Les fondeurs trop gâtés ?
A l’arrivée du relais, le camp norvégien grimace. L’or leur échappe, ils ne prennent que l’argent. Une réussite déjà, quand on sait que cette compétition inquiétait avec une équipe en demi-teinte lors de ces Jeux olympiques. Mais pour les fondeurs, ce n’est pas suffisant. « Notre objectif en relais est toujours de gagner, on ne peut pas être heureux avec l’argent, juge Eirik Myhr Nossum, leur entraîneur, au micro de la NRK. Pour l’équipe, c’était peut-être la journée la plus importante. »
Une attitude jugée déplacée par les experts et commentateurs du ski de fond. « Regardez le bonheur des Français en bronze, la joie des Allemandes en argent hier, dit Jan Petter Saltvedt. Ce qu’ils ont montré aujourd’hui, ça confirme ce que certains pensent : les Norvégiens sont pourri-gâtés et trop habitués à gagner. Nous ne voulons pas d’une équipe, même si elle gagne, qui aurait cette attitude. »
Essayant de se justifier, Johannes Høsflot Klæbo, dernier relayeur, déclare : « on devrait s’en satisfaire car ils étaient plus forts que nous. » Hans Christer Holund est du même avis : « nous n’avions pas les ressources pour faire mieux, même si c’est ce que nous visions », dit-il. La déception se ressent… Sauf du côté d’Emil Iversen qui a fait sa première course aux Jeux aujourd’hui !
« Je suis fier de remporter l’argent olympique, confie-t-il à TV2. Je suis déçu de ma performance, c’est certain, mais fier de l’équipe. J’ai sûrement fait perdre l’or à l’équipe et si certains veulent me critiquer, j’encaisserai. » Tant mieux car Maren Lundby, la sauteuse à ski, ne s’en est pas privée. Se souvenant des remarques d’Iversen sur sa participation à l’émission Skal Vi Danse, elle a tweeté aujourd’hui : « Que dirais-tu d’un peu plus de rumba et un peu moins de lenteur sur le ski l’an prochain ? » Un tacle bien placé mais qu’Iversen prend avec le sourire. « En effet, je devrais peut-être m’inscrire à l’émission, plaisante-t-il. En tous cas, cette saison n’a pas été à la hauteur et je dois effectuer des changements », conclut-il.
Tarjei Bø au sommet, Lægreid abattu
Mieux qu’hier. Tarjei Bø ramène l’argent sur la poursuite après avoir pris le bronze sur le sprint. « C’est absolument incroyable, c’est tout ce que j’espérais ! se confie-t-il à TV2 après la course. Je voulais montrer la meilleure version de moi-même, c’est fait. Ma carrière est complète. » Et il a pu compter sur le soutien de son frère cadet, Johannes, pour aller chercher cette belle breloque. « Après le premier tir, on est sortis ensemble et je l’ai vu partir sur l’anneau de pénalité et me crier d’aller chercher la médaille, ça m’a boosté et je trouve ça incroyable d’avoir un frère qui pense à moi quand lui sait qu’il perd la médaille », raconte Tarjei Bø à la NRK.
« Sa course était géniale », le félicite son petit frère. Ce n’est pas le cas, en revanche, pour Sturla Holm Lægreid, à 10/20 sur le pas de tir aujourd’hui et 24e à l’arrivée. « J’aurais pu me passer de cette expérience, réagit-il au micro de la NRK. Très franchement, au bout d’un moment, je me suis mis à penser au relais et à me dire que je pouvais d’ores et déjà oublier cette course. » Erreur de jugement sur le réglage de la carabine ? Manque de lucidité ? Tout à la fois ? « Je dois oublier tout ça, me reconstruire, me concentrer sur ce que je sais faire », juge le Norvégien.
Pour l’expert NRK Ola Lunde, sa dernière saison a peut-être tout fait basculer du mauvais côté. « Il a été beaucoup sollicité, a donné beaucoup de son temps et peut-être a-t-il eu moins le temps de s’entraîner au tir », estime le journaliste. « Il faut être perfectionniste tout le temps, ce n’est pas chose aisée », confirme l’ancienne biathlète Liv Grete Skjelbreid.
En revanche, pas question de le laisser de côté pour le relais : il devrait courir, comme prévu, la première étape de la compétition.
Lindvik marque l’histoire
58 ans. C’est le temps que la Norvège a dû attendre pour prendre une médaille d’or sur grand tremplin aux Jeux olympiques. La dernière date des Jeux 1964 en Autriche, à Innsbruck, où Toralf Engan avait été titré. « Et à l’époque, ils allaient moins loin que les sauteurs sur petit tremplin de nos jours », sourit Clas Brede Braathen devant les caméras de TV2.
Pourtant, Marius Lindvik aurait pu ne même pas être là. Quand il a appris que quelqu’un de sa famille était positif au coronavirus, il s’est installé chez Daniel Andre Tande pour une nuit… Celle juste avant que le sauteur ne soit lui-même déclaré positif ! « J’ai eu une chance folle, confirme-t-il. J’ai vécu une semaine très compliquée après cette journée, j’avais très peur. »
Finalement, tout finit bien : le Norvégien est champion olympique. « C’était une très belle performance, ses deux sauts étaient incroyables, juge son entraîneur Alexander Stöckl au micro de la NRK. Il a travaillé longtemps pour ça, c’est un moment particulier. » « Je peux à peine parler tellement je suis heureux, réagit Lindvik après le concours. Je travaille pour ce moment depuis que je me suis mis au saut à ski. Je ne sais plus quoi dire. »
Le sauteur n’a pas non plus oublié d’impressionner ses coéquipiers. « Il est là au bon moment, aux grands rendez-vous, il est incroyable, juge Halvor Egner Granerud. C’était une journée parfaite pour devenir champion olympique, personne ne peut dire que ce n’était pas lui le meilleur aujourd’hui. »
En Norvège, ses parents ont aussi suivi les exploits du jeune athlète. « J’ai cru que j’allais faire une crise cardiaque au moins trois fois ! plaisante son père, interrogé par la NRK. C’est très émouvant de voir sa joie, sa réussite. Ça réchauffe mon coeur de père. Je sais à quel point il a travaillé, les sacrifices qu’il a fait… »
Marius Lindvik est finalement devenu, hier, héros de toute une nation qui attendait ce moment depuis près de six décennies.
Et ailleurs ?
Si la Norvège remporte aujourd’hui une médaille d’argent en relais masculin et trois en biathlon (or, argent et bronze), elle repart en revanche bredouille du patinage de vitesse. Idem pour le ski alpin où Henrik Kristoffersen termine 8e du géant.
Grâce au nordique, elle revient tout de même à la première place du tableau des médailles avec 21 remportées depuis le début des Jeux !
Hors piste
Comme Filip Fjeld Andersen, Vetle Sjåstad Christiansen voulait se créer un Tiktok pendant les Jeux olympiques pour partager et regarder des vidéos. Mais le Norvégien l’a appris à ses dépends : la Chine ne plaisante vraiment pas avec les réseaux sociaux. Son compte s’est donc retrouvé clôturé. « Je crois que j’ai oublié d’utiliser un VPN ce jour-là, ils ont dû me repérer, rigole le biathlète au micro de TV2. Je pense que Tiktok, c’est déjà fini pour moi. »
Lorsqu’ils sont arrivés, les Norvégiens ont aussi été prévenus par le CIO : interdiction de filmer les installations du stade et partout où il faut une accréditation pour accéder. « Je suppose que nous avons le droit au village olympique, c’est tout », réagit Christiansen qui confirme qu’on leur a dit de tout supprimer dans leur téléphone.
La Norvège avait aussi annoncé qu’elle mettrait un VPN Olympiatoppen en place spécialement pour la délégation. « En effet et la plupart d’entre nous a aussi installé un second VPN par dessus donc normalement, nous sommes bien protégés », conclut-il.
Sturla Holm Lægreid, lui, a été plus prudent. « J’ai laissé mon ordinateur à la maison et j’ai acheté une tablette uniquement pour venir ici pour que les Chinois n’aient accès à aucune donnée personnelle », explique-t-il. C’était en effet l’une des craintes de nombreuses délégations.
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1 Commentaire(s)
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Juliette
13/02/2022 à 23 h 16 min
Super JOyanes , se rendre compte qu’il perd une medaille et encourage en plein effort son grand frère ! ces deux Norvegiens ont un charisme vis a vis de tout le monde, exemplaire, ca vaut plus que des medailles !
Je ne crois pas que les Fondeurs Norvegiens soient trop gates, juste globalement tellement habitues jusque là a vouloir écraser les autres, avec parfois du mepris ( Yohaug aussi) , avec peu de concurrence , ils ont du mal a admettre les progres des autres nations et a realiser qu’ils ne sont plus toujours les meilleurs. Mais qui ne veut pas toujours gagner ? cela est le but des athletes, n’est ce pas Quentin ?