 30 secondes de pénalité. Je mets du temps à lâcher la première balle puis j’enchaîne. Je suis persuadé qu’elles sont dedans, mais rien ne tombe. L’arbitre me précise que c’est bon, c’est seulement qu’ils avaient un petit souci. Je suis rassuré et repars, mais le Finlandais est toujours devant. Pour le deuxième tir, je change de tapis. De même, je réalise un 5/5 et je passe devant le Finlandais. Je sais donc que je suis en tête, parce que l’Allemand parti derrière moi ne m’a pas rattrapé. A 800 mètres de l’arrivée, je vois l’Allemand loin et je sprinte pour rattraper le premier Finlandais parti 1 minute devant moi. Je sais donc que je remporte l’épreuve. Je suis hyper fier de ce résultat parce que c’était un rêve de gosse de remporter une compétition de biathlon même si le niveau était très loin des élites. »
« Au-delà de la compétition, c’est avant tout une ode à la réussite de la transplantation. Le don d’organes sauve des vies. Pour ma part, j’ai pu bénéficier à deux reprises d’une greffe de rein. La première ayant tenu dix ans (j’ai été greffé à l’âge de dix-sept ans), j’ai à nouveau été greffé en 2011 après quatre ans de dialyses. Je ne remercierai jamais assez ces donneurs, véritables héros qui ont réalisé à leur mort le geste le plus altruiste qui puisse exister : redonner la vie. Le don d’organes symbolise la vie pour nous, les transplantés, et ces médailles en sont les meilleurs symboles ! Presque 1 000 patients meurent chaque année faute d’organes disponibles. Il est important d’en parler avec ses proches pour connaitre sa position. »
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