CHRONIQUE – Avec Vu de Norge et nulle part ailleurs, retrouvez toute l’actualité nordique norvégienne.
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Johaug et son record personnel
Jeudi dernier, Therese Johaug, seule sur la piste du stade de Bislett à Oslo, tentait d’améliorer son record personnel sur l’épreuve d’athlétisme du 10 000 mètres. C’est chose faite avec un temps de 31 minutes et 40 secondes, lui permettant d’améliorer son précédent temps et de se qualifier pour les épreuves internationales si elle le souhaite (il fallait un temps de 31 minutes et 50 secondes maximum).
« J’ai passé une excellente journée ! sourit-elle au micro de la NRK. C’est plus d’une demi-minute de mieux que mon temps à Hamar l’an dernier alors j’ai réussi mon challenge. »
La Norvégienne a aussi réaffirmé que le ski de fond était sa priorité mais que l’athlétisme lui avait permis de trouver une nouvelle source d’amusement et de motivation. Son frère et l’un de ses coachs d’athlétisme, Karstein Johaug, n’a pu retenir sa joie : « Elle a été formidable ! s’exclame-t-il. C’est une chose d’aller vite en entraînement mais le faire ici, en compétition, c’est impressionnant. Même si elle a encore commencé un peu trop vite sur le premier tour… »
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Takk for en fantastisk opplevelse Bislett? 31.40?♀️ #ImpossibleGames #huaweip40pro #HuaweiNorge
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En effet, pour son frère, Johaug a tendance à démarrer trop vite et à avoir ensuite un peu de mal à suivre le rythme. Défaut qu’elle a pu corriger à Bislett avec la ligne lumineuse lui permettant de visualiser le temps qu’elle devait faire pour réaliser les minimas mondiaux. « Je suis partie vite, j’ai dépassé la ligne et j’ai donc dû temporiser, explique la fondeuse. J’avais décidé de la suivre et, s’il me restait assez d’énergie, la dépasser à la fin ce que j’ai pu faire. »
Mais n’est-ce pas un peu tricher ? « Je pense que savoir gérer sa vitesse fait partie du défi, estime l’expert suédois Lennart Julin. Il y a toujours eu des lièvres mais une machine ? On va peut-être un peu loin… » Johaug, elle, a répondu qu’il était bien plus difficile de courir ainsi, seule face à une machine qu’avec un « lièvre » qui permet de profiter de l’effet d’aspiration.
Et même avec cette aide, le temps de Therese Johaug reste tout à fait honorable. « Exceptionnel », commentent certains médias. « Attention, c’est à peine au-dessus du temps des minimas mondiaux, temporise Johan Kaggestad, expert norvégien. Elle n’est pas la meilleure Norvégienne et loin d’être la meilleure mondiale, même si son temps est tout à fait respectable et qu’elle s’est bien entraînée. » Kaggestad préfère saluer la gestion de course de la fondeuse, l’encourageant à viser les championnats d’Europe.
Une possibilité qui pourrait bien devenir réalité… « Si elle a la motivation et le temps, alors je l’aiderai à atteindre un niveau européen ou mondial, conclut son entraîneur Pål Gunnar Mikkelsplass. La balle est dans son camp mais elle sait qu’elle peut attendre encore un peu. »
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Johaug n’est pas la bienvenue en Suède
Après sa très belle performance sur le stade de Bislett jeudi dernier, Therese Johaug n’exclut pas de recommencer et d’aller participer à d’autres épreuves d’athlétisme. Mais cette fois, à l’étranger. Elle aurait pu, si elle avait voulu, ainsi s’aligner au départ du 3 000 mètres du meeting de Bauhaus-Galan à Stockholm en août… Si les Suédois avaient bien voulu l’accueillir.
Jan Kowalski, directeur de la compétition, a ainsi confié aux médias suédois qu’il ne souhaitait pas voir Johaug sur cet événement. « Nous sommes contre le fait d’inviter des athlètes qui ont été suspendus pour dopage, c’est une mauvaise publicité pour le sport », explique Kowalski.
Une erreur qui revient hanter la fondeuse, encore et toujours. « Nous devons accepter cette décision, tout dépend de l’organisateur », a réagi le manager de Johaug, Jørn Ernst. Heureusement pour la Norvégienne, les organisateurs du meeting de Bislett ont décidé que, puisqu’elle avait purgé sa sanction, il n’était pas nécessaire de continuer à la punir.
Kowalski, lui, a reconnu que cette décision n’était pas gravée dans le marbre et pourrait être révisée si Johaug tenait vraiment à participer au meeting de la Diamond’s League à Stockholm. La fondeuse, pourtant, a pour le moment affirmé qu’elle ne concourrait plus en athlétisme cette année.
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Le saut à ski norvégien en mauvaise posture
La crise du coronavirus a durement touché l’économie de la fédération de ski norvégienne. Parmi les plus pénalisés, le saut à ski qui doit faire face à une coupe dans son budget de 8 millions de couronnes norvégiennes.
« C’est irréel de voir qu’un pays du ski comme la Norvège se retrouve dans cette situation », réagit Andreas Vilberg, entraîneur de la Top Sports Initiative qui réunissait les 15 meilleurs jeunes sauteurs du pays. Elle était aussi connue sous le nom d’équipe B nationale. Mais cette équipe est désormais démantelée. « C’est l’une des journées les plus difficiles de ma carrière de chef du saut, se lamente Clas Brede Bråthen. Ces athlètes n’obtiendront plus les moyens, les opportunités et le soutien qu’ils méritent. » Alexander Stöckl va dans le même sens, affirmant que c’est bien toute l’équipe du saut norvégien qui est attristée par la situation.
Ce vivier, qui a permis de faire monter plusieurs athlètes en coupe du monde, sera désormais entraîné par les clubs régionaux au grand dam de l’équipe nationale. Mais avec un coût de plus de 3 millions de couronnes, le budget national ne pouvait simplement pas conserver cette équipe. L’objectif reste de la refonder au plus vite. « Ne pas avoir d’équipe B pendant longtemps pourrait nous être fatal », explique Bråthen.
Ce qui inquiète le plus le directeur sportif ? Que la Norvège emprunte le chemin de la Finlande en saut à ski. Autrefois une « superpuissance » de la discipline avec des stars comme Nykänen ou Ahonen, elle doit désormais faire face à de réelles difficultés pour faire monter en coupe du monde des sauteurs qui, souvent, ne marquent pas de point. Et tout a commencé lors de la suppression de leur équipe B…
« Leur niveau n’est plus jamais remonté après ça, rappelle Bråthen. Et ce serait stupide d’ignorer les faits. Je ne veux pas que ça arrive au saut norvégien. » Le problème étant bien sûr que tous les anciens membres d’équipe B norvégienne devront désormais vraisemblablement payer pour se rendre sur les épreuves de coupe continentale. Et peu en seront capables. « Et pourtant, c’est très important pour nous d’avoir une équipe en continentale ! » souligne Stöckl, entraîneur de l’équipe nationale. Un problème financier qui semble, pour le moment, insoluble.
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Heidi Weng sur la neige
Si la plupart des membres de l’équipe norvégienne nationale de ski de fond avaient décidé avant l’annulation de ne pas faire le déplacement au Canada, Heidi Weng et Ragnhild Haga, elles, ont eu le nez moins creux.
Elles avaient décidé d’aller participer aux finales de la saison et se sont donc déplacées de l’autre côté de l’Atlantique avant l’annonce de l’annulation des épreuves. « Nous avons fait 48 heures de voyage en seulement trois jours, révèle Heidi Weng dans les colonnes de Dagbladet. Ça a été très fatigant. Heureusement, je n’étais pas toute seule. »
Ragnhild Haga, elle aussi était heureuse d’avoir de la compagnie même si elle regrette la gestion de la FIS : « Nous avons été prévenues en descendant de l’avion que les compétitions n’auraient pas lieu, raconte-t-elle. Nous venions de faire une journée de voyage. On n’est pas prêtes d’oublier ce voyage ! » rit-elle.
À leur retour en Norvège, les deux fondeuses ont été placées en quarantaine, interdites de sortie pendant deux semaines. Une aubaine pour Weng qui était épuisée du voyage puisqu’elle ne dort jamais en avion. « Je n’aime pas voler, ça me fait un peu peur, avoue-t-elle. J’ai dormi plus de 14 heures à mon retour à la maison ! »
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Depuis, elle a repris l’entraînement. Mais après quelques années difficiles, la Norvégienne a décidé de changer de tactique. « J’ai pu m’entraîner sur la neige jusqu’à fin mai, révèle Weng. Il y en avait chez moi à Lillehammer et puis après j’ai pu aller dans ma cabine de Skeikampen. Je n’ai JAMAIS autant été skier à cette période que cette année. »
En revanche, il ne faut pas y voir là une quelconque volonté de sa part : la fondeuse affirme avoir surtout cherché à éviter de tomber malade ou infecter ses proches. Sa nouvelle tactique d’entraînement ? Prendre les choses comme elles viennent et voir où elle en est à la fin de l’automne. « Elle semble faire du bon travail, se réjouit Espen Bjervig, et je pense qu’elle sera très bien préparée pour cet hiver. Quant à ses baisses de régime, il ne faut pas oublier que les fondeurs sont humains, pas des machines ! Même Marit Bjørgen a connu des passages à vide. »
Weng, en tous cas, est tout à fait motivée pour aller se frotter à ses compatriotes Johaug, Østberg et à leurs rivales étrangères.
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Tarjei Bø face au racisme
En septembre 2017, Gita Simonsen annonçait sa relation avec Tarjei Bø sur son compte Instagram. Malheureusement, comme souvent sur les réseaux sociaux, la Norvégienne a aussitôt été prise d’assaut par les commentaires méchants, glissés au milieu des félicitations. Parmi les commentaires les plus durs, des allusions racistes à ses origines guyanaises.
Au milieu des manifestations du mouvement Black Lives Matter, la petite amie du biathlète a décidé de s’exprimer sur la question sur son compte Facebook. « Le racisme en Norvège n’est pas aussi marqué qu’aux Etats-Unis, commence-t-elle. Il est différent mais tout aussi dur à vivre. Le racisme fait partie de ma vie depuis que je suis enfant, j’ai déjà été traitée de nègre, dès mes 6 ans en fait. Ça s’est amélioré quand j’ai grandi. Mais quand j’ai annoncé ma relation avec Tarjei, des gens se sont lâchés dans les commentaires. » Gita Simonsen a en effet reçu tout type de commentaires comme « tu ne pourras jamais lui donner d’enfant blond » ou bien « sale gitane » venus tout autant de personnes norvégiennes qu’étrangères.
Dans la suite de son post, Simonsen dénonce toutes les formes de racisme, rappelant que personne ne devrait être jugé sur sa couleur de peau, sa religion ou une quelconque différence.
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Une situation qui avait alors mis très mal à l’aise Tarjei Bø qui a décidé de s’exprimer au micro de TV2 : « j’ai toujours su que le racisme existait mais quand on a commencé à sortir ensemble, j’ai compris qu’en Norvège, nous n’étions pas différents, explique-t-il. Il faut vraiment se battre contre ça. À l’époque, j’ai voulu dire quelque chose mais Gita n’était pas à l’aise, elle m’a demandé de ne pas le faire et nous avons jugé qu’en revanche, maintenant était un bon moment. »
Tarjei Bø n’hésite pas à se décrire comme « naïf » avant d’avoir dû faire face à ce racisme avec sa petite amie. « Souvent, nous ne pouvons pas comprendre, nous n’y avons jamais été confronté, conclut le biathlète. Et quand ça nous arrive, il faut aider à ce que tout le monde prenne conscience du problème. »
Photo : Nordic Focus