Østberg a le feu vert
C’est officiel : Ingvild Flugstad Østberg sera au départ de la coupe du monde de ski de fond à Ruka à la fin du mois. La fondeuse a reçu le feu vert et le certificat médical de la fédération qu’elle s’était vue refuser au début de l’hiver précédent.
« C’est un soulagement, je dois dire qu’il y a eu quelques fois où je n’y croyais plus, où je pensais ne jamais revenir, admet la Norvégienne au micro de la NRK. Mais je suis heureuse d’avoir réussi à remettre les choses en place, à revenir en forme. »
Elle est aussi contente d’avoir pu compter sur le soutien de l’Association de ski, de psychologues et de nutritionnistes qui l’ont aidée à réapprendre à s’entraîner et à manger en accord avec ses besoins physiques. « Ca a été difficile de changer mes habitudes mais j’ai dû apprendre à m’entraîner moins et manger plus », explique Østberg. Des paroles qui font écho au grand débat du moment : les troubles alimentaires dont souffrent de nombreux fondeurs norvégiens.
Plus précisément, la malnutrition de la Norvégienne avait entraîné une mauvaise densité osseuse, responsable de ses deux fractures de fatigue l’hiver dernier. « Désormais, mon corps répond mieux et je suis en meilleure forme », affirme-t-elle, rassurante. Pas question, pourtant, de relâcher la vigilance. Øystein Andersen, le médecin de l’équipe nationale, a assuré qu’il continuerait de la suivre de près et effectuerait de nombreux tests avant les Jeux olympiques pour être sûr que tout va bien pour l’athlète. « Il y a encore un long chemin avant les Jeux, conclut Østberg. J’espère y être mais la santé passe avant tout. »
Ingebrigtsen frôle l’anorexie
Elle est vue comme l’une des meilleures fondeuses de sa génération depuis quelques années mais Eva Ingebrigtsen a elle a aussi un secret : elle souffre d’anorexie depuis un peu plus de trois ans. « Je ne sais plus comment ça a commencé, je crois que c’est quand une de mes coéquipières m’a battue sur un entraînement et que quelqu’un a dit que c’était normal car elle était plus légère, raconte la jeune Norvégienne de 17 ans à Dagbladet. A partir de ce moment, j’ai voulu perdre un kilo, puis un autre et après, ça ne s’arrête plus. C’est ma peur qui me faisait prendre du poids alors je me mettais de nouvelles règles, par sécurité. » Au plus mal, la jeune fondeuse ne pesait plus que 43 kg et elle n’a pas eu ses règles pendant plus de deux ans.
Il y a trois ans, alors qu’elle n’avait que 14 ans, son père s’est rendu compte que sa fille ne mangeait plus. « Elle préparait des petits pains à la maison et je la trouvais moins en forme, moins pétillante, plus renfermée, confie Ronny Ingebrigtsen. Je lui ai donc dit que j’espérais qu’elle comptait en manger et soudain, elle a fondu en larmes. Je me suis dit qu’on avait un réel problème même si je ne comprenais pas comment on en était arrivé là. » Son père a alors interdit à Eva de prendre le départ d’une course de ski de fond tant qu’elle ne serait pas en meilleure santé.
De son côté, la Norvégienne raconte son calvaire : « je ne pensais qu’à ça, à ce que je pourrais manger au prochain repas et en quelle quantité, explique-t-elle. Je n’écoutais plus en classe, je n’écoutais plus non plus mes amis, je faisais semblant d’aller bien et cela me prenait toute mon énergie. Quand mon père m’a interdit de skier, ça a été un déclic car c’était la seule chose qui me procurait vraiment du plaisir. » Car si c’est le ski qui l’a mise dans cette situation, c’est aussi le ski qui l’en a sortie.
« Je suis en bonne santé désormais mais il y a toujours des jours où je dois lutter contre ces pensées, contre l’idée que j’ai pris du poids et que je vais être moins performante, continue Ingebrigtsen. Mais tout au long de ma guérison, j’ai appris à gérer ces pensées, à les éloigner. » Avec l’aide d’un nutritionniste, d’un psychologue et en élaborant un programme de repas, la fondeuse a repris 10 kg et s’est remise en forme. « Je ne reviendrai en arrière pour rien au monde, je n’étais plus moi-même, affirme la jeune sportive. Désormais, je sais ce qu’il faut pour gagner, pour être la meilleure et j’espère être au départ des mondiaux de Trondheim en 2025, porter les couleurs de la Norvège et réaliser tout mon potentiel. »
De son côté, son père aimerait que le sujet des troubles alimentaires soit mieux abordé, plus souvent évoqué au sein de la fédération pour mieux y remédier. « Il faut être plus ouvert sur le sujet, il n’y a qu’en en parlant que l’on pourra régler la question », conclut-il.
Dagbladet mène l’enquête
Le quotidien Dagbladet s’est donc attelé à la tâche. Des journalistes et experts se sont penchés sur la question et ont interrogé, entre autres, plus de 300 élèves norvégiens scolarisés dans des lycées spécialisés dans le ski de fond ou le biathlon. Il ressort que 29% des filles âgées de 16 à 19 ans (soit 141 élèves interrogées) ont un risque accru de développer des troubles alimentaires dû à un comportement alimentaire actuel perturbé. Un chiffre extrêmement élevé qui inquiète et qui est en hausse par rapport aux précédentes études. « C’est très triste comme constat car ça affecte non seulement la santé mais aussi les études et les performances sportives, ce sont donc tous les domaines de leur vie qui entrent en jeu », commente Eva Ingebrigtsen. Chez les garçons interrogés, ce ne sont que 7,5% qui sont à risque mais c’est tout de même plus que dans les enquêtes d’il y a cinq ans.
Une enquête qui vient donc conforter tous les récents témoignages d’athlètes actuels ou retraités qui ont affirmé avoir souffert de troubles de l’alimentation. « Cela confirme que c’est un vrai défi pour les athlètes et que c’est bien plus répandu chez les filles », commente l’un des responsables de ces lycées. Problème : la fédération ne propose rien pour remédier à ce problème alors que des études avaient été menées et avaient démontré de bons résultats. Alors pourquoi ne pas proposer ces programmes à tous les jeunes sportifs ? Peut-être une question financière car ces programmes ont un coût que les lycées ne peuvent payer seuls.
Si les directeurs du ski de fond et du biathlon promettent de se pencher sur la question et de vouloir changer les choses, Johannes Thingnes Bø a lui aussi réagi à cette étude. « Je ne suis pas surpris, admet-il dans les colonnes de Dagbladet. La vie de sportif de haut niveau inclut un certain rapport à la nourriture et tout cela empire avec les réseaux sociaux, il faut juste savoir manger en quantité suffisante. » Pour le biathlète, cela vient des exigences du sport de haut niveau. Mais il souligne aussi l’importance de savoir demander de l’aide. « Il faut aussi plus en parler car ainsi, on pourra mieux reconnaître ces comportements et aider ceux qui en souffrent », conclut le cadet de la fratrie Bø.
Iversen et Holund répondent à Skinstad
Face aux récentes révélations, Petter Skinstad, fondeur et expert TV2, a participé au podcast de Øystein Pettersen, Gode Dager, où il réagit et met en porte-à-faux la fédération norvégienne et les athlètes de l’équipe nationale. Il affirme ainsi vouloir que tous soient plus honnêtes sur leur relation à leur alimentation, à leur poids et à leur corps. « Ils doivent arrêter de prétendre qu’ils n’ont pas d’opinion, ils doivent arrêter d’être lâches et s’exprimer sur la question, affirme-t-il dans le podcast retranscrit par VG. Je sais que beaucoup se posent des questions et il est important d’être ouvert sur ces questions. Je connais beaucoup de ces athlètes, je m’entraîne avec eux et ils doivent désormais se faire entendre. »
Aux côtés du fondeur Øystein Pettersen, Skinstad encourage les parents à envoyer leurs enfants au saut à ski tout en affirmant que si certains de l’équipe nationale ne se reconnaissent pas dans les récentes études sur les troubles alimentaires (comme l’entraîneur Ole Morten Iversen), il est aussi temps qu’ils s’expriment pour expliquer comment ils font pour que cela ne soit pas un problème. « Les meilleurs doivent partager ce qu’ils font, ce qu’ils mangent, ce qu’ils utilisent et montrer que ce n’est pas en perdant du poids qu’ils ont tout gagné », conclut Pettersen.
En entendant ce podcast, deux athlètes sont alors sortis de l’ombre : Emil Iversen et Hans Christer Holund. Tous deux ont partagé leur histoire sur Instagram et ont été applaudis par de nombreux autres fondeurs pour s’être exprimés. Après avoir posté une photo de lui avec d’énormes viennoiseries dans les mains, Iversen explique : « je crois que j’ai toujours été très ouvert sur ce sujet de l’alimentation et je suis fier de cette relation détendue que j’ai avec mon alimentation et les questions de poids, dit-il. Je dois dire que les sucreries, la bonne nourriture sont pour moi aussi une motivation et je prône un mode de vie équilibré pour tous. Alors faites de votre mieux avec le corps que vous avez et rappelez-vous que vous êtes bien comme vous êtes. »
Un appel au self-love que Hans Christer Holund a lui aussi partagé quelques heures plus tard. « J’ai moi-même été maigre, raconte le Norvégien. Sur cette première photo, je pesais 70 kg et je me suis demandé plus tard si ce n’était pas pour cette raison que j’avais eu un coup de moins bien, que j’étais très fatigué et si c’était ce qui a provoqué mon passage à vide. Aujourd’hui, je pèse 77 kg mais je suis bien plus rapide. Il est important pour être bon de beaucoup s’entraîner ! Et pour pouvoir faire cela, il faut bien dormir et bien manger. Et quand on se nourrit trop peu, quand on est un homme, on n’a pas assez de testostérone. On est aussi plus irritable, on dort moins bien, on peut tomber rapidement malade ou se blesser. » Un engrenage infernal découlant, au départ, d’une sous-alimentation ! « Il vaut mieux peser quelques kilos de plus à l’approche de la saison et ne vous y trompez pas, mes coéquipiers et moi nous mangeons beaucoup, conclut Holund. Si vous voulez vous entraîner comme un cheval, il faut manger comme un cheval. »
Skinstad a réagit sous le post Instagram d’Holund, le félicitant d’avoir pris la parole : « cela signifie bien plus que tu ne l’imagines pour beaucoup de personnes », a affirmé l’expert TV2. Un nouveau pas vers la recherche de solutions aux troubles alimentaires dans le sport en Norvège.
Enhardies par ces messages, Marte Olsbu Røiseland et Ingrid Landmark Tandrevold ont elle aussi partagé un post sur leur instagram. « C’est important de faire la lumière sur ce problème, estime cette première dans un article sur son blog. Mais je ne peux pas dire que je me reconnais et cela m’embête que l’on dise que notre sport est malade. Nous avons surtout, je crois, besoin de plus de personnes et de témoignages comme celui d’Emil Iversen : la nourriture peut être une part amusante de notre vie. Et j’ai appris dans ma formation d’athlète que c’était aussi notre carburant, que c’était très important. » La biathlète se confie dans cet article sur tout ce qu’elle a entrepris du côté de son alimentation, montrant que c’est une part importante de la vie d’athlète qu’il ne faut pas mettre de côté avant de conclure par un « bon appétit » bien placé et illustré par une photo pour faire bonne mesure.
Ingrid Landmark Tandrevold, elle, s’est contentée de féliciter ses compatriotes avant de rappeler que cette question lui tenait à coeur, elle l’avait d’ailleurs abordée lors d’un de ses podcasts Kant Ut avec Tiril Eckhoff, ayant elle-même dû lutter contre quelques troubles alimentaires sur lesquels elle s’était confiée il y a plusieurs mois.
Haga s’entraîne avec Bjørgen
Sortie de l’équipe nationale cet hiver, Ragnhild Haga sait qu’il sera difficile de se rendre sur les coupes du monde et aux Jeux olympiques. Elle n’est pourtant pas prête à abandonner son rêve d’obtenir de nouveaux titres olympiques. Elle s’est donc entraînée plus que jamais cet été, entre autres avec Marit Bjørgen. « C’est une stratégie que j’ai mis en place : ne pas m’entraîner seule et bien choisir mes partenaires pour continuer de progresser, pour savoir où on en est et avoir une référence », explique-t-elle au quotidien VG.
Car, loin de l’équipe nationale, il faut tout prendre en main et se débrouiller seul tant sur l’emploi du temps que sur les finances. « On se rend compte qu’on est vraiment gâtés en équipe nationale, révèle-t-elle. Mais je pense qu’avoir ce sens des responsabilités est très important et permet de s’améliorer même si là, j’ai peut-être un peu trop de responsabilités à mon goût. » Haga affirme pourtant bien se débrouiller. Elle a ainsi organisé un stage en altitude en Italie et plusieurs séances avec la Reine du ski de fond à Oslo.
De quoi rester très motivée avec des échéances qui se rapprochent de plus en plus. « Le premier test sera à Beitostølen où j’essaierai de prendre une place pour la coupe du monde et j’aurais ensuite jusqu’à Noël pour me qualifier pour les Jeux, rappelle Haga. C’est donc un peu comme une mini olympiade pour moi en novembre et en décembre, c’est très excitant. » Réussira-t-elle son pari hors de l’équipe nationale ? Verdict à Noël après les premiers week-ends de coupe du monde où les équipes olympiques norvégiennes devraient déjà être connues.
Nouveau job pour Romøren
Au milieu de l’affaire Bråthen, Bjørn Einar Romøren avait annoncé quitter son poste de directeur marketing pour le saut à ski. Il a enfin révélé, la semaine dernière, quel sera son nouvel emploi. Il travaillera désormais avec sa femme, Martine Remsøy Romøren, pour développer ses quatre boutiques de design d’intérieur et pour enfants. « Ces boutiques s’appellent Annen Etage et Lively Me et elles se situent à Fornebu et à Røa », partage Romøren dans le quotidien Dagbladet. Il sera vice-président de l’entreprise familiale et sera donc sous les ordres de sa conjointe. « Ce sera comme à la maison, ce sera elle la patronne », plaisante l’ancien sauteur à ski.
Il prendra son nouveau poste en décembre et a hâte de découvrir un nouveau milieu : « j’ai toujours été dans le saut à ski, je suis pressé de découvrir ce monde qu’elle a réussit à construire en parallèle de ma carrière sportive », conclut le Norvégien.
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